Répondre à la crise de la covid-19 : la Belgique et l’annulation de la dette des pays du Sud

Note de positionnement

24 mars 2021 par CADTM Belgique , Collectif


Nous publions une version actualisée de la note de positionnement rédigée par le CADTM, le CNCD, Entraide et fraternité, Oxfam Belgique et 11.11.11 et publiée sur note site le 26 juin 2020. ONG et syndicats belges s’engagent pour que la Belgique puisse agir rapidement vis-à-vis des pays du Sud face à la crise de la dette aggravée par la crise sanitaire et économique due au Covid-19.



La crise économique découlant du Covid-19 a exacerbé une crise de la dette Dette Dette multilatérale : Dette qui est due à la Banque mondiale, au FMI, aux banques de développement régionales comme la Banque africaine de développement, et à d’autres institutions multilatérales comme le Fonds européen de développement.
Dette privée : Emprunts contractés par des emprunteurs privés quel que soit le prêteur.
Dette publique : Ensemble des emprunts contractés par des emprunteurs publics.
qui a commencé dès 2013-2014 pour une partie des pays du Sud. La dette totale des pays du Sud culminait fin 2018 à 193% du PIB PIB
Produit intérieur brut
Le PIB traduit la richesse totale produite sur un territoire donné, estimée par la somme des valeurs ajoutées.
Le Produit intérieur brut est un agrégat économique qui mesure la production totale sur un territoire donné, estimée par la somme des valeurs ajoutées. Cette mesure est notoirement incomplète ; elle ne tient pas compte, par exemple, de toutes les activités qui ne font pas l’objet d’un échange marchand. On appelle croissance économique la variation du PIB d’une période à l’autre.
, contre 100% en 2008, soit le plus haut niveau jamais atteint. Cette crise est liée à la structure de l’économie capitaliste mondiale qui maintient ces pays dans un rôle de pourvoyeurs de matières premières et qui les rend dépendants des flux financiers provenant des économies du Nord et des aléas des cours des matières premières.

S’est ajouté comme facteur aggravant la poursuite des effets de la récession Récession Croissance négative de l’activité économique dans un pays ou une branche pendant au moins deux trimestres consécutifs. mondiale enclenchée par la crise financière de 2008. En effet, il existe une corrélation entre le poids croissant du service de la dette Service de la dette Remboursements des intérêts et du capital emprunté. et la baisse des dépenses dans les services publics : entre 2014 et 2018, les dépenses publiques affectées aux services publics ont baissé de 18,42% en Amérique latine et aux Caraïbes, et de 13% en Afrique sub-saharienne. Les coupes budgétaires liées au remboursement de la dette font que celle-ci repose particulièrement sur les épaules des groupes les plus vulnérables tout en creusant les inégalités de genre.

Selon un récent rapport d’Oxfam, plus d’un demi-milliard de personnes pourraient basculer dans la pauvreté des suites de la crise actuelle. Dans ces conditions, les États auront un rôle essentiel à jouer pour assurer la survie de leur population, au travers d’un renforcement des services publics et de la protection sociale.

Dans cette perspective, l’annulation des paiements de 2020 et 2021 (au minimum) au titre du service de la dette ne doit pas être considérée comme une option mais plutôt comme une question de survie. Afin de permettre aux pays concernés de disposer des marges de manœuvres nécessaires pour faire face à la double crise sanitaire et socio-économique, il est vital de résoudre cette crise de la dette en allant au-delà du simple moratoire Moratoire Situation dans laquelle une dette est gelée par le créancier, qui renonce à en exiger le paiement dans les délais convenus. Cependant, généralement durant la période de moratoire, les intérêts continuent de courir.

Un moratoire peut également être décidé par le débiteur, comme ce fut le cas de la Russie en 1998, de l’Argentine entre 2001 et 2005, de l’Équateur en 2008-2009. Dans certains cas, le pays obtient grâce au moratoire une réduction du stock de sa dette et une baisse des intérêts à payer.
annoncé par le G20 G20 Le G20 est une structure informelle créée par le G7 (Allemagne, Canada, États-Unis, France, Italie, Japon, Royaume-Uni) à la fin des années 1990 et réactivée par lui en 2008 en pleine crise financière dans le Nord. Les membres du G20 sont : Afrique du Sud, Allemagne, Arabie saoudite, Argentine, Australie, Brésil, Canada, Chine, Corée du Sud, États-Unis, France, Inde, Indonésie, Italie, Japon, Mexique, Royaume-Uni, Russie, Turquie, Union européenne (représentée par le pays assurant la présidence de l’UE et la Banque Centrale européenne ; la Commission européenne assiste également aux réunions). L’Espagne est devenue invitée permanente. Des institutions internationales sont également invitées aux réunions : le Fonds monétaire international, la Banque mondiale. Le Conseil de stabilité financière, la BRI et l’OCDE assistent aussi aux réunions. en avril.

C’est pourquoi la Belgique doit jouer un rôle moteur par rapport à ses créances Créances Créances : Somme d’argent qu’une personne (le créancier) a le droit d’exiger d’une autre personne (le débiteur). bilatérales :

  • Annuler immédiatement et sans conditions les paiements de la dette bilatérale dont elle est créancière en 2020 et 2021 sans inclure les montants annulés dans son aide publique au développement ;
  • Procéder en 2021, à un audit transparent de toutes ses créances bilatérales, en associant les pays débiteurs et la société civile afin d’identifier les dettes illégales, odieuses, illégitimes et insoutenables à annuler ;
  • Utiliser tous ses leviers d’action pour obliger les créanciers privés à annuler leurs créances sur les pays en développement. Elle devrait au minimum conditionner toute aide publique aux créanciers privés à l’obligation pour ces derniers de renoncer aux paiements prévus pour 2020 et 2021.

et au sein des instances multilatérales :

Enfin, la Belgique doit soutenir publiquement les moratoires sur la dette qui seraient décrétés unilatéralement par les pays débiteurs. L’objectif étant de soutenir la réalisation des ODD, le respect effectif des droits humains, dont les normes sociales fondamentales, les dépenses publiques visant à protéger les droits et les besoins des populations, en particulier pour maintenir et augmenter les dépenses de protection sociale et de santé en réponse à la crise de Covid-19 et pour garantir que les allègements bénéficient directement à ceux qui en ont besoin.


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