Soutien aux syndicalistes tunisiennes menacées de mort !

Sea LATELEC Fouchana à nouveau en grève !

21 février 2013 par Monika Karbowska


Les 21 et 22 février le syndicat de base de cette usine française de câblage aéronautique, filiale de Latécoère et sous-traitant d’Airbus située dans la banlieue de Tunis, a décidé d’un important débrayage.
Les 450 salariées du site, presque toutes des femmes, exigent que l’entreprise française respecte le droit du travail tunisien et intègre en CDI les salariées précaires qui y travaillent depuis plus de 4 ans.



Les conflits sociaux sont permanents dans cette usine présentée par sa direction comme « un modèle » de la mondialisation Mondialisation (voir aussi Globalisation)
(extrait de F. Chesnais, 1997a)
Jusqu’à une date récente, il paraissait possible d’aborder l’analyse de la mondialisation en considérant celle-ci comme une étape nouvelle du processus d’internationalisation du capital, dont le grand groupe industriel transnational a été à la fois l’expression et l’un des agents les plus actifs.
Aujourd’hui, il n’est manifestement plus possible de s’en tenir là. La « mondialisation de l’économie » (Adda, 1996) ou, plus précisément la « mondialisation du capital » (Chesnais, 1994), doit être comprise comme étant plus - ou même tout autre chose - qu’une phase supplémentaire dans le processus d’internationalisation du capital engagé depuis plus d’un siècle. C’est à un mode de fonctionnement spécifique - et à plusieurs égards important, nouveau - du capitalisme mondial que nous avons affaire, dont il faudrait chercher à comprendre les ressorts et l’orientation, de façon à en faire la caractérisation.

Les points d’inflexion par rapport aux évolutions des principales économies, internes ou externes à l’OCDE, exigent d’être abordés comme un tout, en partant de l’hypothèse que vraisemblablement, ils font « système ». Pour ma part, j’estime qu’ils traduisent le fait qu’il y a eu - en se référant à la théorie de l’impérialisme qui fut élaborée au sein de l’aile gauche de la Deuxième Internationale voici bientôt un siècle -, passage dans le cadre du stade impérialiste à une phase différant fortement de celle qui a prédominé entre la fin de Seconde Guerre mondiale et le début des années 80. Je désigne celui-ci pour l’instant (avec l’espoir qu’on m’aidera à en trouver un meilleur au travers de la discussion et au besoin de la polémique) du nom un peu compliqué de « régime d’accumulation mondial à dominante financière ».

La différenciation et la hiérarchisation de l’économie-monde contemporaine de dimension planétaire résultent tant des opérations du capital concentré que des rapports de domination et de dépendance politiques entre États, dont le rôle ne s’est nullement réduit, même si la configuration et les mécanismes de cette domination se sont modifiés. La genèse du régime d’accumulation mondialisé à dominante financière relève autant de la politique que de l’économie. Ce n’est que dans la vulgate néo-libérale que l’État est « extérieur » au « marché ». Le triomphe actuel du « marché » n’aurait pu se faire sans les interventions politiques répétées des instances politiques des États capitalistes les plus puissants (en premier lieu, les membres du G7). Cette liberté que le capital industriel et plus encore le capital financier se valorisant sous la forme argent, ont retrouvée pour se déployer mondialement comme ils n’avaient pu le faire depuis 1914, tient bien sûr aussi de la force qu’il a recouvrée grâce à la longue période d’accumulation ininterrompue des « trente glorieuses » (l’une sinon la plus longue de toute l’histoire du capitalisme). Mais le capital n’aurait pas pu parvenir à ses fins sans le succès de la « révolution conservatrice » de la fin de la décennie 1970.
néolibérale et des délocalisations réussies. Sauf que les salaires sont des salaires de misère, les conditions d’hygiène et de sécurité ainsi que le droit du travail ne sont pas respectés et la liberté syndicale n’existait pas avant que Sonia Jebali et Monia Dridi, deux syndicalistes courageuses et déterminées, créent ce syndicat de base et l’affilient à l’UGTT.

Les déléguées syndicales Sonia Jebali et Monia Dridi sont aussi à l’origine d’un accord sur la classification des métiers dans l’entreprise, portant sur l’organisation des promotions et des augmentations de salaires, signé entre l’UGTT et l’entreprise. Mais en octobre dernier la direction française a répondu par un lock out d’un mois, la fermeture du site, la menace de délocalisation et des violences « incontrolées » à l’encontre des syndicalistes !
Un manager français a même proféré des menaces de mort à l’encontre de Sonia Jebali (« si j’avais un flingue, je te tuerais !) ce qui dans le contexte actuel d’assassinat et de tentative d’assassinat de leaders de la gauche tunisienne par des milices à la solde du pouvoir politico-économique, prend une tournure bien réaliste et inquiétante…

Aujourd’hui, les salariées de Sea Latelec exigent l’intégration en CDI de deux collègues intérimaires sans salaire depuis 3 mois, l’application de l’accord sur les classifications et surtout, l’arrêt des menaces de délocalisation au Mexique ou… en France - une partie de la production de Latelec a en effet été relocalisée en France pour punir les Tunisiennes dans un site éloigné où… il n’y a aucun syndicat et uniquement des salariées intérimaires précaires !
La CGT FTM française a bien soutenu ces luttes à Fouchana, mais il semblerait que cette lutte ne peut pas réussir sans un soutien plus large.

Les femmes tunisiennes sont en lutte pour la justice sociale, pour le respect des droits humains et pour l’égalité !
Comme le dit un slogan de leur manif devant l’ambassade de France : «  Oui aux investissements, non au colonialisme » !!!
Nous, militant/es européen/es, ne pouvons pas rester spectatrices de cette lutte, mais devons la soutenir activement !

Monika Karbowska
Pour le comité de soutien tuniso-européen du syndicat UGTT de Sea Latelec Fouchana


Monika Karbowska

Historienne, militante féministe, internationaliste, marxiste.
CADTM France.

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