Interview d’Eric Toussaint par Bertrand Henne dans l’Emission « Matin Première » de la RTBF

Eric Toussaint : « Oser sortir du confort de 30 ans de libéralisme »

23 mars 2012 par Eric Toussaint , Bertrand Henne




Eric Toussaint, économiste et président du Comité pour l’annulation de la dette Dette Dette multilatérale : Dette qui est due à la Banque mondiale, au FMI, aux banques de développement régionales comme la Banque africaine de développement, et à d’autres institutions multilatérales comme le Fonds européen de développement.
Dette privée : Emprunts contractés par des emprunteurs privés quel que soit le prêteur.
Dette publique : Ensemble des emprunts contractés par des emprunteurs publics.
du tiers monde de Belgique était l’invité de Matin Première ce jeudi. L’occasion de revenir sur l’impact des garanties Garanties Acte procurant à un créancier une sûreté en complément de l’engagement du débiteur. On distingue les garanties réelles (droit de rétention, nantissement, gage, hypothèque, privilège) et les garanties personnelles (cautionnement, aval, lettre d’intention, garantie autonome). Dexia sur le Trésor public.

Un observateur a tiré la sonnette d’alarme : il est bien possible que la Belgique doive payer une partie de ces 54 milliards d’euros de garanties. « Deux, trois ou cinq milliards, ce serait déjà énorme ! », s’exclame Eric Toussaint dans le studio de Matin Première.

« Les efforts d’austérité sur plusieurs années demandés au Belges s’élèvent à 15 milliards », dit-il en guise de comparaison. Eric Toussaint s’en inquiète. C’est pourquoi le Comité pour l’annulation de la dette du tiers monde de Belgique (CADTM) a introduit une requête en annulation de l’arrêté royal octroyant ces garanties.

« La Belgique est dans l’erreur » Il y a, selon l’auteur de la requête, un « viol de la Constitution » à cause du manque de transparence sur ces garanties de 54 milliards, un montant équivalent à 15% du PIB PIB
Produit intérieur brut
Le PIB traduit la richesse totale produite sur un territoire donné, estimée par la somme des valeurs ajoutées.
Le Produit intérieur brut est un agrégat économique qui mesure la production totale sur un territoire donné, estimée par la somme des valeurs ajoutées. Cette mesure est notoirement incomplète ; elle ne tient pas compte, par exemple, de toutes les activités qui ne font pas l’objet d’un échange marchand. On appelle croissance économique la variation du PIB d’une période à l’autre.
. Pour le CADTM, le fait que le ministre des Finances puisse octroyer les garanties à la demande de Dexia est anticonstitutionnel. « Ça devait passer par une loi », estime Eric Toussaint, comme cela s’est fait en France : « La Belgique est dans l’erreur », prévient-il.

Les responsables publics disent qu’au final, le Trésor public ne va pas y perdre parce que les banques paient des intérêts sur ces garanties. Ce à quoi l’invité de Bertrand Henne répond que « Didier Reynders a systématiquement transformé la réalité ».

Sortir de 30 ans de libéralisme
Eric Toussaint en appelle à « oser sortir du confort intellectuel de 30 ans de libéralisme ». « Quand l’État reste systématiquement au service de l’intérêt privé et des banques quoi qu’elles fassent, on est incapables d’envisager de véritables solutions ».

L’invité de Bertrand Henne précise qu’il ne remet ni en cause les garanties données aux épargnants belges à concurrence de 100 000 euros, ni les coopérants d’ARCO. « Épargnants et coopérants doivent être protégés », affirme-t-il. Par contre, « nous n’acceptons pas de laisser dans l’impunité totale les responsables de la débâcle de Dexia, Fortis, KBC, Ethias et de la deuxième débâcle de Dexia de 2011 ».

Dans le cas de Dexia et Fortis, Eric Toussaint met plusieurs éléments en cause pour expliquer la débâcle. D’une part « un délire de grandeur ; soit faire un maximum de chiffre d’affaire et absorber un maximum d’entités ». D’autre part, « la volonté de faire du profit immédiat maximum ». Le résultat, c’est que le coût net du sauvetage des banques, c’est presque 18 milliards d’euros pour la Belgique. Une dette « illégitime » ajoutée à la dette publique belge, selon Eric Toussaint.

Résumé par Bertrand Henne

Emission Matin Première (Première partie)

La vidéo : http://www.rtbf.be/info/belgique/detail_eric-toussaint-oser-sortir-du-confort-de-30-ans-de-liberalisme?id=7734905#newsVideosPane

Emission Matin Première (Deuxième partie, questions publiques)


Eric Toussaint

Docteur en sciences politiques des universités de Liège et de Paris VIII, porte-parole du CADTM international et membre du Conseil scientifique d’ATTAC France.
Il est l’auteur des livres, Banque mondiale - Une histoire critique, Syllepse, 2022, Capitulation entre adultes : Grèce 2015, une alternative était possible, Syllepse, 2020, Le Système Dette. Histoire des dettes souveraines et de leur répudiation, Les liens qui libèrent, 2017 ; Bancocratie, ADEN, Bruxelles, 2014 ; Procès d’un homme exemplaire, Éditions Al Dante, Marseille, 2013 ; Un coup d’œil dans le rétroviseur. L’idéologie néolibérale des origines jusqu’à aujourd’hui, Le Cerisier, Mons, 2010. Il est coauteur avec Damien Millet des livres AAA, Audit, Annulation, Autre politique, Le Seuil, Paris, 2012 ; La dette ou la vie, Aden/CADTM, Bruxelles, 2011. Ce dernier livre a reçu le Prix du livre politique octroyé par la Foire du livre politique de Liège.
Il a coordonné les travaux de la Commission pour la Vérité sur la dette publique de la Grèce créée le 4 avril 2015 par la présidente du Parlement grec. Cette commission a fonctionné sous les auspices du parlement entre avril et octobre 2015.

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