Faire reconnaître la dette écologique des pays du Nord envers les pays du Sud

22 août 2004 par Sylvie Bourinet




1 - Un nouveau concept à faire connaître

Si tout le monde sait à peu près ce qu’est la dette Dette Dette multilatérale : Dette qui est due à la Banque mondiale, au FMI, aux banques de développement régionales comme la Banque africaine de développement, et à d’autres institutions multilatérales comme le Fonds européen de développement.
Dette privée : Emprunts contractés par des emprunteurs privés quel que soit le prêteur.
Dette publique : Ensemble des emprunts contractés par des emprunteurs publics.
des pays du tiers-monde, dette financière il s’entend, il n’en va pas de même de la dette écologique Dette écologique La dette écologique est la dette contractée par les pays industrialisés envers les autres pays à cause des spoliations passées et présentes de leurs ressources naturelles, auxquelles s’ajoutent la délocalisation des dégradations et la libre disposition de la planète afin d’y déposer les déchets de l’industrialisation.

La dette écologique trouve son origine à l’époque coloniale et n’a cessé d’augmenter à travers diverses activités :


- La « dette du carbone ». C’est la dette accumulée en raison de la pollution atmosphérique disproportionnée due aux grandes émissions de gaz de certains pays industriels, avec, à la clé, la détérioration de la couche d’ozone et l’augmentation de l’effet de serre.

- La « biopiraterie ». C’est l’appropriation intellectuelle des connaissances ancestrales sur les semences et sur l’utilisation des plantes médicinales et d’autres végétaux par l’agro-industrie moderne et les laboratoires des pays industrialisés qui, comble de l’usurpation, perçoivent des royalties sur ces connaissances.

- Les « passifs environnementaux ». C’est la dette due au titre de l’exploitation sous-rémunérée des ressources naturelles, grevant de surcroît les possibilités de développement des peuples lésés : pétrole, minéraux, ressources forestières, marines et génétiques.

- L’exportation vers les pays les plus pauvres de produits dangereux fabriqués dans les pays industriels.

Dette écologique et dette extérieure sont indissociables. L’obligation de payer la dette extérieure et ses intérêts impose aux pays débiteurs de réaliser un excédent monétaire. Cet excédent provient pour une part d’une amélioration effective de la productivité et, pour une autre part, de l’appauvrissement des populations de ces pays et de l’abus de la nature. La détérioration des termes de l’échange accentue le processus : les pays les plus endettés exportent de plus en plus pour obtenir les mêmes maigres recettes tout en aggravant mécaniquement la pression sur les ressources naturelles.
, un concept nouveau qui a moins de 15 ans.

De quoi parle-t-on ? La dette écologique, c’est une dette qui est due par les pays du Nord aux pays du tiers-monde, autrefois colonisés, aujourd’hui habilement spoliés que ce soit à travers l’exploitation de leurs ressources naturelles, les impacts environnementaux exportés ou la libre utilisation de l’espace planétaire pour y déposer des déchets.

La dette écologique, qui a donc vu le jour à l’époque coloniale, n’a cessé d’augmenter depuis. Elle est de beaucoup supérieure à la dette extérieure (financière) du Sud envers le Nord (évaluée à environ 2 500 milliards de dollars même si aucune évaluation globale de la dette écologique n’a encore été réalisée à ce jour.

1.1. Un concept né au Sud et porté par différentes organisations

C’est vers 1990 que l’Institut d’écologie politique du Chili a forgé le concept de dette écologique. Décrivant les cancers de la peau provoqués par la diminution de la couche d’ozone, cet institut a mis en cause les pays riches pour leur production de CFC, les gaz responsables du changement climatique, comme le rappelle Joan Martinez Alier, un des spécialistes européens de la dette écologique dans un petit ouvrage disponible en français sous le nom : « La dette écologique - qui doit à qui ? » écrit par le CDE (Collectif de diffusion de la dette écologique) et publié par le CADTM-France. En 1992, à Rio de Janeiro, pendant le sommet de la Terre, des groupes d’écologistes adoptent un « document de référence » où ils lient la dette extérieure, due par le Sud au Nord, à la dette écologique dont les débiteurs sont les citoyens et les entreprises des pays riches, et les créditeurs les habitants des pays pauvres.
Le concept fait son chemin puisqu’en novembre 1999 à Johannesburg en Afrique du Sud est lancée la Campagne internationale pour la reconnaissance et la réclamation de la dette écologique. Un an plus tard, en septembre 2000, c’est à Prague que voit le jour l’Alliance des peuples du Sud créanciers de la dette écologique (SPEDCA - Southern People Ecological Debt Creditors Alliance).

Au sein de la SPEDCA, citons le nom de quelques organisations particulièrement actives :

-  Accion ecologica, (Equateur), une organisation qui a évalué par exemple les dommages causés par la compagnie pétrolière Texaco ;
-  Jubile Sud, groupement d’organisations travaillant principalement sur la dette financière, créé lors de la campagne Jubilé 2000 pour l’annulation de la dette des pays pauvres ;
-  OilWatch, le Réseau de résistance aux activités pétrolières dans les pays tropicaux.
Plus récemment, les Amis de la Terre se sont engagés également dans la bataille pour la reconnaissance de la dette écologique, réclamant des réparations pour les dommages causés à la biosphère et aux pays du tiers-monde.

2 - Le concept lui-même

2.1. - Une dette liée au mode de vie des pays riches

Avant d’expliquer plus précisément ce qu’est la dette écologique, il est utile de parler de ce qu’on appelle l’empreinte écologique. Selon une définition très officielle, donnée par le ministère français des affaires étrangères à l’occasion du Sommet mondial sur le développement durable, l’empreinte écologique c’est la surface productive de sols et d’océans et de mers nécessaire pour, à la fois, fournir les ressources consommées par une population donnée et assimiler les rejets et déchets de ladite population. Et bien, selon l’écologiste Wolfang Sachs, si toute l’humanité produisait, consommait et polluait comme le font les pays développés, il faudrait l’équivalent en ressources de quatre planètes supplémentaires. L’empreinte écologique moyenne d’un habitant des pays riches a été multipliée par 5 entre 1900 et 2000. Or le gateau Terre ne grossit pas, et 20 % de la population mondiale continuent de consommer 80 % des ressources. Alors que faire sinon réclamer l’équité et une répartition plus appropriée des richesses ? Selon Sachs, la barrière n’est pas Nord/Sud mais entre la société transnationale et la majorité sociale marginalisée (les 85 millions d’Allemands moins une faible proportion font partie de la société transnationale et 85 millions d’Indiens [sur plus d’un milliard] également).

2.2 - Les 4 principales formes de la dette écologique

- La dette du carbone ou autrement dit les changements climatiques dus très majoritairement aux émissions de gaz à effet de serre dans les pays industrialisés ou émergents. L’augmentation de la température sur la Terre entraîne une élévation des niveaux marins et les pays les plus touchés sont les pays pauvres. Ex le Bangladesh qui risque de perdre un quart de ses terres cultivées dans les deltas du Brahmapoutre et du Gange, par l’élévation du niveau de l’eau dans la baie du Bengale. Qui prendra en charge les catastrophes humaines qui en résulteront ?

Des voix s’élèvent pour dire que le changement climatique constitue aujourd’hui une menace bien plus grande que le terrorisme.

Autre évolution concernant notre planète Terre, des scientifiques viennent de constater que le rayonnement solaire qui atteint la surface de la Terre a diminué de 10 % en 50 ans, soit 2 à 3 % par décennie. Dans certaines régions comme l’Asie, les Etats-Unis et l’Europe, cette chute est encore plus marquée (source : The New York Times, cité par Courrier international du 1er au 7 juillet 2004). Ce dérèglement n’est pas encore clairement compris par les scientifiques mais la pollution en semble la principale explication.

- La biopiraterie : C’est l’appropriation intellectuelle des connaissances ancestrales liées aux semences et l’utilisation de plantes médicinales et autres par des laboratoires des pays industrialisés et par l’agro-industrie moderne. 80 % des ressources biologiques terrestres se trouvent en zone intertropicale et sont abondamment pillées par les pays du Nord. Ceux-ci n’offrent que de maigres compensations monétaires au regard des bénéfices qu’ils tirent de l’exploitation de ces ressources.

Exemple : l’arbre Neem en Inde (le margousier en français), un des sept arbres sacrés des hymnes Vedas. Il est vénéré depuis des temps immémoriaux (l’abattre est une offense). On dit qu’il purifie l’air, ses rameaux servent de brosse à dent, ses fruits procurent une huile et des tourteaux aux propriétés fertilisantes. Selon Bruno Dorin et Frédéric Landy, auteurs de l’ouvrage Agriculture et alimentation de l’Inde (Inra éditions), parmi la soixantaine de composants intéressants du neem, composants que la pharmacopée indienne utilise par ailleurs abondamment depuis des temps plus ou moins anciens, l’un se révèle être un puissant insecticide, l’azadirachtin A (200 insectes y sont sensibles). Ce composant, l’Inde l’a isolé dès les années 1960 pour le valoriser ensuite sous diverses formes sans pour autant déposer de brevets. Mais une firme américaine dépose un brevet en 1993 pour un dentifrice à base de racines et de bois de neem. L’année suivante, en 1994, un brevet est concédé conjointement à une multinationale (W.R. Grace) et au Département américain d’agriculture pour l’élaboration d’une formule pesticide à partir de graines du même arbre. Ce n’est qu’après plusieurs années de bataille que Vandana Shiva (RFSTE) est parvenue, avec l’aide de très nombreuses autres ONG, à convaincre l’Office européen des brevets de révoquer, en mai 2000, cette licence américaine. »

- Les passifs environnementaux : C’est la dette acquise au titre de l’extraction de richesses naturelles (comme le pétrole, les minerais, les ressources forestières, marines et génétiques, etc.) en vue d’une exportation sous-rémunérée et qui sape les possibilités de développement des peuples concernés. Ces échanges sont écologiquement inégaux étant donné que les biens sont exportés sans tenir compte des dégâts sociaux et environnementaux qu’engendre leur exploitation, mettant en danger la souveraineté alimentaire et culturelle des communautés locales et nationales. Les exemples d’entreprises créant des dégradations souvent irréversibles de l’environnement dans les pays pauvres sont innombrables.

Exemple : En Equateur, selon des informations d’Accion Ecologica, l’entreprise Texaco a extrait depuis 20 ans plus d’un milliard de barils de pétrole. Au cours de cette période, elle a provoqué la déforestation d’un million d’hectares de forêt tropicale humide, a provoqué des fuites de pétrole brut et des résidus pétroliers polluants qui se sont écoulés dans les rivières amazoniennes, a brûlé de très grandes quantités de gaz et a construit plus de 600 centres d’enfouissement de déchets toxiques.

Autre exemple, en Inde, les procès qui ont suivi la catastrophe de Bophal en 1984 ont attribué après de longs et durs combats juridiques 150 dollars de compensation par mort directement occasionnée. Aux Etats-Unis, l’indemnisation aurait atteint 15 000 dollars !

- L’exportation de déchets dangereux produits dans les pays industrialisés et déposés dans les pays les plus pauvres. Dioxine, appareillages contenant des métaux lourds, amiante, huiles de moteur usagées sont exportés vers les pays en développement qui acceptent de les stocker à bas prix dans n’importe quelles conditions sur leurs territoires. Les entreprises des pays riches y trouvent largement leur compte en profitant des faibles niveaux des législations dans les pays pauvres.

2.3. Pourquoi réclamer la reconnaissance de la dette écologique ?

Pourquoi réclamer la reconnaissance de la dette écologique, comme le fait la SPEDCA, c’est-à-dire l’Alliance des peuples du Sud créanciers de la dette écologique ? En fait, il s’agit de :

- Diminuer l’impact du néo-libéralisme à travers le monde, permettre aux peuples de défendre leur souveraineté alimentaire et énergétique, leur dignité, l’eau, les semences, la biodiversité, les connaissances ancestrales, etc. L’application des accords de libre-échange provoque une augmentation de la dette écologique due par les pays du Nord aux pays du Sud car le libre-échange implique une exploitation maximale des ressources naturelles par les multinationales, principalement le pétrole, les minéraux, l’eau, la biodiversité. Cela passe par la construction de méga-projets en particulier dans les secteurs des transports, de l’énergie et des télécommunications.

- Arrêter le flux inégal d’énergie, de ressources naturelles et financières allant du Sud vers le Nord.

- Mettre en évidence l’illégitimité de la dette extérieure, nettement moins importante que la dette écologique. La SPEDCA est favorable à un moratoire Moratoire Situation dans laquelle une dette est gelée par le créancier, qui renonce à en exiger le paiement dans les délais convenus. Cependant, généralement durant la période de moratoire, les intérêts continuent de courir.

Un moratoire peut également être décidé par le débiteur, comme ce fut le cas de la Russie en 1998, de l’Argentine entre 2001 et 2005, de l’Équateur en 2008-2009. Dans certains cas, le pays obtient grâce au moratoire une réduction du stock de sa dette et une baisse des intérêts à payer.
sur le remboursement de la dette extérieure, soutenant ainsi Jubilé Sud qui demande l’annulation de la dette financière extérieure des pays du Sud.

- Faire réaliser par des équipes d’experts multidisciplinaires des audits de la dette écologique pays par pays.

- Soutenir la demande d’OilWatch de résister à l’extension des activités pétrolières à l’origine des émissions de carbone elles-mêmes responsables du réchauffement climatique.

2.4. - Les conséquences

- La dette écologique est si grande que les pays du Nord ne pourront jamais la rembourser. Mais ce qui est important, ce n’est pas tant le passé que l’avenir, comme l’explique l’universitaire catalan Joan Martinez Alier : l’objectif est de préserver les générations à venir. Il faut obtenir des résultats dans deux directions :

o Il faut prendre en compte les coûts externes dans l’évaluation de toute production, agricole, industrielle et de transport, en se basant sur des critères de soutenabilité, par exemple en diminuant les émissions de carbone.

o D’autre part, il faut essayer de quantifier, d’évaluer la dette écologique. Il faut introduire la notion de culpabilité dans les mentalités des citoyens gaspilleurs voire vandales.

3 - Dette écologique/dette financière - comment les comparer ?

Quand le Fonds monétaire international et la Banque mondiale Banque mondiale
BM
La Banque mondiale regroupe deux organisations, la BIRD (Banque internationale pour la reconstruction et le développement) et l’AID (Association internationale de développement). La Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD) a été créée en juillet 1944 à Bretton Woods (États-Unis), à l’initiative de 45 pays réunis pour la première Conférence monétaire et financière des Nations unies.

En 2022, 189 pays en sont membres.

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exigent le remboursement de la dette financière, ils s’expriment exclusivement en termes monétaires. Alors concernant la dette écologique, il faut utiliser le même langage. Il est urgent d’évaluer, à chaque fois que cela est possible, la dette écologique.

Certains impacts peuvent être considérés comme réversibles, auquel cas l’évaluation monétaire peut être utilisée pour chiffrer les sommes que les responsables devraient débourser pour effacer et neutraliser ces impacts. Cependant, dans la majorité des cas, les conséquences sont hélas irréversibles, comme la perte de vies humaines ou de biodiversité, de sorte que (même si cela pouvait être tenu pour éthique), chiffrer ces impacts semblerait très arbitraire.

Pourtant, cela ne doit pas nous empêcher de quantifier certains aspects de la dette écologique. Le non-sens de l’estimation monétaire de certains éléments de la dette écologique en raison de sa portée et de l’irréversibilité des dommages causés, loin de limiter la capacité de protestation, rend plus évidente encore l’importance des impacts induits.

4 - Que faire en Europe ? La naissance d’ENRED

On a vu qu’en 1999, a été lancée depuis les pays du Sud une campagne internationale afin d’obtenir la reconnaissance de la dette écologique. Aujourd’hui, dans ce même but, est en train de se créer le Réseau européen pour la reconnaissance de la dette écologique (ENRED, qui correspond au nom du réseau en anglais : European Network for the Recognition of the Ecological Debt).

4.1. Ses origines

La proposition initiale émane de l’Observatoire de la dette dans la Mondialisation Mondialisation (voir aussi Globalisation)
(extrait de F. Chesnais, 1997a)
Jusqu’à une date récente, il paraissait possible d’aborder l’analyse de la mondialisation en considérant celle-ci comme une étape nouvelle du processus d’internationalisation du capital, dont le grand groupe industriel transnational a été à la fois l’expression et l’un des agents les plus actifs.
Aujourd’hui, il n’est manifestement plus possible de s’en tenir là. La « mondialisation de l’économie » (Adda, 1996) ou, plus précisément la « mondialisation du capital » (Chesnais, 1994), doit être comprise comme étant plus - ou même tout autre chose - qu’une phase supplémentaire dans le processus d’internationalisation du capital engagé depuis plus d’un siècle. C’est à un mode de fonctionnement spécifique - et à plusieurs égards important, nouveau - du capitalisme mondial que nous avons affaire, dont il faudrait chercher à comprendre les ressorts et l’orientation, de façon à en faire la caractérisation.

Les points d’inflexion par rapport aux évolutions des principales économies, internes ou externes à l’OCDE, exigent d’être abordés comme un tout, en partant de l’hypothèse que vraisemblablement, ils font « système ». Pour ma part, j’estime qu’ils traduisent le fait qu’il y a eu - en se référant à la théorie de l’impérialisme qui fut élaborée au sein de l’aile gauche de la Deuxième Internationale voici bientôt un siècle -, passage dans le cadre du stade impérialiste à une phase différant fortement de celle qui a prédominé entre la fin de Seconde Guerre mondiale et le début des années 80. Je désigne celui-ci pour l’instant (avec l’espoir qu’on m’aidera à en trouver un meilleur au travers de la discussion et au besoin de la polémique) du nom un peu compliqué de « régime d’accumulation mondial à dominante financière ».

La différenciation et la hiérarchisation de l’économie-monde contemporaine de dimension planétaire résultent tant des opérations du capital concentré que des rapports de domination et de dépendance politiques entre États, dont le rôle ne s’est nullement réduit, même si la configuration et les mécanismes de cette domination se sont modifiés. La genèse du régime d’accumulation mondialisé à dominante financière relève autant de la politique que de l’économie. Ce n’est que dans la vulgate néo-libérale que l’État est « extérieur » au « marché ». Le triomphe actuel du « marché » n’aurait pu se faire sans les interventions politiques répétées des instances politiques des États capitalistes les plus puissants (en premier lieu, les membres du G7). Cette liberté que le capital industriel et plus encore le capital financier se valorisant sous la forme argent, ont retrouvée pour se déployer mondialement comme ils n’avaient pu le faire depuis 1914, tient bien sûr aussi de la force qu’il a recouvrée grâce à la longue période d’accumulation ininterrompue des « trente glorieuses » (l’une sinon la plus longue de toute l’histoire du capitalisme). Mais le capital n’aurait pas pu parvenir à ses fins sans le succès de la « révolution conservatrice » de la fin de la décennie 1970.
(Espagne) et du CADTM-France (Comité pour l’Annulation de la Dette du Tiers-monde). Elle bénéficie du soutien de l’Alliance des Peuples du Sud créditeurs de la Dette écologique (SPEDCA) dans le cadre de la campagne mondiale lancée pour obtenir la reconnaissance de la dette écologique.

4.2. A quoi doit servir l’ENRED ?

Ce réseau a pour vocation de susciter et de coordonner les efforts pour obtenir la reconnaissance de la dette écologique que nous, pays européens, avons contractée envers les pays appauvris. De même, il vise à contribuer à la réduction, voire à l’élimination de la dette écologique à l’avenir. Pour ce faire, les campagnes menées au niveau européen ou mondial seront proposées, encouragées et activement soutenues.

Le Réseau est un mouvement social, un courant de collectifs et de citoyens qui vise à développer la participation active des personnes.

C’est un réseau démocratique, pluriel, ouvert, indépendant de tout parti et de toute confession.

Le Réseau ne réclame pas seulement la reconnaissance de la dette écologique passée ou actuelle. Il a aussi pour vocation de contribuer à réduire l’accumulation de cette dette dans le futur. Il s’agit d’une part de contribuer à la sensibilisation de la population européenne, dont les modes de vie sont les principaux responsables de la dette écologique ; d’autre part, le Réseau veut faire pression sur les décideurs politiques et autres acteurs clés (organismes internationaux, entreprises transnationales...) pour qu’ils mettent en œuvre des politiques destinées à réduire progressivement cette dette.

• Naissance de l’ENRED lors du Forum social européen de Paris (novembre 2003) : C’est à cette occasion qu’a eu lieu la première rencontre sur le projet ENRED, suivie d’une réunion en janvier 2004 à Mumbai. Etaient présents à ces réunions des représentants d’Espagne, d’Italie, d’Irlande, de Grande-Bretagne, de Suisse, de Suède, d’Autriche, de Belgique et de France. D’autres organisations en Allemagne, aux Pays-Bas, et dans d’autres pays sont susceptibles d’adhérer au réseau.

• En Italie : Séminaire les 15 et 16 avril 2004 à Bologne sur le thème « Overturning the debt, for an economy of rights » (Annuler la dette pour une économie des droits) dont le thème principal était la dette écologique. Organisé par l’association A Sud (www.asud.net), ce séminaire, qui s’est tenu en présence de nombreux représentants des mouvements sociaux italiens, a permis pour la première fois en Italie de discuter de l’importance de la reconnaissance de la dette écologique que le Nord a envers le Sud.

• En Belgique : Un séminaire a été organisé à Bruxelles le 18 mai 2004 par l’association VODO : « The concept of Ecological Debt : its meaning and applicability in International Policy »

Questions autour de l’ENRED

Voulons-nous simplement une juxtaposition des campagnes nationales ou une campagne européenne coordonnée ? La lutte pour la reconnaissance de la dette écologique ouvre de nombreuses questions et champs d’investigation qui rejoignent et fédèrent de nombreux thèmes de lutte contre l’injustice, la pauvreté, la dette financière, la destruction de l’environnement. Nous ne constituerons une force utile et efficace que si nous savons nous organiser et lutter ensemble.

Au niveau européen, l’organisation d’une campagne est nécessaire. L’Europe se construit aussi au niveau des mouvements sociaux. Le niveau européen ne gêne pas les campagnes nationales qui peuvent s’organiser. Chaque pays peut organiser sa campagne comme il l’entend mais une campagne européenne entraînera forcément un enrichissement de nos objectifs et de nos pratiques. La question sera débattue à l’occasion du 3e Forum social européen qui se tiendra à l’automne à Londres.

POUR EN SAVOIR PLUS

• Site d’information sur la dette écologique :www.deudaecologica.org

• Liste de diffusion du réseau ENRED : enred chez enredeurope.org

• Site de l’ENRED : http://www.debtwatch.org/enred On y trouve des informations en anglais, en espagnol et en français.


Texte rédigé pour l’Université d’été du CRID , Angers, 10 juillet 2004.

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