Charte de Gênes
Le 19 Juillet 2016
22 août 2016 par Collectif
CC - Flickr - Luca Volpi
Quinze ans après la tenue du G8 à Gênes et à l’occasion de l’année du Jubilé de la Miséricorde, nous nous sommes donné rendez-vous pour échanger sur une des questions globales les plus urgentes : la hausse de l’endettement des peuples de la planète. Nous nous sommes confrontés avec des experts laïques et croyants engagés sur cette thématique depuis des années.
La responsabilité collective de la Miséricorde qui consiste à offrir à tout le monde une possibilité de vie digne, nous incite à dénoncer publiquement les indifférences, les réserves, pour arriver à débusquer de manière responsable les privilèges et les hypocrisies, qui ne font qu’accroître la richesse et la tyrannie des classes dominantes, tout en augmentant la pauvreté et l’oppression des populations les plus exploitées.
Depuis plusieurs années, la dette
Dette
Dette multilatérale : Dette qui est due à la Banque mondiale, au FMI, aux banques de développement régionales comme la Banque africaine de développement, et à d’autres institutions multilatérales comme le Fonds européen de développement.
Dette privée : Emprunts contractés par des emprunteurs privés quel que soit le prêteur.
Dette publique : Ensemble des emprunts contractés par des emprunteurs publics.
est mise en avant aux niveaux international, national et local, afin de nous faire accepter, comme inévitables, les politiques libérales d’aliénation du patrimoine public, notamment la marchandisation des biens communs, la privatisation des services publics, l’affaiblissement de la démocratie et des droits. En réalité, la dette est utilisée comme le choc qui sert à « rendre inévitable au niveau politique ce qui est socialement inacceptable ».
Même en Europe, l’idéologie de la finance et de l’austérité budgétaire est promue alors même qu’elle est la responsable de la création de la dette et des inégalités. Cette idéologie a réveillé les égoïsmes, les nationalismes et les pressions isolationnistes, qui ne font qu’agrandir le gouffre d’une Europe sans âme, ramenant l’horloge de l’histoire à des périodes caractérisées par des conflits dramatiques.
L’horreur des exclusions et de la dangereuse construction matérielle et mentale des murs et frontières se réalise sous nos yeux. C’est la conséquence d’un sens de la limite incompréhensible, qui frappe les cibles humaines au lieu de frapper les logiques qui animent la finance sans principes.
Ce qui prévaut est une économie extractive, qui détermine les privatisations des biens communs, la destruction, la misère, les guerres, les migrations et les changements climatiques irréversibles qui impactent les zones les plus vulnérables de la planète. Cela crée une dette écologique
Dette écologique
La dette écologique est la dette contractée par les pays industrialisés envers les autres pays à cause des spoliations passées et présentes de leurs ressources naturelles, auxquelles s’ajoutent la délocalisation des dégradations et la libre disposition de la planète afin d’y déposer les déchets de l’industrialisation.
La dette écologique trouve son origine à l’époque coloniale et n’a cessé d’augmenter à travers diverses activités :
La « dette du carbone ». C’est la dette accumulée en raison de la pollution atmosphérique disproportionnée due aux grandes émissions de gaz de certains pays industriels, avec, à la clé, la détérioration de la couche d’ozone et l’augmentation de l’effet de serre.
La « biopiraterie ». C’est l’appropriation intellectuelle des connaissances ancestrales sur les semences et sur l’utilisation des plantes médicinales et d’autres végétaux par l’agro-industrie moderne et les laboratoires des pays industrialisés qui, comble de l’usurpation, perçoivent des royalties sur ces connaissances.
Les « passifs environnementaux ». C’est la dette due au titre de l’exploitation sous-rémunérée des ressources naturelles, grevant de surcroît les possibilités de développement des peuples lésés : pétrole, minéraux, ressources forestières, marines et génétiques.
L’exportation vers les pays les plus pauvres de produits dangereux fabriqués dans les pays industriels.
Dette écologique et dette extérieure sont indissociables. L’obligation de payer la dette extérieure et ses intérêts impose aux pays débiteurs de réaliser un excédent monétaire. Cet excédent provient pour une part d’une amélioration effective de la productivité et, pour une autre part, de l’appauvrissement des populations de ces pays et de l’abus de la nature. La détérioration des termes de l’échange accentue le processus : les pays les plus endettés exportent de plus en plus pour obtenir les mêmes maigres recettes tout en aggravant mécaniquement la pression sur les ressources naturelles.
assumée principalement par des pays qui d’une part, ne sont pas responsables de ces désastres écologiques et sont exclus de la répartition des richesses, et d’autres part sont enlisés dans une dette publique en grande partie illégitime, les rendant encore davantage esclaves d’un système économique qui exploite la planète et l’humanité.
C’est en ce sens que va l’analyse du « Conseil Pontifical de justice et paix ». Le message que le président du Conseil – le cardinal Peter K. A. Turkson – a envoyé aux participants de ce congrès : « Du G8 G8 Ce groupe correspond au G7 plus la Fédération de Russie qui, présente officieusement depuis 1995, y siège à part entière depuis juin 2002. à l’Encyclique Laudato sì : le Jubilé de la dette ? », est éclairant et important sur le plan politique. Voici un extrait du message : « Au cours des dernières années, en raison de la crise économique et financière internationale, le problème de la dette publique a émergé même dans les économies des pays développés, en particulier en Europe. Face à une crise de la dette devenue toujours plus globale, il serait approprié – dans ces derniers mois de l’année de la Miséricorde – de réfléchir à nouveau sur l’opportunité de réduire, voire d’annuler la dette des pays qui sont écrasés par ce poids et qui n’arrivent pas à jeter les bases pour construire un développement humain, en particulier parmi les nouvelles générations. Le Pape François nous rappelle dans « Misericordiae Vultus » (document annonçant le Jubilé de la Miséricorde), que « la mention du respect de la loi ne peut pas entraver l’accent sur les besoins qui affectent la dignité des personnes ». Toujours dans le message, il est souligné que même le Centre africain d’études sur le développement et les études de stratégie déclarent que « la dette démolit les écoles, les hôpitaux et les cliniques, et ses effets ne sont pas moins dévastateurs que ceux d’une guerre ».
L’idéologie de la dette met en échec la démocratie. Elle prédétermine les choix politiques et économiques, tant au niveau national qu’au niveau local, tout en menaçant la fonction publique et sociale des collectivités locales et en détricotant le tissu social de la communauté.
Agir contre l’idéologie et la matérialité de la dette constitue par conséquence un engagement prioritaire que nous prenons collectivement.
Ce n’est pas la première fois lors de ces quinze dernières années que les mouvements sociaux et ecclésiastiques se rencontrent pour mettre en commun des analyses, des réflexions et des actions sociales pour contrer « L’économie qui tue » et « La tyrannie invisible » (Evangelii Gaudium 53, 56) des marchés financiers.
Ensemble, nous avons promu des initiatives pour le contrôle démocratique des mouvements des capitaux financiers ; ensemble nous avons contrarié les traités de libre-échange (de la directive Bolkestein à l’actuelle TTIP – hypothèse d’un traité de libre-échange entre les USA et l’UE) ; ensemble nous avons favorisé la sensibilisation et la mobilisation pour la défense des biens communs et pour un nouveau modèle de société et de démocratie.
Aujourd’hui, toujours ensemble, nous devons prendre des mesures pour promouvoir à tous les niveaux la libération des peuples et des communautés de la dette illégitime et odieuse, à travers la participation directe des personnes.
Depuis longtemps même dans notre pays, des enquêtes et des audits de la dette ont commencé dans différents territoires et villes, notamment à Rome, Naples, Parme, ou encore Livourne. Ces enquêtes ont démasqué les pouvoirs qui se cachent derrière.
C’est à partir de ces expériences qu’a été lancée en Italie la création du Comité pour l’abolition des dettes illégitimes (CADTM), un parcours collectif pour évaluer la question de l’abolition de la dette, qui est un point fondamental pour une économie et une finance plus justes.
C’est sur la base de ces réflexions et de ces considérations partagées que nous, réunis aujourd’hui à Gênes, après cette journée de travail collectif, approuvons la Charte ci-jointe d’unité d’objectif et d’action. Nous exprimons l’intérêt à nous engager en tant qu’individus ou organisations pour proposer à toutes les réalités actives au niveau local, national et international], la construction d’un parcours, dont les objectifs sont les suivants :
Comme nous l’avons entendu dans la discussion de cette journée, nous avons pensé le parcours suivant :
La Charte de Gênes est partagée et signée par :
Arci nazionale- Attac Italia - Commissione per l’audit del debito del Comune di Parma – Communia - Fondazione « Lorenzo Milani » ONLUS di Termoli - Pax Christi Italia
Premiers signataires :
1. Alioti Gianni, Genova
2. Aloisi Vanda, Genova
3. Astigiano Simonetta, Genova
4. Balbi Cecila Serenella, Genova
5. Bartolini Paolo, Genova
6. Bersani Marco, Roma
7. Bertorello Marco, Genova
8. Bertulacelli Norma, Genova
9. Bevilacqua Graziella, Genova
10. Bigliazzi Vittorio, Genova
11. Bonavita Liliana, Sarzana
12. Bonotto Tarcisio, Verona
13. Borghetti Valerio, Aulla
14. Borzani Luca, Genova
15. Bruno Antonio, Genova
16. Calvi Cristiano, Genova
17. Caniglia Giorgio, Dolceacqua (IM)
18. Cenacchi Annarita, Bologna
19. Cifatte Anfelo, Genova
20. Cimmino Claudio, Genova
21. Coin Francesca, Milano
22. Corazza Giancarlo, Genova
23. Coscione Peppino, Genova
24. Cosentino Pino, Genova
25. Cosoli Mariangela, La Spezia
26. Culotta Claudio, Genova
27. De Lellis Antonio, Termoli
28. Delfino Francesca, Montesilvano (PE)
29. Di Nicola Renato, Pescara
30. Esposito Giovanni, Bolano (SP)
31. Fabbri Marco, Genova
32. Fasce Luigi, Genova
33. Ferrari Marcello, Livorno
34. Ferretti Avelino, Reggio Emilia
35. Filoni Chiara, Bruxelles
36. Firenze Roberto, Milano
37. Franco Fabrizio, Sarzana
38. Gaggero Maria Grazia, Genova
39. Gaggio Giuliani Haidi, Genova
40. Gambale Antonio, Genova
41. Garaventa Cristopher, Genova
42. Gesualdi Francesco, Vecchiano (PI)
43. Giampaoli Mauro, Sanremo
44. Giardi Adriana, Genova
45. Ghirardelli Antonella, Salsomaggiore Terme (PR)
46. Gonnella Giuseppe, Genova
47. Guglieri Mario Giovanni, Genova
48. Innocenti Mauro, Bologna
49. Lazzarotto Anna, Genova
50. Lombardi Rosaria, Bolano (SP)
51. Lovera Vittorio, Roma
52. Lucchetti Deborah, Genova
53. Luciano don Flavio, Cuneo
54. Malandra Jacqueline, Tortona
55. Manti Antonio, Genova
56. Marini Elisa, Campo S. Martino (PD)
57. Melone Roberto, Albenga
58. Michelotti Sabrina, Parma
59. Mucci Maria, Cascina (PI)
60. Negro Luciana, Salsomaggiore Terme (Pr)
61. Nicolella Clizia, Genova
62. Orlandini Dino, Genova
63. Parisi Pino, Genova
64. Pelliti Giorgio, La Spezia
65. Piccoli don Silvio, Termoli
66. Quintavalla Cristina, Parma
67. Ricchiuti mons. Giovanni, Altamura (BA)
68. Risso Stefano, Torino
69. Rocca Mario, Milano
70. Rodari Erica, Milano
71. Ruffini Carla Maria,
72. Sander Sonia, Genova
73. Santucci Mauro, Chiavari (GE)
74. Sartorio Marina, Genova
75. Sassi Edoardo, Termoli
76. Sommella Mario, Acerra (NA)
77. Sonzini Valentina, Genova
78. Stumpo Marcella, Termoli
79. Tasso Ambretta, Genova
80. Tonda Silvio, Susa (TO)
81. Tretola Mario, Cuneo
82. Ventullo Ornella, Genova
83. Valentinetti mons. Tommaso, Pescara
84. Viale Guido, Milano
85. Zannoni Danilo, Genova
86. Padre Alex Zanotelli, Napoli
Pour tout contact et adhésion, se référer à :
Antonio De Lellis : adelellis at clio.it
Antonio Manti : mantanna at tin.it
[1] Note du traducteur . L’article 47 de la Constitution italienne encourage et protège l’épargne dans toutes ses forme ; il discipline, coordonne et contrôle l’exercice du crédit. Il promue également l’accès de la population à l’épargne pour l’habitation, la propriété de la terre et l’investissement actionnaire dans les industries du pays.
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