Communiqué de Presse
29 janvier 2013 par CADTM Afrique
Comme le dénonce un appel lancé par des femmes maliennes, la situation dramatique du Mali doit ouvrir les yeux sur une réalité terrible qui se vérifie dans d’autres pays en conflit : les violences faites aux femmes sont instrumentalisées pour justifier l’ingérence et les guerres de convoitise des richesses de leurs pays.
Nous condamnons sans réserve les violations des droits humains par les groupes armés qui contrôlent la partie Nord du Mali. Nous sommes aux côtés des femmes et de toutes les victimes d’abus. Nous dénonçons également l’intervention militaire que mène la France depuis le 10 janvier 2013. L’État Français mène une guerre au Nord du Mali, non pas pour défendre la démocratie et garantir le respect des droits humains comme on le prétend, mais bel et bien pour défendre ses propres intérêts coloniaux et ceux des multinationales françaises présentes en Afrique afin d’exploiter les ressources naturelles (uranium, or, diamants, pétrole, terre, eau…). La France, comme les États-Unis dans d’autres parties du monde, veut montrer sa capacité militaire à prendre la défense des intérêts stratégiques des grandes puissances occidentales et de leurs grandes entreprises.
Les bombardements français sur les régions très appauvries du Mali reflètent avant tout la détermination de l’impérialisme français à maintenir une domination néocoloniale sur les richesses des peuples de l’Afrique dans un contexte de crise mondiale du capitalisme. Il utilise les armes de pointe pour dissuader les convoitises de la Chine et les autres puissances. Par ailleurs, l’intervention occidentale a aussi comme but d’empêcher l’autoorganisation des Maliens afin d’éviter le réveil de leurs aspirations démocratiques, anti impérialistes et panafricanistes. La France et ses alliés veulent éviter la remise en cause des régimes relais de la Françafrique.
Le Mali est l’un des pays les plus appauvris et exploités du monde malgré ses importantes ressources naturelles minières et agricoles. Elles sont accaparées par les multinationales. Le peuple malien est terriblement affecté par les politiques néolibérales imposées par la Banque mondiale
Banque mondiale
BM
La Banque mondiale regroupe deux organisations, la BIRD (Banque internationale pour la reconstruction et le développement) et l’AID (Association internationale de développement). La Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD) a été créée en juillet 1944 à Bretton Woods (États-Unis), à l’initiative de 45 pays réunis pour la première Conférence monétaire et financière des Nations unies.
En 2022, 189 pays en sont membres.
Cliquez pour plus de détails.
, le Fonds monétaire international
FMI
Fonds monétaire international
Le FMI a été créé en 1944 à Bretton Woods (avec la Banque mondiale, son institution jumelle). Son but était de stabiliser le système financier international en réglementant la circulation des capitaux.
À ce jour, 190 pays en sont membres (les mêmes qu’à la Banque mondiale).
Cliquez pour plus de détails.
, l’OMC
OMC
Organisation mondiale du commerce
Créée le 1er janvier 1995 en remplacement du GATT. Son rôle est d’assurer qu’aucun de ses membres ne se livre à un quelconque protectionnisme, afin d’accélérer la libéralisation mondiale des échanges commerciaux et favoriser les stratégies des multinationales. Elle est dotée d’un tribunal international (l’Organe de règlement des différends) jugeant les éventuelles violations de son texte fondateur de Marrakech.
L’OMC fonctionne selon le mode « un pays – une voix » mais les délégués des pays du Sud ne font pas le poids face aux tonnes de documents à étudier, à l’armée de fonctionnaires, avocats, etc. des pays du Nord. Les décisions se prennent entre puissants dans les « green rooms ».
Site : www.wto.org
, l’Union européenne et l’État français. Ces politiques n’ont été possibles qu’avec la complicité des régimes en place. Ces politiques ont empêché le Mali de se libérer du poids d’une dette
Dette
Dette multilatérale : Dette qui est due à la Banque mondiale, au FMI, aux banques de développement régionales comme la Banque africaine de développement, et à d’autres institutions multilatérales comme le Fonds européen de développement.
Dette privée : Emprunts contractés par des emprunteurs privés quel que soit le prêteur.
Dette publique : Ensemble des emprunts contractés par des emprunteurs publics.
extérieure qui sert d’instrument de pompage de ressources et de soumission du pays aux intérêts des institutions et des puissances créancières. L’initiative d’allègement de la dette du Mali, qui fait partie des pays pauvres très endettés
PPTE
Pays pauvres très endettés
L’initiative PPTE, mise en place en 1996 et renforcée en septembre 1999, est destinée à alléger la dette des pays très pauvres et très endettés, avec le modeste objectif de la rendre juste soutenable.
Elle se déroule en plusieurs étapes particulièrement exigeantes et complexes.
Tout d’abord, le pays doit mener pendant trois ans des politiques économiques approuvées par le FMI et la Banque mondiale, sous forme de programmes d’ajustement structurel. Il continue alors à recevoir l’aide classique de tous les bailleurs de fonds concernés. Pendant ce temps, il doit adopter un document de stratégie de réduction de la pauvreté (DSRP), parfois juste sous une forme intérimaire. À la fin de ces trois années, arrive le point de décision : le FMI analyse le caractère soutenable ou non de l’endettement du pays candidat. Si la valeur nette du ratio stock de la dette extérieure / exportations est supérieure à 150 % après application des mécanismes traditionnels d’allégement de la dette, le pays peut être déclaré éligible. Cependant, les pays à niveau d’exportations élevé (ratio exportations/PIB supérieur à 30 %) sont pénalisés par le choix de ce critère, et on privilégie alors leurs recettes budgétaires plutôt que leurs exportations. Donc si leur endettement est manifestement très élevé malgré un bon recouvrement de l’impôt (recettes budgétaires supérieures à 15 % du PIB, afin d’éviter tout laxisme dans ce domaine), l’objectif retenu est un ratio valeur nette du stock de la dette / recettes budgétaires supérieur à 250 %. Si le pays est déclaré admissible, il bénéficie de premiers allégements de son service de la dette et doit poursuivre avec les politiques agréées par le FMI et la Banque mondiale. La durée de cette période varie entre un et trois ans, selon la vitesse de mise en œuvre des réformes clés convenues au point de décision. À l’issue, arrive le point d’achèvement. L’allégement de la dette devient alors acquis pour le pays.
Le coût de cette initiative est estimé par le FMI en 2019 à 76,2 milliards de dollars, soit environ 2,54 % de la dette extérieure publique du Tiers Monde actuelle. Les PPTE sont au nombre de 39 seulement, dont 33 en Afrique subsaharienne, auxquels il convient d’ajouter l’Afghanistan, la Bolivie, le Guyana, Haïti, le Honduras et le Nicaragua. Au 31 mars 2006, 29 pays avaient atteint le point de décision, et seulement 18 étaient parvenus au point d’achèvement. Au 30 juin 2020, 36 pays ont atteint le point d’achèvement. La Somalie a atteint le point de décision en 2020. L’Érythrée et le Soudan n’ont pas encore atteint le point de décision.
Alors qu’elle devait régler définitivement le problème de la dette de ces 39 pays, cette initiative a tourné au fiasco : leur dette extérieure publique est passée de 126 à 133 milliards de dollars, soit une augmentation de 5,5 % entre 1996 et 2003.
Devant ce constat, le sommet du G8 de 2005 a décidé un allégement supplémentaire, appelée IADM (Initiative d’allégement de la dette multilatérale), concernant une partie de la dette multilatérale des pays parvenus au point de décision, c’est-à-dire des pays ayant soumis leur économie aux volontés des créanciers. Les 43,3 milliards de dollars annulés via l’IADM pèsent bien peu au regard de la dette extérieure publique de 209,8 milliards de dollars ces 39 pays au 31 décembre 2018.
(PPTE), a prolongé les effets dévastateurs du système d’endettement car les réductions de dette accordées au compte-gouttes ont été systématiquement conditionnées par l’application de mesure de privatisation et d’ouverture économico-commerciale. Ces mesures ont soumis les paysans/paysannes et les travailleurs/travailleuses des villes a une concurrence internationale à laquelle ils et elles ne pouvaient pas répondre. Les femmes maliennes qui portent un poids énorme dans la vie du pays sont victimes au quotidien de privation de tous ordres. Elles résistent au quotidien.
La dette et son remboursement continuent d’être les instruments d’une paupérisation des populations.
L’État français bombarde des villes, des villages et des infrastructures déjà rares du Mali dont la reconstruction demain sera probablement le prétexte pour endetter encore un peu plus le pays et augmenter sa soumission aux créanciers. Le FMI vient justement d’annoncer l’octroi au Mali d’un prêt de 18,4 millions de dollars. Cela ouvrira un nouveau cycle de malheurs pour le peuple malien s’il ne prend pas son sort en main.
Le gouvernement français devrait normalement réserver les millions d’euros que coûtera son déploiement militaire au Mali pour les besoins sociaux de sa population condamnée elle-même à l’austérité du fait de l’explosion de la dette publique.
La région connaît une propagation des groupes intégristes qui ont été appuyés et armés par les puissances occidentales, États-Unis en tête, directement ou par le biais du Qatar ou de l’Arabie Saoudite. Aujourd’hui les grandes puissances occidentales ne savent plus comment se dépêtrer d’un mouvement qui ne leur est plus utile, leur échappe et s’est retourné contre elles. La manière dont elles sont intervenues en Libye a aggravé la situation de la région entraînant notamment une prolifération des armes. Les interventions occidentales en Afghanistan et en Irak ont démontré que les arguments humanitaires cachent des intérêts économiques, politiques et militaires inavouables. L’intervention et l’occupation militaire occidentale n’apporte pas de solution réelle aux problèmes des droits humains. Elle tend même à les aggraver.
Pour le CADTM Afrique, c’est au peuple malien de régler les conflits internes et chasser tous les groupes qu’il considère anti démocratiques et obscurantistes qui veulent imposer leurs lois par les armes.
Le Réseau CADTM Afrique :
condamne l’intervention impérialiste de la France et de ses alliés au Mali, il appelle à l’arrêt immédiat des bombardements et au retrait des troupes françaises et africaines du Mali ;
exprime sa solidarité avec le peuple malien et son droit de décider librement de son devenir ;
appelle à un renforcement de la solidarité des Peuples maliens et africains pour barrer la route aux forces de la restauration et de ré-colonisation du Mali et du Sahel ;
considère que la CEDEAO, organisation sous régionale dirigée par un club de chefs d’États au service des hégémonies américaine et européenne, n’a aucune légitimité et aucun pouvoir légal pour contracter des prêts de guerre au nom du peuple souverain du Mali ;
invite le Peuple malien à invoquer l’absence de consentement comme fondement juridique d’une répudiation de toute dette héritée de l’intervention étrangère ;
appelle les peuples d’Afrique du nord au sud, du Maghreb au Machrek à s’unir contre les guerres.
Pour le Réseau CADTM Afrique, le groupe de coordination, le 29 janvier 2013
SECRETARIAT RESEAU CADTM AFRIQUE, CAD-Mali Djélibougou Rue : 326 Porte : 26 - BP. 2521 Bamako - Mali - Tél./Fax : 20 24 01 34 / E-mail : secretariatcadtmafrique chez gmail.com
Atelier de renforcement des capacités de la société civile sur les dettes illégitimes, leurs impacts sur les droits humains, et les alternatives possibles
Déclaration de Yaoundé30 mars, par CADTM Afrique
10 février, par CADTM Afrique , Broulaye Bagayoko
10 novembre 2022, par CADTM Afrique
4 novembre 2022, par CADTM Afrique
Communiqué
Le CADTM Afrique exige des réparations, la fin des conditionnalités et l’annulation des dettes illégitimes du continent24 octobre 2022, par CADTM Afrique
10 octobre 2022, par CADD , CADTM Afrique
2 février 2022, par CADTM Afrique
31 octobre 2021, par CADTM Afrique
21 mai 2021, par CADTM France , Survie , CADTM Afrique
26 avril 2021, par Collectif , CADTM Afrique , Martine Boudet