Lettre ouverte au peuple argentin concernant l’expropriation de la transnationale pétrolière Repsol

21 avril 2012 par CADTM AYNA , CADTM Europe




Le CADTM Abya Yala Nuestra America (CADTM AYNA) et le CADTM Europe soutiennent fermement le droit souverain de la nation argentine de déclarer d’utilité publique YPF, la principale entreprise pétrolière opérant sur son sol et à exproprier les actions Action
Actions
Valeur mobilière émise par une société par actions. Ce titre représente une fraction du capital social. Il donne au titulaire (l’actionnaire) le droit notamment de recevoir une part des bénéfices distribués (le dividende) et de participer aux assemblées générales.
appartenant à l’entreprise Repsol qui la contrôle aujourd’hui.

Nous répudions énergiquement la campagne internationale initiée par des patrons sans scrupules, le gouvernement espagnol, des membres éminents de l’Union européenne, les élites conservatrices et les médias qui profèrent des déclarations menaçantes et proposent de dures sanctions contre l’Argentine.

Nous sommes effarés de voir qu’on trompe intentionnellement l’opinion publique mondiale en présentant la défense des intérêts particuliers de Repsol comme une cause publique espagnole et européenne alors qu’il s’agit en réalité d’une entreprise privée multinationale régulièrement dénoncée pour le non respect de ses engagements contractuels, des violations du droit du travail et des normes environnementales. Il faut par ailleurs ajouter que Repsol utilise les paradis fiscaux Paradis fiscaux
Paradis fiscal
Territoire caractérisé par les cinq critères (non cumulatifs) suivants :
(a) l’opacité (via le secret bancaire ou un autre mécanisme comme les trusts) ;
(b) une fiscalité très basse, voire une imposition nulle pour les non-résidents ;
(c) des facilités législatives permettant de créer des sociétés écrans, sans aucune obligation pour les non-résidents d’avoir une activité réelle sur le territoire ;
(d) l’absence de coopération avec les administrations fiscales, douanières et/ou judiciaires des autres pays ;
(e) la faiblesse ou l’absence de régulation financière.

La Suisse, la City de Londres et le Luxembourg accueillent la majorité des capitaux placés dans les paradis fiscaux. Il y a bien sûr également les Iles Caïmans, les Iles anglo-normandes, Hong-Kong, et d’autres lieux exotiques. Les détenteurs de fortunes qui veulent échapper au fisc ou ceux qui veulent blanchir des capitaux qui proviennent d’activités criminelles sont directement aidés par les banques qui font « passer » les capitaux par une succession de paradis fiscaux. Les capitaux généralement sont d’abord placés en Suisse, à la City de Londres ou au Luxembourg, transitent ensuite par d’autres paradis fiscaux encore plus opaques afin de compliquer la tâche des autorités qui voudraient suivre leurs traces et finissent par réapparaître la plupart du temps à Genève, Zurich, Berne, Londres ou Luxembourg, d’où ils peuvent se rendre si nécessaires vers d’autres destinations.
pour éluder l’impôt des pays où il opère alors même que l’Espagne aujourd’hui en crise impose d’énormes sacrifices à ses citoyens.

Nous considérons que cette mesure, en dépit de ses insuffisances et limitations, représente une avancée dans la récupération d’une ressource naturelle stratégique pour chaque pays parallèlement à la promotion de l’intégration énergétique des pays latino-américains pour leur permettre d’affirmer leur indépendance vis à vis des multinationales et pouvoirs supranationaux.

Nous appelons également les gouvernants à renoncer au modèle exportateur extractiviste actuellement en vigueur afin de faire un usage prudent et raisonné des ressources naturelles en respectant la nature. Il est nécessaire de rembourser la dette Dette Dette multilatérale : Dette qui est due à la Banque mondiale, au FMI, aux banques de développement régionales comme la Banque africaine de développement, et à d’autres institutions multilatérales comme le Fonds européen de développement.
Dette privée : Emprunts contractés par des emprunteurs privés quel que soit le prêteur.
Dette publique : Ensemble des emprunts contractés par des emprunteurs publics.
écologique et sociale et d’améliorer les conditions de vie de la population.

Nous demandons instamment au gouvernement argentin de dénoncer et ne pas renouveler les traités bilatéraux sur l’investissement, de sortir du CIRDI CIRDI Le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI) a été créé en 1965 au sein de la Banque mondiale, par la Convention de Washington de 1965 instituant un mécanisme d’arbitrage sous les auspices de la Banque mondiale.

Jusqu’en 1996, le CIRDI a fonctionné de manière extrêmement sporadique : 1972 est la date de sa première affaire (la seule de l’année), l’année 1974 suivit avec 4 affaires, et suivirent de nombreuses années creuses sans aucune affaire inscrite (1973, 1975,1979, 1980, 1985, 1988, 1990 et 1991). L’envolée du nombre d’affaires par an depuis 1996 (1997 : 10 affaires par an contre 38 affaires pour 2011) s’explique par l’effet des nombreux accords bilatéraux de protection et de promotion des investissements (plus connus sous le nom de « TBI ») signés a partir des années 90, et qui représentent 63% de la base du consentement à la compétence du CIRDI de toutes les affaires (voir graphique)). Ce pourcentage s’élève à 78% pour les affaires enregistrées uniquement pour l’année 2011.

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(Centre international de règlement des différends liés à l’investissement) qui dépend de la Banque mondiale Banque mondiale
BM
La Banque mondiale regroupe deux organisations, la BIRD (Banque internationale pour la reconstruction et le développement) et l’AID (Association internationale de développement). La Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD) a été créée en juillet 1944 à Bretton Woods (États-Unis), à l’initiative de 45 pays réunis pour la première Conférence monétaire et financière des Nations unies.

En 2022, 189 pays en sont membres.

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et de répudier les dettes dont des audits publics et transparents auront montré le caractère illégitime.

Nous appelons à la plus grande solidarité avec l’Argentine face à toute manœuvre, agression, exclusion ou sanction résultant de la pression de puissants intérêts pétroliers à l’extérieur et saluons ce premier pas pour la récupération du contrôle et la gestion sociale d’une ressource naturelle stratégique.

Signé : Le CADTM Abya Yala Nuestra America, le CADTM Europe, le secrétariat international du CADTM

Le Comité pour l’Annulation de la dette du Tiers Monde (CADTM) est un réseau international constitué de membres et de comités locaux.


CADTM AYNA

Abya Yala Nuestra América

Abya Yala est le nom donné par les Indiens Kunas du Panama et de la Colombie au continent américain avant l’arrivée de Christophe Colomb et des européens. L’expression « Abya Yala » signifie « terre dans sa pleine maturité » dans la langue des Kunas. Le leader indigène aymara de Bolivie Takir Mamani a proposé que tous les peuples indigènes des Amériques nomment ainsi leurs terres d’origine, et utilisent cette dénomination dans leurs documents et leurs déclarations orales, arguant que « placer des noms étrangers sur nos villes, nos cités et nos continents équivaut à assujettir notre identité à la volonté de nos envahisseurs et de leurs héritiers. ». Abya Yala est choisie en 1992 par les nations indigènes d’Amérique pour désigner l’Amérique au lieu de le nommer d’après Amerigo Vespucci.

CADTM Europe

Le CADTM Europe (Comité pour l’abolition des dettes illégitimes) est présent en Grèce, en France, en Belgique, en Espagne, en Suisse, en Italie, en Pologne. et au Luxembourg Au niveau mondial, le réseau CADTM est implanté dans plus d’une trentaine de pays.

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