La lecture et la relecture de l’histoire immédiate de notre pays révèle le rôle nocif du Rwanda dans la guerre d’agression à laquelle nous ne cessons de résister jusqu’à ce jour. Pour remplir son rôle de sous-traitant des transnationales, le Rwanda s’est servi de plusieurs rébellions au sein desquelles plusieurs Congolais(es) ont été, souvent, de parfaites marionnettes. L’AFDL (et le PPRD), le RCD et le CNDP sont les créatures du Rwanda. Croire que c’est au nom des accords signés à Goma au mois de mars que le CNDP, ayant à sa tête actuellement, un criminel de guerre (Bosco Ntaganda) recherché par la CPI, participera au futur gouvernement de Kinshasa relèverait d’une absurde naïveté.
Au jour d’aujourd’hui, il devient de plus en plus clair que mâter les Congolais(es) sur la terre de leurs ancêtres est une entreprise périlleuse. Contrairement aux compatriotes qui nous voient à partir de l’image (négative du Congolais) que les autres leur renvoient, nous estimons que les organisations congolaises réussissent, tant bien que mal, à résister face aux assauts de la mort fomentés par « les maîtres du monde et ceux qui leur obéissent ». L’image négative du Congolais inconscient, naïf et irresponsable participe de la longue guerre psychologique accompagnant les crimes économiques, les crimes humanitaires, les crimes socio-politiques et culturels que les transnationales commettent sur notre sol à travers le Rwanda, ses bras armés (dont le CNDP) et ses bras politiques (dont l’ex-AFDL, le RCD et le PPRD).
Dans ce contexte, l’entrée du CNDP au gouvernement signifie profondément que le processus dit démocratique déclenché en 2006 fut un leurre. Il est possible qu’avec ce coup-là, « les plus sceptiques » d’entre nous en viennent à comprendre ce qui se joue chez nous depuis les années 90 : le pillage de nos matières premières par ceux qui ont bâti leurs fortunes sur notre dos depuis cinq siècles passe aujourd’hui par les guerres qualifiées d’ethniques, les génocides et les processus démocratiques biaisés.
Comment imaginer un seul instant que ceux qui nous ont foutu la guerre soient aussi ceux qui, aujourd’hui, nous disent que pour faire la paix, ils doivent avoir à leurs côtés et cela dans toutes les institutions du pays leurs compagnons de crimes ? Et cela contre toutes les règles nationales et internationales du droit ? Le comble est que « les petites mains du capital » nous somment de plus en plus de ne plus poser ce genre de questions au nom de notre irresponsabilité ? Elles utilisent « les petites mains médiatiques congolaises » pour nous culpabiliser et nous criminaliser. Elles nous demandent d’arrêter de chercher de boucs émissaires comme si nous n’avions pas découvert comment elles opèrent !
Dans Bush le cyclone, Michel Collon note ceci : « Les trois grands blocs (Etats-Unis, Europe, Japon) (et nous pouvons ajouter les pays émergents
Pays émergents
Les pays émergents désignent la vingtaine de pays en développement ayant accès aux marchés financiers et parmi lesquels se trouvent les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud). Ils se caractérisent par un « accroissement significatif de leur revenu par habitant et, de ce fait, leur part dans le revenu mondial est en forte progression ».
) mènent la guerre chaude, froide ou tiède, contre les peuples du tiers-monde. Mais ils se font aussi la guerre entre eux pour savoir qui va dominer le monde et ses richesses. La guerre économique bien sûr. Mais aussi la guerre politique et, dans certaines conditions, militaire. Quand le rapport de forces change entre les grandes puissances, quand une superpuissance veut en remplacer une autre, ou simplement la priver de l’accès à certaines matières stratégiques, cela se règle aussi par la violence. Soit directement, soit indirectement, par l’intermédiaire d’Etats ou de mouvements contrôlés. La guerre est le moyen fondamental pour repartager les richesses du monde, c’est-à-dire les sources de profits. » (p.20-21. Nous soulignons). Pour contrôler « le non-Etat » congolais, les escadrons de la mort du FPR y sont injectés et rejoints par « les mouvements contrôlés » dont le CNDP.
La montée de la Chine au Congo fait peur aux « grandes nations de droits de l’homme ». Elles nous confient de plus en plus ceci : « Si nous sommes trop regardant du point de vue des conditionnalités
Conditionnalités
Ensemble des mesures néolibérales imposées par le FMI et la Banque mondiale aux pays qui signent un accord, notamment pour obtenir un aménagement du remboursement de leur dette. Ces mesures sont censées favoriser l’« attractivité » du pays pour les investisseurs internationaux mais pénalisent durement les populations. Par extension, ce terme désigne toute condition imposée en vue de l’octroi d’une aide ou d’un prêt.
de droits de l’homme, les gouvernants Congolais vont nous chasser et la Chine aura à elle seule le marché. » Ce raisonnement apparemment judicieux est faux sur toute la ligne. Les transnationales ne connaissent pas les frontières étatiques. Les mêmes investissent en Belgique, aux USA, en France, en Allemagne, etc.
Elles sont « victimes » de l’appât du gain. Il est tellement fort que l’humanité de l’autre homme passe après l’accumulation des biens matériels. C’est une inversion des valeurs. Elle traduit le niveau très avancé d’incompétence morale atteint par les donneurs de leçons de démocratie au Nord du monde.
Heureusement, les Congolais(es) résistent et résisteront toujours. En plus de cette résistance interne, il serait judicieux que nous soyons nombreux à mener une lutte juridique et de l’intelligence aux côtés de ces jeunes générations occidentales qui s’investissent dans la recherche des instruments juridiques pouvant contraindre les Etats du Nord et leurs transnationales à tenir compte des droits économiques, sociaux et culturels.
Rejoindre les auteurs de Noir Canada (dont Delphine Abadie) là où ils se battent pour que le Canada cesse d’être « un paradis juridique » pour les transnationales ; rejoindre le CADTM (comité pour l’annulation de la dette
Dette
Dette multilatérale : Dette qui est due à la Banque mondiale, au FMI, aux banques de développement régionales comme la Banque africaine de développement, et à d’autres institutions multilatérales comme le Fonds européen de développement.
Dette privée : Emprunts contractés par des emprunteurs privés quel que soit le prêteur.
Dette publique : Ensemble des emprunts contractés par des emprunteurs publics.
du tiers-monde) dans sa lutte pour l’annulation de notre dette odieuse
Dette odieuse
Selon la doctrine, pour qu’une dette soit odieuse, et donc nulle, elle doit remplir deux conditions :
1) Elle doit avoir été contractée contre les intérêts de la Nation, ou contre les intérêts du Peuple, ou contre les intérêts de l’État.
2) Les créanciers ne peuvent pas démontrer qu’ils ne pouvaient pas savoir que la dette avait été contractée contre les intérêts de la Nation.
Il faut souligner que selon la doctrine de la dette odieuse, la nature du régime ou du gouvernement qui la contracte n’est pas particulièrement importante, puisque ce qui compte, c’est l’utilisation qui est faite de cette dette. Si un gouvernement démocratique s’endette contre l’intérêt de la population, cette dette peut être qualifiée d’odieuse, si elle remplit également la deuxième condition. Par conséquent, contrairement à une version erronée de cette doctrine, la dette odieuse ne concerne pas seulement les régimes dictatoriaux.
(voir : Eric Toussaint, « La Dette odieuse selon Alexander Sack et selon le CADTM » ).
Le père de la doctrine de la dette odieuse, Alexander Nahum Sack, dit clairement que les dettes odieuses peuvent être attribuées à un gouvernement régulier. Sack considère qu’une dette régulièrement contractée par un gouvernement régulier peut être considérée comme incontestablement odieuse... si les deux critères ci-dessus sont remplis.
Il ajoute : « Ces deux points établis, c’est aux créanciers que reviendrait la charge de prouver que les fonds produits par lesdits emprunts avaient été en fait utilisés non pour des besoins odieux, nuisibles à la population de tout ou partie de l’État, mais pour des besoins généraux ou spéciaux de cet État, qui n’offrent pas un caractère odieux ».
Sack a défini un gouvernement régulier comme suit :
« On doit considérer comme gouvernement régulier le pouvoir suprême qui existe effectivement dans les limites d’un territoire déterminé. Que ce pouvoir soit monarchique (absolu ou limité) ou républicain ; qu’il procède de la « grâce de Dieu » ou de la « volonté du peuple » ; qu’il exprime la « volonté du peuple » ou non, du peuple entier ou seulement d’une partie de celui-ci ; qu’il ait été établi légalement ou non, etc., tout cela n’a pas d’importance pour le problème qui nous occupe. »
Donc, il n’y a pas de doute à avoir sur la position de Sack, tous les gouvernements réguliers, qu’ils soient despotiques ou démocratiques, sous différentes variantes, sont susceptibles de contracter des dettes odieuses.
et la mise à nu des mécanismes mortifères utilisés par les IFI pour nous rendre à tout jamais esclaves serait un pas de géant effectué sur le front où les acteurs majeurs de ce qui se passe chez nous opèrent. L’hybridité est une dimension importante de nos luttes de libération à ne pas négliger.
Il y a d’autres fronts internes. Par exemple : l’implication des mobutistes dans la dérive autoritaire montante chez nous ne devrait pas nous laisser indifférents. Des observateurs avertis se réalisent de plus en plus que ceux qui, hier, ont adulé Mobutu pendant plus de trois décennies, se retrouvent, aujourd’hui, majoritaires aux côtés de Joseph Kabila et à des postes importants dans les institutions (formelles) du pays. Plusieurs parmi eux font partie de la bourgeoisie compradore travaillant à la sauvegarde de ses intérêts privés au détriment de tout un peuple. Il n’est plus tellement sûr qu’ils échappent au jugement populaire demain s’il arrivait que les dignes filles et fils de notre peuple luttant sur plusieurs fronts accèdent à la gestion de la res publica. Qu’on se le dise !
14 février 2011, par Jean-Pierre Mbelu
29 janvier 2010, par Jean-Pierre Mbelu
7 janvier 2010, par Jean-Pierre Mbelu
5 janvier 2010, par Jean-Pierre Mbelu
17 décembre 2009, par Jean-Pierre Mbelu
20 mars 2008, par Jean-Pierre Mbelu
Presse internationale
Dette odieuse et hypothétique révision des contrats léonins19 janvier 2007, par Jean-Pierre Mbelu
29 décembre 2006, par Jean-Pierre Mbelu