Partie 5 de l’entretien « Généalogie des Politiques de l’anti-dette et du CADTM »
3 octobre 2016 par Eric Toussaint , Stathis Kouvelakis , Benjamin Lemoine
Introduction par Stathis Kouvélakis
L’examen approfondi des causes qui ont mené à la capitulation du gouvernement grec en juillet 2015 et à la signature d’un troisième Mémorandum permet de tracer l’une des principales lignes de clivage de la période en cours, un clivage qui n’est pas simplement une affaire de bilan historique, mais qui revêt un caractère directement politique.
Il est évident qu’un tel désastre ne saurait s’expliquer en termes de psychologie, ni en termes de simples erreurs, ni uniquement en termes de personnes - sans que soient pour autant effacées les responsabilités personnelles, énormes, de ceux qui ont assumé un rôle dirigeant dans cette entreprise.
Nous publions cet entretien en 6 parties :
Le témoignage d’Éric Toussaint constitue une précieuse contribution à cet impérieux réexamen critique. Le public grec a fait la connaissance de Toussaint quand celui-ci s’est vu confier la coordination scientifique de la Commission de Vérité sur la Dette
Dette
Dette multilatérale : Dette qui est due à la Banque mondiale, au FMI, aux banques de développement régionales comme la Banque africaine de développement, et à d’autres institutions multilatérales comme le Fonds européen de développement.
Dette privée : Emprunts contractés par des emprunteurs privés quel que soit le prêteur.
Dette publique : Ensemble des emprunts contractés par des emprunteurs publics.
Publique, formée en avril 2015 sous les auspices de la Présidente du Parlement grec de l’époque, Zoé Konstantopoulou.
Eric Toussaint compte à son actif
Actif
Actifs
En général, le terme « actif » fait référence à un bien qui possède une valeur réalisable, ou qui peut générer des revenus. Dans le cas contraire, on parle de « passif », c’est-à-dire la partie du bilan composé des ressources dont dispose une entreprise (les capitaux propres apportés par les associés, les provisions pour risques et charges ainsi que les dettes).
plusieurs décennies de travail et d’action
Action
Actions
Valeur mobilière émise par une société par actions. Ce titre représente une fraction du capital social. Il donne au titulaire (l’actionnaire) le droit notamment de recevoir une part des bénéfices distribués (le dividende) et de participer aux assemblées générales.
militante autour des questions de dette publique et, avant la Grèce, il avait pris part aux travaux d’audit citoyen de la dette dans plusieurs pays d’Amérique Latine (Équateur, Paraguay, Brésil), d’Asie (Timor Oriental) ainsi que dans le cadre d’organismes tels que l’Union Africaine.
Cette riche expérience internationale lui conférait naturellement une position privilégiée, non seulement pour contribuer à l’enquête sur les causes qui ont mené la Grèce droit dans les griffes de la « debtocratie » européenne et internationale [1], mais aussi pour évaluer les stratégies politiques qu’ont choisi de suivre, sur cette question capitale, les protagonistes de l’actuelle tragédie grecque.
C’est précisément en cela que son témoignage s’avère si précieux. A partir de sa position particulière, celle d’un acteur « étranger » qui s’est cependant retrouvé dès le début en première ligne dans la bataille qui s’est déroulée autour de la crise grecque, Toussaint a acquis une connaissance de première main de la façon dont Syriza, la force politique qui est rapidement devenue le principal protagoniste des événements qui ont suivi, a abordé la question de la dette.
Ce qu’il révèle dans le texte qui suit - extrait d’une série d’entretiens à lire dans leur intégralité - c’est la dérive d’Alexis Tsipras et de ses proches précisément sur cette question fondamentale. Partis d’une position réclamant l’annulation de la dette illégitime et la réalisation d’un audit citoyen, les dirigeants de Syriza se sont ralliés à une logique de solutions « consensuelles », tout aussi irréalisables qu’aveugles aux enseignements de l’histoire. Leur modèle est devenu l’accord de Londres de 1953 par lequel, en pleine guerre froide, les vainqueurs de la seconde guerre mondiale ont annulé la majeure partie de la dette de l’Allemagne, qu’il s’agissait de reconstruire (et de réarmer) à marche forcée. Or cette dérive ne s’est pas produite au moment où Syriza a gagné les élections, en janvier 2015, mais bien plus tôt, et très précisément au lendemain des élections du printemps 2012, au moment où il accède au rang de première force d’opposition et que ses cadres dirigeants s’autonomisent par rapport aux instances collectives de leur parti et commencent à fonctionner, de fait, en tant que « cabinet fantôme », dans l’attente de l’exercice effectif des fonctions gouvernementales.
Éric Toussaint est on ne peut plus clair quant aux raisons de cette dérive. Comme il le souligne dans cet entretien, « le noyau autour de Tsipras – je ne parle pas du bureau politique de Syriza, car les membres du bureau politique n’ont pas été inclus dans des décisions capitales, de même que les membres du comité central ont été tenus à l’écart –, avec Yannis Dragasakis, le vice-Premier ministre actuel qui joue un rôle clé, a pris dans les moments décisifs l’orientation suivante : ‘Il faut éviter à tout prix l’affrontement avec le grand capital grec, les banquiers grecs et les armateurs’. Les intérêts des deux derniers sont liés, totalement interpénétrés. De même, ce noyau considérait qu’il fallait éviter l’affrontement avec les institutions européennes ».
Comme nous le savons, l’engagement de non-rupture avec l’euro et l’UE, quel qu’en soit le prix, et la soumission absolue aux cadres fixés par l’OTAN
OTAN
Organisation du traité de l’Atlantique Nord
Elle assure aux Européens la protection militaire des États-Unis en cas d’agression, mais elle offre surtout aux États-Unis la suprématie sur le bloc occidental. Les pays d’Europe occidentale ont accepté d’intégrer leurs forces armées à un système de défense placé sous commandement américain, reconnaissant de ce fait la prépondérance des États-Unis. Fondée en 1949 à Washington et passée au second plan depuis la fin de la guerre froide, l’OTAN comprenait 19 membres en 2002 : la Belgique, le Canada, le Danemark, les États-Unis, la France, la Grande-Bretagne, l’Islande, l’Italie, le Luxembourg, la Norvège, les Pays-Bas, le Portugal, auxquels se sont ajoutés la Grèce et la Turquie en 1952, la République fédérale d’Allemagne en 1955 (remplacée par l’Allemagne unifiée en 1990), l’Espagne en 1982, la Hongrie, la Pologne et la République tchèque en 1999.
faisaient également partie intégrante de ce choix.
Éric Toussaint, afin de conserver la possibilité d’intervenir de façon aussi efficace que possible dans son propre champ, celui de la dette publique, s’est très judicieusement gardé d’entrer, à ce moment-là, dans le débat sur l’euro. Aujourd’hui, comme il le souligne dans la suite de cet entretien, il considère la sortie de l’euro comme une étape nécessaire pour tout pays de la périphérie européenne qui voudrait renverser la politique d’austérité et rompre les chaînes de la dettocratie.
Cette relative prise de distance vis-à-vis de la confrontation autour de la question de l’euro, centrale dans les clivages au sein de Syriza à l’époque, confère à son témoignage un poids encore plus grand. Elle démontre que l’abandon de la position initiale de Syriza « aucun sacrifice pour l’euro », survenu exactement au même moment, à savoir au lendemain des doubles élections de 2012, n’était ni un mouvement tactique, ni le produit d’une simple obsession européiste – même si ce fut bien le cas, indéniablement, pour une grande partie des cadres mais aussi pour des militants de base de Syriza.
Les serments d’allégeance à l’euro et le refus obsessionnel de tout plan alternatif en cas d’échec des négociations n’étaient que l’autre facette d’un choix stratégique de non-confrontation, tant avec la bourgeoise intérieure qu’avec classes dominantes de l’Europe et les mécanismes politiques de leur domination, c’est-à-dire l’Union Européenne et ses appendices (BCE
BCE
Banque centrale européenne
La Banque centrale européenne est une institution européenne basée à Francfort, créée en 1998. Les pays de la zone euro lui ont transféré leurs compétences en matières monétaires et son rôle officiel est d’assurer la stabilité des prix (lutter contre l’inflation) dans la dite zone.
Ses trois organes de décision (le conseil des gouverneurs, le directoire et le conseil général) sont tous composés de gouverneurs de banques centrales des pays membres et/ou de spécialistes « reconnus ». Ses statuts la veulent « indépendante » politiquement mais elle est directement influencée par le monde financier.
, Fonds de Stabilité Monétaire etc.).
C’est précisément ce choix, qui bien entendu n’a jamais été publiquement présenté comme tel à l’époque, qui a déterminé le cadre intangible dans lequel le gouvernement Syriza a évolué entre janvier et juillet 2015, à l’exception du référendum de juillet, lequel ne pouvait constituer, dans ce cadre-là, qu’une dernière convulsion avant la capitulation.
L’issue de cette séquence est connue, et ses conséquences ressenties jour après jour par le peuple grec, mais aussi par l’ensemble des forces de la « gauche de gauche » en Europe (et au-delà), aux yeux desquelles la Grèce s’est muée, en l’espace de quelques mois, de phare d’espérance en plaie ouverte.
Au lendemain d’une telle défaite historique, tout nouveau départ requiert impérativement que soient tirées les conclusions qui s’imposent.
Tout au long de ces années, Éric Toussaint s’est révélé être un participant actif et un soutien précieux de la lutte du peuple grec. Aujourd’hui, par sa prise de parole, il prouve que sa contribution tout autant que ce combat se poursuivent et se poursuivront jusqu’à ce que justice soit obtenue [2].
Partie 5 de l’entretien « Généalogie des Politiques de l’anti-dette et du CADTM »
Comment l’idée de l’audit a-t-elle réussi à faire son chemin en Grèce ? Quels étaient vos appuis et comment êtes-vous entrés en contact avec les potentiels porteurs de la revendication de l’audit en Grèce ?
Le CADTM a agi tant au niveau européen qu’en Grèce même. Afin de tenter de créer un mouvement unitaire européen anti-austérité réunissant des forces sociales et politiques, le CADTM a convoqué une réunion européenne à Bruxelles le 29 septembre 2010 à l’occasion d’une manifestation européenne appelée par la Confédération européenne des syndicats (CES) [3].
Avant cela, début juillet 2010, à l’initiative de Moisis Litsis, Sonia et Giorgos Mitralias, avait été créé à Athènes le Comité contre la dette, membre du CADTM international [4]. Giorgos Mitralias se mit à traduire le manuel d’audit citoyen édité par le CADTM international. Une édition en grec est parue en 2011 chez l’éditeur Alexandria.
Les positions du CADTM commencent à être connues en Grèce à partir de 2010. Plusieurs interviews sont publiées dans la presse grecque. Par exemple, la revue grecque Epikaira publie une longue interview de moi réalisée par Leonidas Vatikiotis, journaliste et militant politique d’extrême-gauche très actif [5]. J’y explique les causes de l’explosion de la dette publique grecque et en quoi l’expérience de l’Équateur peut être une source d’inspiration pour la Grèce en terme de commission d’audit et de suspension du paiement de la dette. En guise de conclusion, à la question « Que doit faire la Grèce ? », je répondais : « On devrait constituer très vite une Commission d’audit avec des personnalités prestigieuses et expérimentées. Mon conseil est catégorique : ouvrez les livres de compte ! Examinez dans la transparence et en présence de la société civile tous les contrats de l’Etat – des plus grands comme par exemple ceux des récents Jeux Olympiques jusqu’aux plus petits – et découvrez quelle partie de la dette est le fruit de la corruption, et par conséquent est illégale et odieuse selon le jargon international, et dénoncez-la ! » [6].
De son côté, dans plusieurs articles largement diffusés en Grèce, l’économiste Costas Lapavitsas [7], défendait également activement la nécessité de créer une commission d’audit. Dans l’un d’eux, il affirme : « La Commission internationale d’audit pourrait jouer le rôle de catalyseur contribuant à la transparence requise. Cette commission internationale, composée d’experts de l’audit des finances publiques, d’économistes, de syndicalistes, de représentants des mouvements sociaux, devra être totalement indépendante des partis politiques. Elle devra s’appuyer sur de nombreuses organisations qui permettront de mobiliser des couches sociales très larges. C’est ainsi que commencera à devenir réalité la participation populaire nécessaire face à la question de la dette [8] ».
Le 9 janvier 2011, le troisième quotidien grec en terme de tirage (à l’époque), Ethnos tis Kyriakis, m’interviewe et titre : « Ce n’est pas normal de rembourser les dettes qui sont illégitimes. Les peuples de l’Europe ont aussi le droit de contrôler leurs créanciers » [9]. Le quotidien explique que « le travail du Comité en Équateur a été récemment mentionné au Parlement grec par la députée Sofia Sakorafa ».
Effectivement, en décembre 2010, la députée Sofia Sakorafa était intervenue au Parlement grec pour affirmer qu’une Commission d’audit de la dette, inspirée de ce qui s’était passé en Équateur, était nécessaire. Le parlement alors dominé par le Pasok et Nouvelle Démocratie n’avait aucun intérêt à faire la clarté sur la dette, et cette proposition a donc été rejetée. Néanmoins, le combat a été mené sur d’autres terrains que celui des professionnels de la politique. En mars 2011, était lancé le comité grec d’audit de la dette (ELE). C’est le résultat de gros efforts de convergence entre des personnes qui se connaissaient à peine ou pas du tout quelques semaines auparavant. Le processus de création a été catalysé par l’ampleur de la crise en Grèce. Pour lancer ce comité, Costas Lapavitsas a diffusé un appel international, soutenu par le CADTM, qui a connu un très large écho.
Costas Lapavitsas m’a consulté sur le contenu de l’appel international de soutien à la constitution du comité, j’ai fait quelques amendements. Après quoi, nous avons commencé à chercher des appuis parmi des personnalités susceptibles de nous aider à augmenter l’écho et la crédibilité de cette initiative. Je me suis chargé de collecter un maximum de signatures de personnalités internationales en faveur de la mise en place du comité d’audit. Je connaissais plusieurs d’entre elles depuis des années comme Noam Chomski (États-Unis) avec qui j’étais en contact sur la thématique de la dette depuis 1998, Jean Ziegler (Suisse), à l’époque rapporteur des Nations Unies sur le droit à l’alimentation, Tariq Ali (Royaume-Uni) ainsi que de nombreux économistes.
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Dans ma recherche de signatures, je n’ai essuyé qu’un seul refus, celui de l’économiste nord-américain James Galbraith. Je dialoguais avec lui depuis plusieurs années à l’occasion de conférences sur la globalisation
Globalisation
(voir aussi Mondialisation) (extrait de Chesnais, 1997a)
Origine et sens de ce terme anglo-saxon. En anglais, le mot « global » se réfère aussi bien à des phénomènes intéressant la (ou les) société(s) humaine(s) au niveau du globe comme tel (c’est le cas de l’expression global warming désignant l’effet de serre) qu’à des processus dont le propre est d’être « global » uniquement dans la perspective stratégique d’un « agent économique » ou d’un « acteur social » précis. En l’occurrence, le terme « globalisation » est né dans les Business Schools américaines et a revêtu le second sens. Il se réfère aux paramètres pertinents de l’action stratégique du très grand groupe industriel. Il en va de même dans la sphère financière. A la capacité stratégique du grand groupe d’adopter une approche et conduite « globales » portant sur les marchés à demande solvable, ses sources d’approvisionnement, les stratégies des principaux rivaux oligopolistiques, font pièce ici les opérations effectuées par les investisseurs financiers, ainsi que la composition de leurs portefeuilles. C’est en raison du sens que le terme global a pour le grand groupe industriel ou le grand investisseur financier que le terme « mondialisation du capital » plutôt que « mondialisation de l’économie » m’a toujours paru - indépendamment de la filiation théorique française de l’internationalisation dont je reconnais toujours l’héritage - la traduction la plus fidèle du terme anglo-saxon. C’est l’équivalence la plus proche de l’expression « globalisation » dans la seule acceptation tant soit peu scientifique que ce terme peut avoir.
Dans un débat public, le patron d’un des plus grands groupes européens a expliqué en substance que la « globalisation » représentait « la liberté pour son groupe de s’implanter où il le veut, le temps qu’il veut, pour produire ce qu’il veut, en s’approvisionnant et en vendant où il veut, et en ayant à supporter le moins de contraintes possible en matière de droit du travail et de conventions sociales »
financière où nous nous retrouvions. Plus tard, j’ai reçu une partie de l’explication de ce refus. James Galbraith, comme il le confirme dans un livre publié en 2016, avait apporté son soutien à Georges Papandréou, le Premier ministre du gouvernement qui avait introduit le premier mémorandum en mai 2010. James Galbraith critiquait ce mémorandum mais il acceptait la narration mensongère de Papandréou à propos de la crise comme l’indique l’introduction qu’il a écrite pour le livre Crise grecque. Tragédie européenne, publié en 2016 [10].
La deuxième raison qui a poussé James Galbraith à ne pas signer cet appel, c’est l’avis que lui a donné Yannis Varoufakis. Celui-ci a expliqué publiquement en 2011 pourquoi il refusait de souscrire à l’appel à la création de la commission d’audit. Il déclare qu’il a été contacté par Galbraith qui lui demandait s’il fallait signer ou pas cet appel et qu’il lui a recommandé de ne pas le faire. Ce refus de Yannis Varoufakis permet de mieux comprendre son attitude distante à l’égard de la Commission pour la vérité sur la dette grecque quand il est devenu ministre des Finances dans le premier gouvernement d’Alexis Tsipras en 2015 [11].
Dans une longue lettre publique publiée au printemps 2011, Y. Varoufakis justifie son refus de soutenir la création du comité citoyen d’audit (ELE). Il déclare que si la Grèce suspendait le paiement de la dette, elle devrait sortir de la zone euro et se retrouverait du coup à l’âge néolithique (sic !). Y. Varoufakis explique que, par ailleurs, les personnes qui ont pris cette initiative sont bien sympathiques et bien intentionnées et qu’en principe, il est favorable à l’audit mais que, dans les circonstances dans lesquelles la Grèce se trouve, celui-ci n’est pas opportun [12].
Le documentaire Debtocracy diffusé à partir d’avril 2011 a permis de donner un très grand écho à la proposition d’audit citoyen de la dette et à la nécessité d’annulation de sa partie illégitime et odieuse [13]. Aris Chatzistefanou et Katerina Kitidi, qui ont réalisé ce documentaire avec la collaboration de Leonidas Vatikiotis, m’ont associé activement au contenu dès le début du mois de février 2011 et, sur ma proposition, sont venus réaliser une partie du documentaire à Dakar à l’occasion du Forum social mondial qui s’y est déroulé du 6 au 11 février 2011. Le film bouclé en un temps record a commencé à circuler sur internet et a été téléchargé en Grèce par plus de 1,5 million de personnes en 6 semaines au printemps 2011. Pour une population de 10 millions, c’est une proportion importante, mais aucune chaîne de TV ne l’a diffusé à l’époque.
La conférence internationale d’appui à l’audit citoyen de la dette grecque qui s’est tenue à Athènes en mai 2011 a remporté un franc succès, avec l’affluence de près de 3000 personnes réparties sur les 3 jours. Le CADTM faisait partie des organisations qui ont convoqué cette réunion. Pendant cette conférence, j’ai coordonné le premier panel de discussion auquel ont participé notamment Nadia Valavani [14], qui est devenue plus tard vice-ministre des Finances du gouvernement Tsipras 1, et Leonidas Vatikiotis. Le CADTM avait contribué avec les organisateurs grecs et d’autres mouvements non grecs à convaincre un nombre significatif d’organisations d’Europe à soutenir la conférence et à adopter collectivement une déclaration qui garde toute sa valeur (voir encadré ci-dessous).
Déclaration de la Conférence d’Athènes sur la dette et l’austérité adoptée en mai 2011 Nous, représentant-e-s de mouvements et activistes venant de différents endroits du globe, nous sommes réuni-e-s à Athènes pour tirer les leçons des différentes crises économiques internationales précédentes, pour mettre en cause la dette illégitime et se mobiliser pour son annulation, pour apporter notre solidarité aux peuples européens en lutte contre l’injustice des programmes d’austérité qui leur sont imposés par leur gouvernement, l’UE et le FMI FMI Fonds monétaire international Le FMI a été créé en 1944 à Bretton Woods (avec la Banque mondiale, son institution jumelle). Son but était de stabiliser le système financier international en réglementant la circulation des capitaux. À ce jour, 190 pays en sont membres (les mêmes qu’à la Banque mondiale). Cliquez pour plus de détails. , et dont les “protocoles d’accord” (“Memoranda of Understanding”) sont l’illustration, ainsi que pour formuler un plan d’action économique qui satisfasse les besoins des peuples au lieu de servir les intérêts d’une toute petite élite sociale. De nombreux pays en développement traversent des crises de la dette depuis les années 1970. Après des années pendant lesquelles la finance internationale a pris des risques inconsidérés en ouvrant grand les vannes du crédit, le FMI, en contrepartie du sauvetage des banques et de la finance, a imposé aux populations parmi les plus pauvres du monde des politiques d’austérité brutales qui ont réduit leurs revenus et la protection sociale. Ces politiques injustes n’ont pas permis une reprise économique. Au contraire, elles ont accru la dépendance des pays endettés à la loi des marchés financiers Marchés financiers Marché financier Marché des capitaux à long terme. Il comprend un marché primaire, celui des émissions et un marché secondaire, celui de la revente. À côté des marchés réglementés, on trouve les marchés de gré à gré qui ne sont pas tenus de satisfaire à des conditions minimales. , rendant les gouvernements de moins en moins responsables devant leurs citoyen-ne-s. Ce n’est que lorsqu’une poignée de pays ont revendiqué leurs droits et se sont élevés contre l’imposition de l’austérité, contre le sauvetage de la finance, et contre le poids écrasant de la dette que la reprise a été possible, au moins pour une courte période. C’est ce qui s’est passé en Argentine en 2001. Cette expérience doit servir à d’autres pays, comme l’Égypte, la Tunisie et le monde arabe dans son ensemble qui luttent aujourd’hui pour la démocratie et font face aux dettes odieuses de régimes dictatoriaux. Aujourd’hui, dans le sillage de la crise économique mondiale, les pays périphériques de l’UE sont confrontés à une sévère crise de la dette. Ils y ont été poussés par les opérations du système financier mondial mais aussi par le cadre institutionnel et les politiques économiques de l’UE, qui favorisent systématiquement les intérêts du capital. Le Pacte de Croissance et de Stabilité a fait pression sur le travail dans tous les pays de la zone euro, tandis que la Banque centrale Banque centrale La banque centrale d’un pays gère la politique monétaire et détient le monopole de l’émission de la monnaie nationale. C’est auprès d’elle que les banques commerciales sont contraintes de s’approvisionner en monnaie, selon un prix d’approvisionnement déterminé par les taux directeurs de la banque centrale. européenne a soutenu les intérêts des grandes banques. L’UE s’est divisée entre un centre puissant et une périphérie faible. Les dettes accumulées par la périphérie sont le résultat du fossé qui les sépare du centre mais aussi du creusement des inégalités entre les très riches et le reste de la société. Les travailleurs/euses et les chômeurs/euses, les petit-e-s agriculteurs/trices, les petites et moyennes entreprises, sont désormais obligé-e-s de porter le poids de ces dettes, et ce bien qu’ils/elles n’en aient pas bénéficié. L’austérité et les mesures de privatisation vont pressurer en premier lieu les plus pauvres, alors que ceux et celles qui sont à l’origine de la crise sont secourus. Le Pacte pour l’euro va exacerber la pression sur le travail. Les riches et les grandes entreprises vont continuer à échapper à des impôts qui pourraient être utilisés pour construire une société plus juste. Si ces mesures ne sont pas mises en cause, elles auront un impact considérable en Europe, en modifiant de manière drastique le rapport de forces en faveur du capital et au détriment du travail pour de nombreuses années. Ceux qui sont en première ligne s’opposent à cette tentative de faire payer les coûts de la crise aux travailleurs/euses et aux pauvres et d’épargner les très riches. Les peuples de Grèce, d’Irlande et du Portugal, mais aussi de Pologne, de Hongrie, de Slovénie et d’autres pays d’Europe centrale et orientale remettent en cause les politiques d’austérité de l’UE et du FMI, s’opposent au pouvoir de la finance internationale, et rejettent l’esclavage de la dette. Nous appelons les peuples du monde entier à manifester leur solidarité avec les mouvements dans ces pays qui se battent contre la dette et les politiques pernicieuses qu’elle engendre. Plus particulièrement, nous appelons à soutenir :
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L’initiative d’audit citoyen de la dette a-t-elle rencontré du succès et Syriza en a-t-elle tenu compte ?
Le comité ELE mis en place en Grèce a connu un écho très important à la faveur de la version grecque du mouvement des Indignés en 2011. En juin-juillet, des centaines de milliers de personnes ont occupé des places publiques dans des grandes villes non seulement comme Athènes et Thessalonique mais aussi dans de multiples villes moyennes. Les membres du comité qui ont tenu des stands sur les places occupées, surtout sur la place Syntagma, ont rencontré un écho impressionnant. Cette campagne a eu un effet positif sur Syriza malgré les réticences d’une série de ses dirigeants.
L’audit a fait partie du cœur du programme de Syriza lors des deux tours d’élections de mai-juin 2012. Dans le programme de 2012, Syriza proposait la « suspension du paiement de la dette pendant les travaux d’une commission d’audit internationale et tant que la reprise économique n’a pas redémarré », ce qui signifie que la suspension peut durer longtemps…
Je considère que, de ce point de vue, l’évolution de Syriza entre 2009 et les élections de mai-juin 2012 a été positive sur le plan politique. Ce n’était pas gagné d’avance. Je me souviens très bien d’une grande conférence à laquelle le principal courant politique au sein de Syriza m’avait invité, il s’agit du courant Synaspismos qui était dirigé par Alexis Tsipras. Elle s’est tenue début mars 2011 au moment où naissait le comité d’audit citoyen de la dette grecque (ELE) dans les circonstances que je viens de résumer.
Quelques mots sur cette conférence. Elle a donc eu lieu début mars 2011 à Athènes. J’y ai été invité comme intervenant par Synaspismos (la composante principale de Syriza) et par le Parti de la Gauche européenne. Au cours de cette conférence ont pris la parole Alexis Tsipras, Yanis Varoufakis, Oskar Lafontaine (un des fondateurs de Die Linke), Pierre Laurent (dirigeant du PCF et du Parti de la Gauche Européenne), Mariana Mortagua du Bloc de Gauche au Portugal, Euclide Tsakalotos (qui est devenu ministre des Finances après la démission de Yanis Varoufakis), Yannis Dragazakis (qui est devenu vice-Premier ministre dans les gouvernements Tsipras 1 et 2), moi-même et plusieurs autres invités.
À cette conférence, ma communication a porté sur les causes de la crise, l’importance vitale de réduire radicalement la dette par des mesures d’annulation liées à la réalisation d’un audit de la dette avec participation citoyenne [15]. Yanis Varoufakis a présenté ce qu’il a appelé une modeste proposition qu’il a reprise lors de la première phase de négociation avec les créanciers en février 2015, soit 4 années plus tard.
Il y avait 600 ou 700 participants et plusieurs des communications dont celles de Tsipras, Varoufakis et la mienne ont été rassemblées dans un livre publié en anglais par l’institut Nikos Poulanzas sous le titre The Political Economy of Public Debt and Austerity in the EU [16].
J’ai été frappé par le contenu d’une réaction que ma communication a suscitée. Un des organisateurs, qui dirigeait l’Institut Nikos Poulantzas, a expliqué qu’il était étonné de m’entendre plaider en faveur de l’annulation de la dette grecque considérée comme illégitime ou odieuse alors que j’avais été invité pour présenter l’expérience de l’audit de la dette. Cette intervention choquante m’indiquait clairement que la proposition de suspension ou/et d’annulation de dette était rejetée (ou n’allait pas de soi) tout au moins pour un secteur important de Syriza. Cela a été confirmé par la suite.
À l’occasion de cette conférence, j’ai pu discuter longuement avec Costas Isychos, responsable à l’époque des relations internationales de Syriza (il est devenu plus tard vice-ministre de la Défense dans le gouvernement Tsipras 1, et fait partie actuellement de l’Unité populaire) et plusieurs responsables syndicaux membres également de Syriza.
J’ai pu constater qu’il y avait entre le CADTM et eux un accord sur la nécessité de recourir à l’acte unilatéral de suspension de paiement et de réaliser un audit de la dette.
Pour rappel, Syriza avait obtenu 4 % aux élections de 2009, elle réussit en mai 2012 à réunir 16 % des voix, puis 26,5 % un mois plus tard lors des élections de juin 2012, juste 2 points en-dessous de Nouvelle démocratie, le grand parti de droite. Syriza est ainsi devenu le deuxième parti en Grèce. Entre les deux tours, Tsipras avance 5 propositions concrètes pour entamer des négociations avec les partis opposés à la Troïka (sauf Aube dorée qui, bien qu’opposé au mémorandum, est exclu) :
Mais, en l’espace de quelques mois, l’engagement à réaliser un audit de la dette et à suspendre le paiement pendant sa réalisation a progressivement disparu du discours d’Alexis Tsipras et des autres dirigeants de Syriza [17]. Cela s’est fait discrètement et la cinquième mesure proposée par Tsipras en mai 2012 a été remplacée par la proposition de réunir une conférence européenne pour, notamment, réduire la dette grecque.
Selon toi, Alexis Tsipras a pris un tournant modéré après le succès électoral de mai-juin 2012 ?
Au cours d’une entrevue avec Tsipras, en octobre 2012, mes doutes sur son changement d’orientation ont été confirmés. Deux jours avant, le Wall Street Journal avait publié les notes secrètes de la réunion du FMI du 9 mai 2010 qui indiquait explicitement qu’une dizaine de membres de la direction du FMI (comprenant 24 membres) était contre le Mémorandum en assumant que cela n’allait pas marcher, parce que c’était un sauvetage des banques françaises et allemandes et non un plan d’aide à la Grèce. J’ai dit à Tsipras et à son conseiller économique : « Vous avez là un argument en béton pour aller contre le FMI, parce que si on a la preuve que le FMI savait que son programme ne pouvait pas marcher et savait que la dette ne serait pas soutenable, on a le matériau permettant de porter le fer sur l’illégitimité et l’illégalité de la dette. » Tsipras m’a répondu : « Mais écoute… le FMI prend ses distances par rapport à la Commission européenne. » J’ai bien vu qu’il avait en tête que le FMI pourrait être un allié de Syriza au cas où Syriza accéderait au gouvernement. Le lendemain, le 6 octobre 2012, A. Tsipras et moi avons donné une conférence publique devant 3000 personnes lors du premier festival de la jeunesse de Syriza. Je me suis rendu compte que mon discours qui insistait sur la nécessité d’adopter une orientation radicale à l’échelle européenne n’était pas appréciée par lui [18].
Il est évident que cette expérience grecque a été particulièrement marquante, même si elle a finalement avorté... Comment l’expliquez-vous ?
La capitulation grecque est aussi une capitulation devant les intérêts financiers dominants liés au système-dette. Cette expérience a aussi été l’occasion d’une recomposition inédite du champ politique grec. Elle s’est jouée également dans les changements d’orientation politique du petit cercle de conseillers et d’élus gravitant autour d’Alexis Tsípras. Mon hypothèse est claire : le noyau autour de Tsipras – je ne parle pas du bureau politique de Syriza, car les membres du bureau politique n’ont pas été inclus dans des décisions capitales, de même que les membres du comité central ont été tenus à l’écart –, avec Yannis Dragasakis, le vice-Premier ministre actuel qui joue un rôle clé, a pris dans les moments décisifs l’orientation suivante : « Il faut éviter à tout prix l’affrontement avec le grand capital grec, les banquiers grecs et les armateurs. » Les intérêts des deux derniers sont liés, totalement interpénétrés. De même, ce noyau considérait qu’il fallait éviter l’affrontement avec les institutions européennes. Toute une série de renoncements en chaîne en ont découlé : « Si on veut éviter l’affrontement avec ces deux ennemis-là, il faut donner des garanties Garanties Acte procurant à un créancier une sûreté en complément de l’engagement du débiteur. On distingue les garanties réelles (droit de rétention, nantissement, gage, hypothèque, privilège) et les garanties personnelles (cautionnement, aval, lettre d’intention, garantie autonome). aux banquiers grecs et leur dire qu’en cas d’accession de Syriza au gouvernement, on n’affectera pas leurs intérêts. Donc pas de nationalisation ou de mesure contraignante à l’égard des banques. » Par rapport à l’Union européenne, afin de ne pas l’affronter, il fallait mettre de côté l’audit et la suspension des paiements. Il fallait aussi promettre qu’un gouvernement Syriza respectera la discipline budgétaire demandée par les instances européennes. C’est pour cela que Syriza a affirmé dans le programme de Thessalonique, avec lequel elle s’est présentée aux élections du 25 janvier 2015, que les mesures pour aller contre l’austérité seraient contre-balancées par des recettes fiscales capables de garantir le respect du budget prévu pour 2015 par le gouvernement précédent. Le noyau autour de Tsipras et Dragazakis tenait le raisonnement suivant : « Si on ne touche pas aux banquiers et si on respecte la discipline budgétaire demandée par Bruxelles, ils vont nous laisser arriver au gouvernement et on va pouvoir gouverner ».
Est-il possible de préciser la composition de ce noyau dur autour de Tsipras et son évolution ? Comment l’avez-vous perçu au prisme de la question de l’audit ?
Avant la victoire électorale de Syriza, j’ai eu deux tête-à-tête importants avec Alexis Tsipras. La première fois, c’était en octobre 2012 comme je l’ai indiqué plus haut [19]. Alexis Tsipras était accompagné de John Milios [20] qui à l’époque était son conseiller spécial sur les questions économiques. John Milios n’était pas partisan de l’audit de la dette et de la suspension de paiement. John Milios a été éloigné par Tsipras, à partir de la fin 2014, pour des raisons d’orientation politique, et bien qu’il fût pourtant fort modéré… L’autre conseiller économique qui a imprimé ses choix au sein de l’équipe de Tsipras n’est autre que Yannis Dragasakis [21], un personnage très influent. Il était vice-premier ministre dans le premier gouvernement de Tsipras, il l’est encore aujourd’hui et mène la politique économique. Dragasakis avait depuis des années des liens avec les banquiers. Lui-même a été administrateur d’une banque commerciale
Banques commerciales
Banque commerciale
Banque commerciale ou banque de dépôt : Établissement de crédit effectuant des opérations de banque avec les particuliers, les entreprises et les collectivités publiques consistant à collecter des fonds pour les redistribuer sous forme de crédit ou pour effectuer à titre accessoire des opérations de placements. Les dépôts du public bénéficient d’une garantie de l’État. Une banque de dépôt (ou banque commerciale) se distingue d’une banque d’affaires qui fait essentiellement des opérations de marché. Pendant plusieurs décennies, suite au Glass Steagall Act adopté pendant l’administration Roosevelt et aux mesures équivalentes prises en Europe, il était interdit aux banques commerciales d’émettre des titres, des actions et tout autre instrument financier.
de taille moyenne. Il fait en quelque sorte le pont entre Tsípras et les banquiers. Syriza est une formation nouvelle, et donc ses leaders politiques ont relativement peu d’enracinement dans les sphères étatiques – contrairement, par exemple, au Parti socialiste français dont l’histoire est liée à la République et à la gestion des affaires de l’État. À ce titre, le profil du nouveau proche conseiller économique de Tsipras détonne. Alors qu’en 2012 et 2013, parmi les dirigeants de Syriza aucun n’avait occupé une fonction dans l’État, le seul à avoir été ministre à un moment donné, pendant quelques mois en 1989, c’est... Dragasakis [22]. Il s’agissait d’un gouvernement de coalition entre le parti de droite Nouvelle Démocratie et le Parti Communiste (KKE) dont Dragazakis faisait partie. Dragazakis était clairement opposé à l’audit de la dette et à une suspension de paiement.
Comment s’est manifestée cette frilosité nouvelle de Syriza avec les puissances d’argent ? Quelles étaient les divergences de vue sur la question de la dette ?
Une des initiatives que souhaitait prendre Alexis Tsipras était de convoquer une grande conférence internationale sur la réduction de la dette à Athènes en mars 2014. Tsipras, sous la pression de Sofia Sakorafa, qui était députée Syriza depuis 2012, m’a rencontré une nouvelle fois en octobre 2013 et m’a demandé de contribuer à la tenue d’une telle conférence en convaincant une série de personnalités internationales de répondre positivement à l’invitation. J’ai dressé une liste de participants et nous en avons discuté avec Alexis Tsipras, Sofia Sakorafa et Dimitri Vitsas, secrétaire général de Syriza à l’époque. J’avais proposé d’inviter à cette conférence des personnalités comme Rafael Correa, Diego Borja (ex-directeur de la Banque centrale de l’Equateur), Joseph Stiglitz, Noam Chomsky, Susan George, David Graeber, Naomi Klein… ainsi que des membres de la commission d’audit de la dette équatorienne qui avaient travaillé avec moi en 2007 et 2008. J’ai remarqué que sur la liste que j’avais dressée, Rafael Correa ne l’intéressait pas du tout. Par contre, il aurait voulu l’ex-président du Brésil, Lula, et la présidente de l’Argentine, Cristina Fernandez. Pour lui, l’Équateur, c’était trop radical. Et bien sûr, il voulait Joseph Stiglitz et James Galbraith, ce qui était justifié. Mais dans sa tête, ce n’était pas du tout pour créer une commission d’audit, c’était pour convoquer les différents pays membres de l’Union européenne à une conférence européenne sur la dette, à l’image de l’accord de Londres de 1953, lorsque les vainqueurs de la Seconde Guerre mondiale ont concédé une réduction de dette très importante à l’Allemagne de l’Ouest. Je lui ai dit qu’il n’y avait aucune chance que cela se réalise.
Comme dirigeant de Syriza, il avait parfaitement la légitimité d’avancer ce plan A, mais il était impensable que Draghi, Hollande, Merkel, Rajoy y consentent. Je lui ai dit qu’il fallait un plan B, dans lequel il devait y avoir la commission d’audit. Je l’ai également déclaré dans la presse grecque. Voici un extrait d’une interview de moi que le Quotidien des Rédacteurs, proche de Syriza, a publié en octobre 2014. Le journaliste m’avait demandé ce que je pensais de la conférence européenne sur la dette que proposait Alexis Tsipras en se basant sur la conférence de Londres de 1953 et j’ai répondu : « Il s’agit donc d’une demande légitime (…) mais vous ne pourrez pas convaincre les gouvernements des principales économies européennes et les institutions de l’UE de le faire. Mon conseil est le suivant : la dernière décennie nous a montré qu’on peut arriver à des solutions équitables en appliquant des actes souverains unilatéraux. Il faut désobéir aux créanciers qui réclament le paiement d’une dette illégitime et imposent des politiques qui violent les droits humains fondamentaux, lesquels incluent les droits économiques et sociaux des populations. Je pense que la Grèce a de solides arguments pour agir et pour former un gouvernement qui serait soutenu par les citoyens et qui explorerait les possibilités dans ce sens. Un tel gouvernement populaire et de gauche pourrait organiser un comité d’audit de la dette avec une large participation citoyenne, qui permettrait de déterminer quelle partie de la dette est illégale et odieuse, suspendrait unilatéralement les paiements et répudierait ensuite la dette identifiée comme illégitime, odieuse et/ou illégale [23]. »
Finalement, Alexis Tsipras m’a proposé de préparer avec lui et Pierre Laurent, président à l’époque du Parti de la Gauche européenne, une conférence européenne dont un des thèmes serait la dette. Elle devait se tenir en mars 2014 à Athènes. Cela ne s’est pas concrétisé car, lors d’une réunion tenue en décembre 2013 à Madrid, le Parti de la Gauche européenne a décidé de convoquer une conférence à Bruxelles, à la place d’Athènes, au printemps 2014. Lors de cette conférence de Bruxelles qui a eu très peu de répercussion et où étaient présents entre autres Alexis Tsipras, Pierre Laurent ainsi que Gabi Zimmer (membre de Die Linke et présidente du groupe parlementaire de la GUE/NGL au parlement européen), j’ai participé comme conférencier à un panel avec Euclide Tsakalotos qui allait devenir le ministre des Finances d’Alexis Tsipras à partir de juillet 2015 [24]. Je me suis rendu compte dès ce moment qu’il n’était absolument pas favorable à un plan B portant sur la dette, les banques, la fiscalité. Le plan d’Euclide Tsakalotos était de négocier à tout prix avec les institutions européennes pour obtenir une réduction de l’austérité sans recourir à la suspension de paiement de la dette et à l’audit. Lors de cette conférence, j’ai de nouveau argumenté en faveur d’un plan B qui devait inclure l’audit et la suspension de paiement de la dette.
La discussion sur la nécessité d’un plan B ne date donc pas de 2015, elle remonte clairement à 2013-2014. Le noyau dirigeant autour de Tsipras a décidé d’exclure la préparation d’un plan B et s’est accroché à un plan A irréalisable.
Fin de la cinquième partie. La 6e partie porte sur les travaux de la Commission pour la vérité sur la dette grecque, la capitulation du gouvernement de Tsipras et les perspectives internationales pour la lutte contre les dettes illégitimes.
[1] Cf. Le documentaire d’Aris Chatzistefanou « Debtocracy », dans lequel le témoignage de Toussaint occupe une place centrale.
[2] Cette introduction a été traduite du grec par Marie-Laure Veilhan.
[3] Voir le compte-rendu de la réunion du 29 septembre 2010, « Pour une coordination européenne de lutte contre la dette et les plans d’austérité ! », http://cadtm.org/Compte-rendu-de-la-reunion-du-29 et http://cadtm.org/Pour-une-coordination-europeenne.
[4] Voir http://cadtm.org/Grece-Fondation-du-Comite-Grec. Il s’est doté d’un site en grec : http://www.contra-xreos.gr/
[5] Cinq ans plus tard, Leonidas Vatikiotis a fait partie de la Commission pour la Vérité sur la dette grecque.
[6] « Ouvrez les livres de compte de la dette publique ! », http://cadtm.org/Ouvrez-les-livres-de-compte-de-la
[7] En janvier 2015, Costas Lapavitsas a été élu député au parlement grec sur la liste de Syriza. Suite à la capitulation, il a contribué à fonder l’Unité Populaire. Sa bio en anglais sur wikipedia : https://en.wikipedia.org/wiki/Costas_Lapavitsas
[8] Article publié le 5 décembre 2010 par le quotidien Eleftherotypia, http://cadtm.org/Commission-Internationale-d-audit
[9] En 2011, Ethnos tis Kyriakis, de centre-gauche, était le troisième quotidien grec en terme de tirage (100.000 exemplaires). Version en grec de l’interview publiée le 9 janvier 2011 : http://www.ethnos.gr/article.asp?catid=22770&subid=2&pubid=49752949 Version française : http://cadtm.org/Les-peuples-de-l-Europe-ont-aussi
[10] James K. Galbraith, Crise grecque, tragédie européenne, Éditions du Seuil, Paris, 2016 http://www.seuil.com/ouvrage/crise-grecque-tragedie-europeenne-james-k-galbraith/9782021314847 Voir cet extrait de l’introduction : « Quand Georges Papandréou est devenu Premier ministre, en octobre 2009, j’ai été invité à lui rendre visite, à le conseiller et (surtout) à lui apporter mon soutien moral. Lors de ces multiples rencontres, mon rôle est resté limité. Papandréou avait fait campagne en promouvant un programme de protection sociale et de croissance économique que la crise du système financier et de la dette a rapidement mis à mal. Dès le mois de mai 2010, il est contraint d’accepter un plan d’austérité, en contrepartie d’un prêt colossal, pour éviter l’écroulement du système bancaire hellène, fortement exposé par ses investissements dans les dettes de l’État devenu insolvable » (p. 17). Cette dernière phrase présente une narration qui ne correspond pas à la réalité. Le système bancaire hellène n’était pas menacé d’écroulement à cause de son exposition aux dettes publiques grecques et l’État grec n’était pas devenu insolvable. Les banques grecques étaient principalement menacées par l’éclatement de la bulle du crédit privé qu’elles avaient contribué à générer avec les banques françaises, allemandes et hollandaises. Si les banques grecques s’effondraient, cela aurait entraîné de très grosses pertes pour les banques françaises, allemandes et hollandaises. Le plan dit de sauvetage que Papandréou a voulu, avec les autorités européennes et le FMI, était destiné à éviter au maximum de très lourdes pertes pour les banques françaises, allemandes, hollandaises et grecques. Au lieu du choix fait par Papandréou, les autorités européennes et le FMI, il aurait fallu imposer des pertes aux banques étrangères, socialiser le secteur et réduire radicalement la dette publique grecque. Ceci étant dit, malgré les critiques que j’adresse à la manière dont J. Galbraith présente ce qui s’est passé en 2010, je recommande la lecture de ce livre car il contient des informations tout à fait intéressantes
[11] Dans un livre paru en 2016, Y. Varoufakis ne fait d’ailleurs aucune mention de la Commission pour la vérité sur la dette grecque. Il ne mentionne pas non plus l’action de la présidente du parlement grec, Zoé Konstantopoulou. Yanis Varoufakis, Et les faibles subissent ce qu’ils doivent ? Comment l’Europe de l’austérité menace la stabilité du monde, Les Liens qui Libèrent, Paris, 2016 http://www.editionslesliensquiliberent.fr/livre-Et_les_faibles_subissent_ce_qu_ils_doivent__-481-1-1-0-1.html
[12] Voir en grec : ΣχόλιαΓιάνης Βαρουφάκης Debtocracy : Γιατί δεν συνυπέγραψα http://www.protagon.gr/?i=protagon.el.article&id=6245, publié le 11 avril 2011.
Dans ce long texte, Varoufakis donne également son avis critique sur le documentaire Debtocracy.
[13] Voir à propos de Debtocracy : « Dette : les Grecs et la Debtocracy ». http://cadtm.org/Dette-les-grecs-et-la-Debtocracy , publié le 13 juillet 2011. Dans le documentaire figurent notamment des interviews de Yanis Varoufakis, Costas Lapavitsas et de moi-même.
[14] Nadia Valavani est une personnalité publique grecque respectée, notamment pour le courage dont elle a fait preuve dans la lutte contre la dictature des colonels, par exemple dans l’insurrection de l’institut polytechnique d’Athènes en 1973, durement réprimée par l’armée.
[15] Voir le diaporama de mon exposé : Eric Toussaint, Greece : Symbol of Illegitimate Debt, publié le 12 mars 2011, http://www.cadtm.org/IMG/pdf/Debt_Crisis_Athens_SITE_March2011_EricToussaint.pdf Les principales propositions qui ressortaient de mon exposé sont exprimées dans ce texte : Eric Toussaint, Huit propositions urgentes pour une autre Europe, publié le 4 avril 2011, http://www.cadtm.org/Huit-propositions-urgentes-pour
[16] Elena Papadopoulou and Gabriel Sakellaridis (eds.), The Political Economy of Public Debt and Austerity in the EU, Athens : Nissos Publications 2012, 290 p., ISBN : 9-789609-535465
Il est utile de reproduire la table des matières de ce livre intéressant car les noms d’acteurs clés de Syriza y apparaissent. Table des matières :
Elena Papadopoulou, Gabriel Sakellaridis (Gabriel S. a été porte-parole du groupe Syriza au parlement grec en 2015. Il a démissionné en décembre 2015 en désaccord avec l’application du 3e mémorandum. Il n’est plus membre de Syriza) : Introduction.
Section 1 - Understanding the European Debt Crisis in a Global Perspective
George Stathakis (George S. est ministre de l’économie dans le gouvernement Tsipras 2, il faisait partie de l’aile droite de Syriza et était totalement opposé à l’audit de la dette grecque. Fin 2015, la presse a révèlé qu’il aurait omis de déclarer au fisc 1,8 million d’euros et 38 biens immobiliers) : The World Public Debt Crisis. Brigitte Unger : Causes of the Debt Crisis : Greek Problem or Systemic Problem ?
Euclid Tsakalotos (ministre des finances depuis juillet 2015) : Crisis, Inequality and Capitalist Legitimacy. Dimitris Sotiropoulos : Thoughts on the On-going European Debt Crisis : A New Theoretical and Political Perspective
Section 2 - The Management of the Debt Crisis by the EU and the European Elites. Marica Frangakis : From Banking Crisis to Austerity in the EU - The Need for Solidarity. Jan Toporowski : Government Bonds and European Debt Markets. Riccardo Bellofiore : The Postman Always Rings Twice : The Euro Crisis inside the Global Crisis.
Section 3 - Facets of the Social and Political Consequences of the Crisis in Europe. Maria Karamessini : Global Economic Crisis and the European Union - Implications, Policies and Challenges
Giovanna Vertova : Women on the Verge of a Nervous Breakdown : The Gender Impact of the Crisis. Elisabeth Gauthier : The Rule of the Markets : Democracy in Shambles
Section 4 - The PIGS as (Scape)Goats. Portugal - Marianna Mortagua
Ireland - Daniel Finn
Greece - Eric Toussaint
Spain - Javier Navascues
Hungary - Tamas Morva
Section 5 - Overcoming the Crisis : The Imperative of Alternative Proposals. Yiannis Dragasakis (vice-premier minister des gouvernements Tsipras 1 et 2) : A Radical Solution only through a Common Left European Strategy. Kunibert Raffer : Insolvency Protection and Fairness for Greece : Implementing the Raffer Proposal. Pedro Páez Pérez : A Latin-American Perspective on Austerity Policies, Debt and the New Financial Architecture
Nicos Chountis (ex vice-ministre des relations avec les insitutions européennes dans le gouvernement Tsipras1, a été démissionné par Tsipras pour son refus de la capitulation et est eurodéputé de l’Unité Popualire depuis septembre 2015) : The Debt Crisis and the Alternative Strategies of the Left. Yanis Varoufakis (ministre des finances de janvier à juillet 2015) : A Modest Proposal for Overcoming the Euro Crisis.
Section 6 - The Crucial Role of the European Left - Political Interventions. Alexis Tsipras : A European Solution for a European Problem : The Debt Crisis as a Social Crisis.
Pierre Laurent : People Should Not Pay for the Crisis of Capitalism.
Le livre est disponible en PDF : http://www.cadtm.org/Public-Debt-and-Austerity-in-the
[17] J’ai expliqué cela dans : « Grèce : pourquoi la capitulation ? Une autre voie est possible (texte de la vidéo avec notes explicatives) », publié le 27 août 2015 http://cadtm.org/Grece-pourquoi-la-capitulation-Une,12143
[18] Voir Eric Toussaint : « Le peuple grec se trouve aujourd’hui à l’épicentre de la crise du capitalisme », http://www.cadtm.org/Eric-Toussaint-Le-peuple-grec-se
[19] J’étais en compagnie d’Aris Vasilopoulos, militant de Kokkino, un courant dans Syriza, et de Yiorgos Mitralias, le responsable du Comité contre la Dette.
[22] Sur Dragazakis et sur le bilan de Syriza, voir le point de vue de Stathis Kouvelakis dans la New Left Review de janvier-février 2016 : https://newleftreview.org/II/97/stathis-kouvelakis-syriza-s-rise-and-fall . Voir aussi le bilan tiré par Antonis Ntavanelos : http://www.anti-k.org/2015/12/19/premieres-reflexions-sur-un-bilan-de-notre-parcours-avec-syriza-i/
[23] Voir « L’appel d’Alexis Tsipras pour une Conférence internationale sur la dette est légitime », http://www.cadtm.org/Eric-Toussaint-L-appel-d-Alexis, publié le 23 octobre 2014.
[24] Eucide Tsakalotos, qui en 2014 était professeur d’économie au Royaume Uni, a remplacé à partir de juillet 2015 Varoufakis au poste de ministre des Finances. Il occupe toujours cette fonction en juillet 2016 dans le gouvernement Tsipras II.
Docteur en sciences politiques des universités de Liège et de Paris VIII, porte-parole du CADTM international et membre du Conseil scientifique d’ATTAC France.
Il est l’auteur des livres, Banque mondiale - Une histoire critique, Syllepse, 2022, Capitulation entre adultes : Grèce 2015, une alternative était possible, Syllepse, 2020, Le Système Dette. Histoire des dettes souveraines et de leur répudiation, Les liens qui libèrent, 2017 ; Bancocratie, ADEN, Bruxelles, 2014 ; Procès d’un homme exemplaire, Éditions Al Dante, Marseille, 2013 ; Un coup d’œil dans le rétroviseur. L’idéologie néolibérale des origines jusqu’à aujourd’hui, Le Cerisier, Mons, 2010. Il est coauteur avec Damien Millet des livres AAA, Audit, Annulation, Autre politique, Le Seuil, Paris, 2012 ; La dette ou la vie, Aden/CADTM, Bruxelles, 2011. Ce dernier livre a reçu le Prix du livre politique octroyé par la Foire du livre politique de Liège.
Il a coordonné les travaux de la Commission pour la Vérité sur la dette publique de la Grèce créée le 4 avril 2015 par la présidente du Parlement grec. Cette commission a fonctionné sous les auspices du parlement entre avril et octobre 2015.
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enseigne la philosophie politique au King’s College de l’université de Londres.
Membre de la rédaction de la revue Contretemps, il a dirigé l’ouvrage Y a t il une vie après le capitalisme ? (Le Temps des Cerises, 2008) et il est l’auteur de La France en révolte : Luttes sociales et cycles politiques (Textuel, 2007) et de Philosophie et révolution, De Kant à Marx (PUF, 2003). Il a été membre du comité central de SYRIZA jusqu’à l’été 2015 qu’il a quitté suite à la capitulation du gouvernement de Tsipras. Il a contribué à créer Unité Populaire.
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est chercheur en sociologie au CNRS spécialisé sur la question de la dette publique et des liens entre les États et l’ordre financier.
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