Atelier de renforcement des capacités de la société civile sur les dettes illégitimes, leurs impacts sur les droits humains, et les alternatives possibles

Déclaration de Yaoundé

30 mars par CADTM Afrique


La lutte contre les dettes illégitimes, illégales, insoutenables et odieuses est au cœur des préoccupations de la société civile africaine et même occidentale depuis plus de deux décennies, au regard des enjeux qui s’y dégagent.



  Sommaire  

C’est dans cette optique que le Comité pour l’Abolition des Dettes Illégitimes (CADTM) en partenariat avec la Plateforme d’Information et d’Action sur la Dette Dette Dette multilatérale : Dette qui est due à la Banque mondiale, au FMI, aux banques de développement régionales comme la Banque africaine de développement, et à d’autres institutions multilatérales comme le Fonds européen de développement.
Dette privée : Emprunts contractés par des emprunteurs privés quel que soit le prêteur.
Dette publique : Ensemble des emprunts contractés par des emprunteurs publics.
(PFIAD) a organisé un « atelier de renforcement des capacités de la société civile sur les dettes illégitimes, leurs impacts sur les droits humains et les alternatives possibles » du 27 au 29 mars 2023 à Yaoundé .Cet atelier a regroupé des participants issus de cinq pays africains dont le Maroc, le Mali, le Togo, la République Démocratique du Congo et le Cameroun. Le contenu des modules abordés au cours de l’atelier se structure autour de cinq axes, à savoir :

  • La dette, un instrument du sous-développement de l’Afrique ;
  • Microcrédit et endettement en Afrique ;
  • Les accords de libre-échange et la dette en Afrique : deux instruments du néocolonialisme ;
  • Les alternatives pour sortir du piège de l’endettement.

Animés par des militant·e·s et des acteur·rices de la société civile, ces modules ont généré des échanges et débats en plénière qui ont conduit à l’adoption des résolutions et recommandations suivantes :

 Résolutions

Les acteur·rices de la société civile présent·e·s à l’atelier :

1- Réaffirment leur engagement à se mobiliser davantage, à s’organiser et à fédérer leurs efforts dans la lutte contre les dettes illégitimes, illégales, insoutenables et odieuses en Afrique ;
2- S’engagent à intensifier les actions Action
Actions
Valeur mobilière émise par une société par actions. Ce titre représente une fraction du capital social. Il donne au titulaire (l’actionnaire) le droit notamment de recevoir une part des bénéfices distribués (le dividende) et de participer aux assemblées générales.
/campagnes d’information, de sensibilisation et d’éducation populaire sur la dette, afin de susciter la construction de mouvements sociaux forts capables d’inverser le rapport de force en faveur des couches populaires ;
3- Encouragent les organisations de la société civile africaines à mener des audits citoyens de la dette dans leurs pays respectifs, avec la participation effective des citoyen·nes dans le processus ;
4- Exhortent la société civile africaine à mettre en place des dynamiques sociales nationales, continentales et même internationales pour élargir le front contre les dettes illégales, illégitimes, insoutenables et odieuses en Afrique ;
5- Réaffirment la volonté populaire d’indépendance et de souveraineté réelles des pays du Sud.

 Recommandations

La société civile africaine :

1- Exhorte tous les dirigeants africains à répudier les dettes illégitimes, illégales, insoutenables et odieuses, et à refuser la poursuite des conditionnalités Conditionnalités Ensemble des mesures néolibérales imposées par le FMI et la Banque mondiale aux pays qui signent un accord, notamment pour obtenir un aménagement du remboursement de leur dette. Ces mesures sont censées favoriser l’« attractivité » du pays pour les investisseurs internationaux mais pénalisent durement les populations. Par extension, ce terme désigne toute condition imposée en vue de l’octroi d’une aide ou d’un prêt. antisociales et néolibérales imposées par les Institutions de Bretton Woods (FMI FMI
Fonds monétaire international
Le FMI a été créé en 1944 à Bretton Woods (avec la Banque mondiale, son institution jumelle). Son but était de stabiliser le système financier international en réglementant la circulation des capitaux.

À ce jour, 190 pays en sont membres (les mêmes qu’à la Banque mondiale).

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et BM Banque mondiale
BM
La Banque mondiale regroupe deux organisations, la BIRD (Banque internationale pour la reconstruction et le développement) et l’AID (Association internationale de développement). La Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD) a été créée en juillet 1944 à Bretton Woods (États-Unis), à l’initiative de 45 pays réunis pour la première Conférence monétaire et financière des Nations unies.

En 2022, 189 pays en sont membres.

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) ;

2- Exige la sortie des Etats africains du franc CFA et la création des monnaies nationales avec des banques centrales nationales qui vont fixer les parités de leurs monnaies en fonction de leurs spécificités économiques locales ;

3- Exhorte les dirigeants africains à mettre en place une Banque du Sud comme alternative aux Institutions Financières Internationales (IFI) ;

4- Exhorte les pays du Sud à mener des politiques de désendettement par tous les moyens, seule voie pour l’autodétermination des peuples ;

5- Plaide pour un audit citoyen de la dette publique au Cameroun qui intégrera toutes les composantes de la société civile et les couches populaires du pays. Exige le droit à l’information et à un accès libre à tous les documents et relatifs à cette dette.

6- Exhorte les Etats africains à développer des mesures alternatives à la dette pour financer leurs projets et programmes de développement, notamment en adoptant une fiscalité juste qui augmente les ressources de l’Etat et réduit ses besoins de financement par la dette extérieure, et en promouvant un modèle de développement endogène, autocentré avec pour priorité la garantie des droits économiques, sociaux, culturels et politiques des peuples ;

7- Lance un appel aux dirigeants africains à plus de transparence et de redevabilité dans la gestion des dettes publiques, vis-à-vis de leurs populations ;

8- Exige la mise en place d’un système de contrôle pour stopper les flux financiers illicites et aider l’Afrique à rapatrier ces fonds et à poursuivre les auteurs.

9- Demande la remise en cause des accords dits de partenariat économique qui sont des accords coloniaux et constituent un mécanisme de pillage et de domination de nos pays par les multinationales. La zone de libre-échange continentale africaine ne fera qu’accentuer cette mainmise des multinationales et le grand capital local sur nos richesses et pérenniser notre dépendance économique et alimentaire.

10- Exige la mise en place de projets alternatifs de coopération commerciale qui doit être construite sur les principes de solidarité, de complémentarité, de justice et de coopération, et qui doit placer l’être humain au centre de ses principes.

11-Refuse le système du microcrédit qui accentue la pauvreté et dénonce les harcèlements des institutions de la microfinance plus particulièrement contre les femmes.

12- Exige la création d’un système public de crédits sans intérêt ou avec un intérêt plus bas destiné aux pauvres, toute en poursuivant la création des emplois en augmentant les budgets d’investissement dans les secteurs publics, l’arrêt de démantèlement des services publics (éducation, santé) et renationalisation des entreprises publique et les terres agricoles privatisées.

13- Encourage l’internalisation de la lois Belge sur les fonds vautours Fonds vautour
Fonds vautours
Fonds d’investissement qui achètent sur le marché secondaire (la brocante de la dette) des titres de dette de pays qui connaissent des difficultés financières. Ils les obtiennent à un montant très inférieur à leur valeur nominale, en les achetant à d’autres investisseurs qui préfèrent s’en débarrasser à moindre coût, quitte à essuyer une perte, de peur que le pays en question se place en défaut de paiement. Les fonds vautours réclament ensuite le paiement intégral de la dette qu’ils viennent d’acquérir, allant jusqu’à attaquer le pays débiteur devant des tribunaux qui privilégient les intérêts des investisseurs, typiquement les tribunaux américains et britanniques.
afin de contrecarrer leurs actions.

Fait à Yaoundé, le 29 mars 2023

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