Séminaire international, décembre 2001

La dette et les institutions financières internationales face au droit international

10 décembre 2001 par Alain Saumon




Les travaux ont commencé à 9h30 et se sont terminés à 18h00 avec une interruption d’environ une heure trente de 13h15 à 14h45.

Introduction

Eric Toussaint a introduit les travaux en demandant de lier la dette Dette Dette multilatérale : Dette qui est due à la Banque mondiale, au FMI, aux banques de développement régionales comme la Banque africaine de développement, et à d’autres institutions multilatérales comme le Fonds européen de développement.
Dette privée : Emprunts contractés par des emprunteurs privés quel que soit le prêteur.
Dette publique : Ensemble des emprunts contractés par des emprunteurs publics.
au non-respect des droits humains : « les droits humains ne seront pas appliqués si le système de la dette continue ; il faut donc étudier les droits humains fondamentaux, économiques, sociaux et culturels, savoir quels sont les traités et comment ils sont applicables » a-t-il déclaré en ajoutant que plus vite nous pourrons utiliser ces outils, plus vite nous pourrons traduire en justice le FMI FMI
Fonds monétaire international
Le FMI a été créé en 1944 à Bretton Woods (avec la Banque mondiale, son institution jumelle). Son but était de stabiliser le système financier international en réglementant la circulation des capitaux.

À ce jour, 190 pays en sont membres (les mêmes qu’à la Banque mondiale).

Cliquez pour plus de détails.
, la Banque Mondiale Banque mondiale
BM
La Banque mondiale regroupe deux organisations, la BIRD (Banque internationale pour la reconstruction et le développement) et l’AID (Association internationale de développement). La Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD) a été créée en juillet 1944 à Bretton Woods (États-Unis), à l’initiative de 45 pays réunis pour la première Conférence monétaire et financière des Nations unies.

En 2022, 189 pays en sont membres.

Cliquez pour plus de détails.
, les grandes banques, etc.

Affronter ces questions demandera une grande capacité et une grande expertise ainsi que des moyens financiers car les institutions se paieront les meilleurs avocats.

Coïncidence et symbole : le 10 décembre est la date anniversaire de la Déclaration des droits humains en 1948.

Synthèse en trois chapitres :

1. Les sources du droit et la mise en œuvre des droits économiques, sociaux et culturels : intervenante Marie-Anne SWARTENBROEKX (Belgique), Magistrate, membre du Bureau Ecosoc et substitut déléguée du parquet de Bruxelles ;

2. Les mécanismes juridiques de non paiement, moratoire Moratoire Situation dans laquelle une dette est gelée par le créancier, qui renonce à en exiger le paiement dans les délais convenus. Cependant, généralement durant la période de moratoire, les intérêts continuent de courir.

Un moratoire peut également être décidé par le débiteur, comme ce fut le cas de la Russie en 1998, de l’Argentine entre 2001 et 2005, de l’Équateur en 2008-2009. Dans certains cas, le pays obtient grâce au moratoire une réduction du stock de sa dette et une baisse des intérêts à payer.
ou suspension de paiement : la force majeure, l’état de nécessité et la nullité. Les arguments juridiques pour l’abolition de la dette, la souveraineté des Etat et les responsabilités diverses. Selon, principalement, les interventions de : Hugo Ruiz DIAZ (Paraguay), Doctorant en droit international public à l’Université Catholique de Louvain ; Alejandro TEITELBAUM (Argentine), avocat, représentant de l’Association Américaine des Juristes auprès des Nations Unies à Genève ; Fabio MARCELLI (Italie), Juriste.

3. Le besoin d’innovation juridique selon Jean de Maillard (France), Magistrat.

1. Les sources du droit et la mise en œuvre des droits économiques, sociaux et culturels

Lorsqu’on parle de droits économiques, sociaux et culturels en droit international, il s’agit de droit de la personne et non de droit collectif. On peut cependant considérer que le droit de l’environnement et le droit de la biodiversité qui sont des conventions spécifiques constituent des enjeux économiques et sociaux fondamentaux qui mériteraient sans doute d’être examinés de plus près afin de construire des passerelles entre droit de la personne et droit collectif : le droit d’association et le droit de grève sont par exemple des droits individuels et collectifs en même temps ; une jurisprudence européenne existe également en ce qui concerne la dignité de la personne.

Les sources du droit sont (citation in extenso de Marie-Anne SWARTENBROEKX) :

les instruments internationaux à caractère universel :

- Déclaration universelle des droits de l’Homme (art. 22, 23 à 27) ;

- Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels dit « pacte de 1966 » :

- droit au travail (art. 6) ;

- droit de jouir de conditions de travail justes et favorables (art. 7) ;

- droit de liberté syndicale et droit de grève (art. 8) ;

- droit à la sécurité sociale (art. 9) ;

- droit à une protection familiale ((art. 10) ;

- droit à un niveau de vie suffisant, qui comprend le droit à un logement suffisant et celui d’être à l’abri de la faim (art. 11) ;

- droit à la santé (art. 12) ;

- droit à l’éducation (art. 13 et 14) ;

- droit de participer à la vie culturelle et bénéficier du progrès scientifique (art. 15) ;

- Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes du 18 décembre 1979 ;

- Convention relative aux droits de l’enfant du 20 novembre 1989 ;

- Convention relative à l’élimination de toute forme de discrimination raciale du 21 décembre 1965 ;

- Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;

- Tous instruments adoptés dans le cadre de l’O.I.T. ;

+ Résolutions de l’A.G. des Nations Unies (notamment Déclaration sur les progrès et le développement dans le domaine social, 1969 ; Déclaration sur le droit au développement, 1986 ;

+ Rôle des institutions spécialisées de l’O.N.U : O.M.S., F.A.O., P.N.U.D., U.N.E.S.C.O. ;

- (…) ;

Les instruments régionaux :

- Charte européenne du 18 octobre 1981, entrée en vigueur le 26 février 1965, révisée le 3 mai 1996 et complétée par plusieurs protocoles additionnels (Conseil de l’Europe) ;

+ Protocole additionnel mettant en place un système de plaintes collectives, entrée en vigueur depuis le 1er juillet 1998 (Conseil de l’Europe) ;

- Convention américaine des droits de l’homme du 22 novembre 1969 + Protocole additionnel relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (« Protocole de San Salvador » du 17 novembre 1988 calqué sur le Pacte de 1966 et non rentré en vigueur) ;

- Charte africaine des droits de l’homme et des peuples du 17 juin 1981 (art. 15, 16 et 17 : droit au travail, droit de profiter du meilleur état de santé physique et mental possible, droit à l’éducation).

La place des droits économiques, sociaux et culturels dans le droit international relatif aux droits humains pose des problèmes d’interprétation :

Si en théorie il y a indivisibilité et interdépendance entre les droits civils et politiques et les droits économiques, sociaux et culturels, en pratique, dans les systèmes onusien et européen, les 2 conventions sont distinctes. La protection de certains droits économiques et sociaux peut cependant être obtenue à travers des traités relatifs aux droits civils et politiques, notamment dans le cadre de la convention européenne des droits humains.

L’article 2 §1 du Pacte de 1966 crée une obligation Obligations
Obligation
Part d’un emprunt émis par une société ou une collectivité publique. Le détenteur de l’obligation, l’obligataire, a droit à un intérêt et au remboursement du montant souscrit. L’obligation est souvent l’objet de négociations sur le marché secondaire.
générale minimum incontournable : « chacun des Etats s’engage à agir, tant par son effort propre que par l’assistance et la coopération internationales, notamment sur les plans économiques et techniques, au maximum de ses ressources disponibles en vue d’assurer progressivement le plein exercice des droit reconnus dans le pacte par tous les moyens appropriés y compris en particulier l’adoption de mesures législatives ».

Si cet article a un caractère progressif et programmatique, l’obligation est de moyens plutôt que de résultat. Il est difficile de demander aux Etats pauvres tel l’Ethiopie d’avoir suffisamment de moyens pour payer sa dette et mettre sa population hors de danger.

La supervision du Pacte de 1966 est réalisée par le Conseil Economique et Social et non par un organe ad hoc. Elle a évolué par la création d’un comité des droits économiques, sociaux et culturels, organe indépendant chargé de l’examen des rapports présentés par les Etat parties. Un protocole facultatif au pacte permet l’introduction auprès du comité de plaintes par des individus ou des groupes. Il n’y a cependant pas d’action Action
Actions
Valeur mobilière émise par une société par actions. Ce titre représente une fraction du capital social. Il donne au titulaire (l’actionnaire) le droit notamment de recevoir une part des bénéfices distribués (le dividende) et de participer aux assemblées générales.
possible par des individus au plan international.

Les IFI, en tant qu’institutions spécialisées reliées à l’ONU sont soumises au droit international coutumier et sont supposées adhérer aux principes de droit de la personne et n’ont pas de disposition d’immunité. Des actions d’Etats ou d’individus ne sont pas exclues en particulier en direction de la BIRD, notamment par la mise en cause internationale des pratiques de « bonne gouvernance » dans la mise en place des PAS ou encore de manque de vigilance quand des prêts destinés à des opérations de développement sont détournés comme par exemple au Rwanda pour acheter des armes (machettes…) en 1994.

Il y aurait une contre doctrine en construction qui étendrait l’application du droit international aux personnes physiques et morales (multinationales, banques, etc) à condition que le développement du droit international s’oriente vers la responsabilité civile. Certains prétendent cependant qu’au contraire nous serions dans une période de recul à cause du laisser faire dû au processus de la mondialisation Mondialisation (voir aussi Globalisation)
(extrait de F. Chesnais, 1997a)
Jusqu’à une date récente, il paraissait possible d’aborder l’analyse de la mondialisation en considérant celle-ci comme une étape nouvelle du processus d’internationalisation du capital, dont le grand groupe industriel transnational a été à la fois l’expression et l’un des agents les plus actifs.
Aujourd’hui, il n’est manifestement plus possible de s’en tenir là. La « mondialisation de l’économie » (Adda, 1996) ou, plus précisément la « mondialisation du capital » (Chesnais, 1994), doit être comprise comme étant plus - ou même tout autre chose - qu’une phase supplémentaire dans le processus d’internationalisation du capital engagé depuis plus d’un siècle. C’est à un mode de fonctionnement spécifique - et à plusieurs égards important, nouveau - du capitalisme mondial que nous avons affaire, dont il faudrait chercher à comprendre les ressorts et l’orientation, de façon à en faire la caractérisation.

Les points d’inflexion par rapport aux évolutions des principales économies, internes ou externes à l’OCDE, exigent d’être abordés comme un tout, en partant de l’hypothèse que vraisemblablement, ils font « système ». Pour ma part, j’estime qu’ils traduisent le fait qu’il y a eu - en se référant à la théorie de l’impérialisme qui fut élaborée au sein de l’aile gauche de la Deuxième Internationale voici bientôt un siècle -, passage dans le cadre du stade impérialiste à une phase différant fortement de celle qui a prédominé entre la fin de Seconde Guerre mondiale et le début des années 80. Je désigne celui-ci pour l’instant (avec l’espoir qu’on m’aidera à en trouver un meilleur au travers de la discussion et au besoin de la polémique) du nom un peu compliqué de « régime d’accumulation mondial à dominante financière ».

La différenciation et la hiérarchisation de l’économie-monde contemporaine de dimension planétaire résultent tant des opérations du capital concentré que des rapports de domination et de dépendance politiques entre États, dont le rôle ne s’est nullement réduit, même si la configuration et les mécanismes de cette domination se sont modifiés. La genèse du régime d’accumulation mondialisé à dominante financière relève autant de la politique que de l’économie. Ce n’est que dans la vulgate néo-libérale que l’État est « extérieur » au « marché ». Le triomphe actuel du « marché » n’aurait pu se faire sans les interventions politiques répétées des instances politiques des États capitalistes les plus puissants (en premier lieu, les membres du G7). Cette liberté que le capital industriel et plus encore le capital financier se valorisant sous la forme argent, ont retrouvée pour se déployer mondialement comme ils n’avaient pu le faire depuis 1914, tient bien sûr aussi de la force qu’il a recouvrée grâce à la longue période d’accumulation ininterrompue des « trente glorieuses » (l’une sinon la plus longue de toute l’histoire du capitalisme). Mais le capital n’aurait pas pu parvenir à ses fins sans le succès de la « révolution conservatrice » de la fin de la décennie 1970.
néo-libérale qui conserverait l’avantage dans le rapport de force même si les mouvements citoyens s’amplifient.

2. Les mécanismes juridiques de non paiement, moratoire ou suspension de paiement : la force majeure, l’état de nécessité et la nullité. Les arguments juridiques pour l’abolition de la dette, la souveraineté des Etats et les responsabilités diverses.

Il n’existe pas en droit international un corps juridique unique, codifié, concernant la dette publique des Etats, en général, et la dette extérieure, en particulier. Le travail repose donc entièrement sur la base de cas reconnus dans la pratique des Etats et de la jurisprudence nationale et internationale.

Les limites ne sont pas claires entre la force majeure et l’état de nécessité. Les 2 justifient en droit international une action unilatérale de non paiement de la dette externe ou d’un paiement strictement limité à la capacité et aux ressources de l’Etat. La force majeure libère l’Etat de ses responsabilités selon le principe « à l’impossible nul n’est tenu ». L’état de nécessité s’applique plus à une situation où l’Etat mettrait en danger la survie politique et économique du pays. La survie économique c’est l’impossibilité d’assurer au peuple la santé, l’éducation… : le refus de paiement est justifié par l’incapacité de résoudre les problèmes essentiels. On rejoint ici les cas de figure des droits économiques, sociaux et culturels et droits civils et politiques.

Ces 2 règles peuvent être invoquées actuellement par de nombreux pays en développement pour arrêter de remplir leurs obligations financières internationales, ou d’imposer aux créanciers l’acceptation de délais de paiement ou encore de se contenter d’une satisfaction proportionnelle aux ressources du débiteur. On note cependant que l’invocation de ces 2 règles vaut reconnaissance de l’existence de la dette, de sa légitimité, ce qui a des conséquences politiques et économiques. En fait « le pouvoir politique est placé sous la domination des forces qui créent le droit et le droit est obtenu par la lutte de ces forces ». La force des mouvements citoyens peut être déterminante.

La nullité s’attache à des dettes contractées par des gouvernements usurpateurs ou des dictatures dont la représentativité est mise en question ou dont les actes ne sont pas considérés comme juridiquement valables en droit international. Dans le cas de crimes contre l’humanité, la difficulté réside dans l’analyse du degré de responsabilité des individus, même si leur participation directe aux crimes n’est pas avérée mais pourvu qu’ils sachent la nature du régime et les crimes commis. Dans les cas de gouvernements succédant à des gouvernements usurpateurs ou à des dictatures, le problème de l’immunité relative du nouveau gouvernement se pose : si le nouveau gouvernement légitime et démocratique accepte de payer la dette du gouvernement précédant on propose de se référer au côté technique et doctrinal. Mais la doctrine est divisée entre la reconnaissance que les décisions des gouvernements sont de facto des actes d’Etat ou que les actes d’un gouvernement intermédiaire sont seulement valable dans les cas où ces actes sont conformes à la constitution du pays. La nullité peut aussi être invoquée s’il y a suspicion de fraude.

Dans les cas de force majeure, d’état de nécessité et de nullité, le manque de vigilance des IFI ou d’autres créditeurs pourrait également être invoqué en droit international.

Les arguments juridiques pour déclarer l’abolition d’une dette peuvent se référer à l’origine illicite de la dette quand, dans le contrat, le pays débiteur a accepté des clauses contre sa volonté. Ils trouvent leurs sources également dans l’abus de commissions, dans l’enrichissement personnel ou lorsque la dette est tellement énorme que l’Etat ne peut plus la payer.

La souveraineté de l’Etat face aux créditeurs (doctrine de 1902) ne peut pas être mise en défaut : un Etat ne peut pas faire faillite. L’Etat peut dire qu’il honorera sa dette quand il le pourra, à son rythme. Les Etats qui ne payent pas leurs dettes ne sont pas rares : après la première guerre mondiale l’Allemagne vaincue n’a pas payé sa dette ; après la deuxième guerre mondiale ce même pays a vu sa dette renégociée à la conférence de Londres de 1953 et le pays a même bénéficié de fonds du plan Marshall Plan Marshall Ce plan a été conçu par l’administration du président démocrate Harry Truman, sous le nom de European Recovery Program. Il sera ensuite connu sous le nom du secrétaire d’État de l’époque, Georges Marshall (qui a été chef d’état-major général entre 1939 et 1945), chargé d’en assurer la mise sur pied. Entre avril 1948 et décembre 1951, les États-Unis accordent, principalement sous forme de dons, à quinze pays européens et à la Turquie une aide de 12,5 milliards de dollars (ce qui représente une somme plus de dix fois supérieure en 2020). Le Plan Marshall visait à favoriser la reconstruction de l’Europe dévastée au cours de la Seconde Guerre mondiale. .

La responsabilité des créditeurs, IFI, Etat créditeur, Banque,… peut être engagée. Les IFI ont une obligation de vigilance et le devoir de promouvoir la réalisation de conditions favorables socialement et culturellement (dans la charte de l’ONU). La Cour Internationale de Justice stipule que ces conditions doivent dériver des finalités explicites et implicites contenues dans ses articles pour « faciliter une croissance équilibrée de façon à promouvoir un haut niveau de développement social et économique ». l’Etat est aussi responsable de ce qui se passe dans le pays : il a une responsabilité subsidiaire même lorsqu’une banque a des disfonctionnements.

Les pays débiteurs sont également responsables.

3. Philosophie et innovation juridique par Jean de Maillard

Les acteurs intérieurs sont dépassés : la problématique actuelle est la mise en concurrence des Etats et des peuples dans le commerce mondial avec des échanges légaux et illégaux. La criminalité est devenue une forme de formation de la plus value à part entière : le droit n’est plus qu’un élément qui permet de prendre le contrôle mais il participe aussi à la valorisation des inégalités.

Il y a 20 ans les nations avaient comme objectif de créer des espaces territoriaux homogènes sur les plans économiques, sociaux et financiers : la norme édictait les règles et l’encadrement. Actuellement le rapport de force est inversé : les échanges sont à un niveau supérieur à celui où s’élabore la norme, les règles sont internes au fonctionnement de l’économie et toutes les autres règles sont inférieures.
Cela entraîne des distorsions qui favorisent la pénétration des règles criminelles : distorsions où l’OMC OMC
Organisation mondiale du commerce
Créée le 1er janvier 1995 en remplacement du GATT. Son rôle est d’assurer qu’aucun de ses membres ne se livre à un quelconque protectionnisme, afin d’accélérer la libéralisation mondiale des échanges commerciaux et favoriser les stratégies des multinationales. Elle est dotée d’un tribunal international (l’Organe de règlement des différends) jugeant les éventuelles violations de son texte fondateur de Marrakech.

L’OMC fonctionne selon le mode « un pays – une voix » mais les délégués des pays du Sud ne font pas le poids face aux tonnes de documents à étudier, à l’armée de fonctionnaires, avocats, etc. des pays du Nord. Les décisions se prennent entre puissants dans les « green rooms ».

Site : www.wto.org
est au niveau privilégié et où les autres règles sont toujours étatiques. Les Etat ne sont plus capables que d’édicter des normes répressives, ils ne dictent plus les normes de comportement.
L’objectif est donc la résorption des distorsions.

L’apparition d’entités non étatiques plus puissantes que les Etats (multinationales, mafias, groupes terroristes) ont mis les critères traditionnels du droit international en porte à faux. Le maintien des souverainetés étatiques fonctionne dans un système sans norme. Le problème actuel est d’essayer de faire revivre un droit international créé pour faire face aux Etats souverains et ne prenant plus en compte les entités nationales ; exemple : une nouvelle approche capable d’unir le local au global, le public au privé.

Comment redéfinir ce droit pour des implications public/privé, licite/illicite ?

Les droits humains sont des droits mous, il faut réfléchir à des concepts englobants comme celui de « pratique internationale dommageable ». Ces concepts s’établissent autour du noyau qui les fonde : la dette odieuse Dette odieuse Selon la doctrine, pour qu’une dette soit odieuse, et donc nulle, elle doit remplir deux conditions :
1) Elle doit avoir été contractée contre les intérêts de la Nation, ou contre les intérêts du Peuple, ou contre les intérêts de l’État.
2) Les créanciers ne peuvent pas démontrer qu’ils ne pouvaient pas savoir que la dette avait été contractée contre les intérêts de la Nation.

Il faut souligner que selon la doctrine de la dette odieuse, la nature du régime ou du gouvernement qui la contracte n’est pas particulièrement importante, puisque ce qui compte, c’est l’utilisation qui est faite de cette dette. Si un gouvernement démocratique s’endette contre l’intérêt de la population, cette dette peut être qualifiée d’odieuse, si elle remplit également la deuxième condition. Par conséquent, contrairement à une version erronée de cette doctrine, la dette odieuse ne concerne pas seulement les régimes dictatoriaux.
(voir : Eric Toussaint, « La Dette odieuse selon Alexander Sack et selon le CADTM » ).

Le père de la doctrine de la dette odieuse, Alexander Nahum Sack, dit clairement que les dettes odieuses peuvent être attribuées à un gouvernement régulier. Sack considère qu’une dette régulièrement contractée par un gouvernement régulier peut être considérée comme incontestablement odieuse... si les deux critères ci-dessus sont remplis.

Il ajoute : « Ces deux points établis, c’est aux créanciers que reviendrait la charge de prouver que les fonds produits par lesdits emprunts avaient été en fait utilisés non pour des besoins odieux, nuisibles à la population de tout ou partie de l’État, mais pour des besoins généraux ou spéciaux de cet État, qui n’offrent pas un caractère odieux ».

Sack a défini un gouvernement régulier comme suit :
« On doit considérer comme gouvernement régulier le pouvoir suprême qui existe effectivement dans les limites d’un territoire déterminé. Que ce pouvoir soit monarchique (absolu ou limité) ou républicain ; qu’il procède de la « grâce de Dieu » ou de la « volonté du peuple » ; qu’il exprime la « volonté du peuple » ou non, du peuple entier ou seulement d’une partie de celui-ci ; qu’il ait été établi légalement ou non, etc., tout cela n’a pas d’importance pour le problème qui nous occupe. »

Donc, il n’y a pas de doute à avoir sur la position de Sack, tous les gouvernements réguliers, qu’ils soient despotiques ou démocratiques, sous différentes variantes, sont susceptibles de contracter des dettes odieuses.
est dommageable par rapport à la loyauté des échanges internationaux par exemple.

Nous devons sortir des cadres construits à partir du XVIe siècle.

Les « pratiques internationales dommageables » permettraient de développer certains droits comme le droit d’ingérence : ingérence humanitaire, ingérence financière, etc : ce serait tenter de définir ce que sont les intérêts de la communauté internationale et non pas se limiter au droit des Etats. L’exemple du protocole de Kyoto l’illustre bien : les Etats l’abandonnent petit à petit alors que c’est un bien commun que l’on défend, ce qui montre que l’intérêt des Etats est différent du bien public international.

Les Etats ont encore des choses à dire mais les rapports de force ne leur sont pas favorables, ils ne sont plus que des chambres d’enregistrement des lobbies Lobby
Lobbies
Un lobby est une structure organisée pour représenter et défendre les intérêts d’un groupe donné en exerçant des pressions ou influences sur des personnes ou institutions détentrices de pouvoir. Le lobbying consiste ainsi en des interventions destinées à influencer directement ou indirectement l’élaboration, l’application ou l’interprétation de mesures législatives, normes, règlements et plus généralement, toute intervention ou décision des pouvoirs publics. Ainsi, le rôle d’un lobby est d’infléchir une norme, d’en créer une nouvelle ou de supprimer des dispositions existantes.
 : il faut prendre le système au pied de la lettre et le retourner contre lui-même.


Séminaire organisé par le Comité pour l’Annulation de la Dette du Tiers Monde (CADTM) les 10 et 11 décembre 2001.

Synthèse du premier jour, lundi 10 décembre 2001.

Autres articles en français de Alain Saumon (10)