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L’annulation de la dette des pays en développement gagne du terrain au Sud comme au Nord
par Renaud Vivien , Hélene Baillot
30 septembre 2009

Depuis quelques années, les législateurs de certains pays prêteurs ont adopté des positions sur la dette des pays du Sud qui semblent aller dans le bon sens. La pression accrue exercée par des associations et des mouvements sociaux, conjuguée à l’implication croissante de parlementaires, ont, en effet, abouti à l’émergence d’un certain nombre de lois et d’initiatives parlementaires favorables aux pays en développement. Parallèlement, des pays du Sud se saisissent de plus en plus de l’audit de la dette. Rappelons que cet instrument permet d’identifier toutes les dettes illégitimes et donc de fonder leur nullité.
Cet article se propose de fournir un aperçu des avancées récentes, réalisées depuis 2000, dans le domaine de la lutte pour l’annulation de la dette, que ce soit du côté des pays prêteurs ou du côté des pays emprunteurs.

I Les pays prêteurs

AU NORD

ITALIE

En 2000 : le parlement vote une loi intitulée « Mesures de réduction de la dette externe des pays pauvres très endettés » [1]

Les pays initialement concernés sont de trois types :

- Les pays admis à l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE) [2]

- Les pays éligibles aux prêts concessionnels de l’Association internationale de développement (AID), une branche du groupe Banque mondiale, soit une soixantaine de pays considérés comme les plus pauvres [3]

- Ceux répondant à certains critères définis par le Club de Paris, comme ceux ayant souffert de catastrophes naturelles.

Cette loi distingue différents types d’allègement de dettes : réduction de dette à l’initiative du prêteur, renégociations de dettes à travers des accords bilatéraux, conversions de dettes dans des programmes de développement [4]. En termes de conditionnalités, cette loi se réfère aux normes internationales et met l’accent sur l’agriculture, la santé, l’éducation, et les services publics. Elle prévoit également la possibilité de rompre les négociations en cas de non respect des droits humains. Concernant le suivi et l’examen par le parlement, la loi oblige le Ministre de l’économie et des finances à présenter l’état de la question, une fois par an devant le parlement : les pays bénéficiaires, les montants concernés, les dates, les périodes et les taux d’intérêts, les projets d’investissement approuvés.
Cette loi dispose en son article 7 (Règles internationales régissant la dette extérieure) que le gouvernement, dans le domaine des institutions internationales compétentes, propose d’engager les démarches nécessaires pour solliciter l’avis de la Cour internationale de justice sur la cohérence entre les règles internationales régissant la dette extérieure des pays en développement et le cadre des principes généraux du droit et des droits de l’homme et des peuples.
Le test définitif du Règlement d’exécution de la loi 209 sur la dette a été signé le 4 avril 2001 par le Ministre du Trésor de Giuliano Amato. Mais l’arrivée au pouvoir de Silvio Berlusconi, entré en fonction au mois de juin 2001, a freiné l’application e cette loi. Si 3 des 4 milliards de créances détenues envers les PPTE ont été annulés, les annulations de dettes ont été réalisées le plus souvent par l’intermédiaire de reconversions de dette. Dans de nombreux cas, les ONG ont été très faiblement impliquées, les reconversions bénéficiant essentiellement aux sociétés italiennes comme ce fut le cas au Pérou [5].

ESPAGNE

En 2006 : le parlement espagnol vote la « Ley reguladora de la gestión de la deuda externa » [6]. Cette loi concerne les pays pauvres très endettés (PPTE) avec une priorité accordée aux pays identifiés comme appartenant au champ de la coopération espagnole. D’autres pays peuvent être admis en cas de catastrophes naturelles ou humanitaires.
Les principaux points de cette loi portent sur les restructurations, les moratoires, les annulations et les conversions de dettes en faveur de programme de réduction de la pauvreté.
La loi est basée essentiellement sur des considérations économiques et s’inscrit dans la lignée des pratiques actuellement en place dans le système international en matière de gestion de la dette. Il est également fait mention de la nécessité des efforts en matière de lutte contre la pauvreté, de processus de démocratisation, de respect des droits humains, de croissance économique soutenable, de développement humain et social, de conservation de l’environnement comme des conditions majeures pour bénéficier des allègements de dette. Par ailleurs et comme pour l’Italie, la loi insiste sur l’importance de l’implication du parlement, de la participation de la société civile et de la transparence.
Mais, dans ce cas encore, le gouvernement espagnol se montre peu coopératif et ne fournit aux membres du parlement que le strict minimum d’informations [7].

Ces deux lois sont certes insuffisantes : limitées à certains pays, elles ne promeuvent pas d’annulation inconditionnelle et totale des créances et visent à satisfaire avant tout l’intérêt des prêteurs. Néanmoins l’obligation de rendre des comptes devant les parlementaires marque une avancée importante. Ces lois constituent aujourd’hui des supports sur lesquels les militants du Nord comme du Sud peuvent s’appuyer.

ETATS-UNIS

En mars 2003, les Etats-Unis, pressés de rendre solvable la nouvelle autorité irakienne pour financer la reconstruction, brandissent la doctrine de la dette odieuse. Ils demandent l’annulation totale de la dette irakienne au motif que, selon le Secrétaire au Trésor John Snow, « le peuple irakien ne doit pas être accablé par des dettes contractées par le régime du dictateur déchu ».
Mais, craignant de créer un précédent, ils obtiennent du Club de Paris, en novembre 2004, une annulation de 80 % de la dette irakienne, évitant que soit fait référence à son caractère odieux.

BELGIQUE

Le 29 mars 2007, le sénat belge vote une résolution sur l’ « annulation de dettes des pays les moins avancés » [8].
Cette résolution est importante à plusieurs égards : elle mentionne explicitement les termes de « dette odieuse » tels que formulés dans la doctrine de Sack [9] et appelle à l’élaboration d’une définition claire de ce concept au niveau international et à sa reconnaissance par l’ONU, la Banque mondiale et le FMI. Elle encourage également la mise en place d’audits de la dette pour les pays en développement qui ne sont classés ni PMA (pays moins avancés) ni PPTE afin d’en déterminer les parts odieuses et de les annuler. Concernant les PMA et les PPTE, la résolution demande à ce qu’un moratoire sur les créances envers ces pays soit immédiatement instauré. Elle met aussi en avant la nécessité de rendre publique la valeur réelle des dettes et de revoir les critères définissant la soutenabilité d’une dette en prenant en compte les aspects sociaux afin de garantir la réalisation des OMD (Objectifs du Millénaire pour le développement). Elle demande également la mise en place d’un processus de médiation dans lequel les décisions et les règles ne seraient plus déterminées par les seuls prêteurs. Enfin, il est demandé que le gouvernement présente chaque année un rapport devant le parlement sur ses activités en matière de remises de dette et sur les positions défendues auprès de la Banque mondiale et du FMI.
Cette résolution n’est toujours pas mise en pratique par le gouvernement car la coalition des partis politiques qui a permis l’adoption de ce texte législatif au Sénat est différente de la coalition gouvernementale [10]. En effet, le parti libéral qui est au gouvernement belge, n’a pas voté en faveur de ce texte législatif. En outre, le ministre de la Coopération au développement et le ministres de l’Economie et des Finances sont issus du parti libéral. Les réponses de ce dernier aux interpellations réalisées par les parlementaires, sur impulsion du CADTM Belgique, démontrent l’absence totale de volonté du gouvernement d’appliquer ce texte et de remettre en cause l’initiative PPTE. Les actes posés par le gouvernement belge consistent toujours en des allègements de dettes au titre de l’initiative PPTE, des rééchelonnements ou des conversions de dettes.

Sur un autre registre, en janvier 2008, la Belgique ouvre la voie en se dotant d’une loi destinée à lutter contre les fonds vautours. Les fonds vautours sont des fonds d’investissement privés qui extorquent en toute légalité des ressources financières vitales pour le développement des pays du Sud. Leur méthode est de racheter à très bas prix, sur le marché secondaire de la dette, des dettes de pays en développement à leur insu pour ensuite les contraindre par voie judiciaire à les rembourser au prix fort, c’est à dire le montant initial des dettes, augmenté d’intérêts, de pénalités et de divers frais de justice [11]. Selon cette loi : «  Les sommes et les biens destinés à la coopération internationale belge ainsi que les sommes et les biens destinés à l’aide publique belge au développement – autres que ceux relevant de la coopération internationale belge – sont insaisissables et incessibles » [12].

 
NORVEGE

Le 2 octobre 2006, au cours d’une conférence de presse donnée à Oslo, le Ministre norvégien du Développement International, Erik Solheim, annonce l’annulation unilatérale et sans conditions des dettes des 5 pays suivants : Equateur, Egypte, Jamaïque, Pérou et Sierra Leone, reconnaissant de fait la part de responsabilité de la Norvège dans leur endettement illégitime. Ces annulations, non comptabilisées dans l’APD (aide publique au développement), représentent un montant d’environ 80 millions de dollars. Cette décision est motivée par le fait que le projet de développement sur lequel se fondaient les demandes de remboursement de la Norvège, à savoir la Campagne d’Exportation de Navires qui avait eu lieu à la fin des années 70, s’était avéré être un échec : « Cette campagne représente un véritable fiasco de nos politiques de développement. En tant que pays créancier, la Norvège a sa part de responsabilité dans les dettes qui s’en sont suivies. En renonçant à ces créances, la
Norvège reconnaît sa responsabilité et permet à ces cinq pays de mettre un terme définitif aux paiements restants de leurs dettes
 » [13].
Pour la première fois dans l’histoire, un pays prêteur, admet être responsable de politiques de prêt inadéquates, et prend les mesures qui s’imposent. Cette décision vient rompre avec le consensus tacite aujourd’hui en vigueur au sein du Club de Paris [14]. La démarche de la Norvège représente donc un pas en avant décisif vers la reconnaissance de la responsabilité des prêteurs dans le processus d’endettement légitime.

AU SUD

AFRIQUE DU SUD

En 1996, l’Afrique du Sud consent à annuler la dette de la Namibie à son égard pour un montant d’un milliards de rands, mettant ainsi en application la doctrine de la dette odieuse. En effet, la Namibie avait emprunté de l’argent à l’Afrique du Sud, alors qu’elle était occupée illégalement par l’Etat de l’Apartheid [15].

BRESIL

En 2004, le Président du Brésil, Lula da Silva, prend la décision d’annuler la dette du Mozambique. En visite dans le pays, il évoque les millions d’esclaves amenés au Brésil entre le XVIe et le XIX e siècle et déclare : « C’est grâce au travail, à la sueur et au sang des Africains que la société brésilienne a vu le jour ». Ce n’est pas l’Afrique qui a une dette envers le Brésil mais bien le Brésil qui « a une dette envers l’Afrique » [16].

II Les pays emprunteurs

Plusieurs gouvernements, dans l’histoire, ont refusé de payer une dette héritée du régime illégitime qui les précédait, arguant que cette dette n’engageait que le régime en question, non l’Etat. Ainsi, la doctrine de la dette odieuse est une des exceptions juridiques au principe de continuité de l’Etat. Selon ce principe de continuité (Pacta sunt servanda) régissant les relations internationales, un Etat est tenu, en principe, d’honorer les engagements et de payer la dette héritée du gouvernement précédent [17]. Bien que la doctrine de la dette odieuse n’ait pas valeur de loi, elle détient une valeur juridique indéniable. Elle constitue une source du droit international public en vertu de l’article 38 de la Cour Internationale de Justice (CIJ). De plus, les principes généraux du droit qui la fondent et ses nombreuses applications dans l’histoire renforcent sa valeur juridique.

ARGENTINE

En 1982, à la chute de la dictature militaire en Argentine, le journaliste Alejandro Olmos porte plainte à titre personnel contre la dictature pour la dette accumulée. Un juge fédéral, J. Ballesteros, conduit entre 1982 et 2000 un des premiers audits judiciaires de la dette, qui aboutit à la « Sentence Olmos » [18]. Celle-ci démontre et définit le caractère illégitime de la dette et la responsabilité des prêteurs.
Jusqu’à ce jour, aucun des gouvernements successifs ne s’est appuyé sur cette sentence pour dénoncer la dette odieuse du pays [19]. Il appartient encore aux parlementaires de se réunir et de donner suite à cette sentence.

PEROU

En 2001, la Commission Valencia Dongo - du nom du parlementaire qui en était responsable – a été chargée d’étudier la renégociation de la dette du pays sous la présidence d’Alberto Fujimori, entre 1990 et 2000. Entre 2001 et 2002, cette commission a examiné la légalité de la dette ainsi que l’utilisation finale des fonds reçus. Les conclusions sont accablantes. Des actes criminels et de corruption au sein du gouvernement, impliquant également de puissants groupes économiques, ont été exposés au grand jour. La Commission a, en outre, conclu que près de 6,8 milliards de dollars de dette avaient été frauduleusement négociés. Ses rapports furent envoyés au ministère public, mais il n’y a pas eu de suite [20].

BRESIL

En 2003 est créé le Front parlementaire et social d’accompagnement de la dette publique. Celui demande dès 2005, avec le soutien de 240 parlementaires, que soit mise en place une Commission parlementaire mixte d’enquête afin de réaliser l’audit des dettes interne et externe.
En décembre 2008, une commission parlementaire d’enquête sur la dette publique (Comissão Parlamentar de Inquérito da Dívida Pública / CPI) a été instaurée suite à l’adoption d’une loi concrétisant une disposition de la Constitution de 1988 [21] qui prévoit l’audit de la dette [22]. La mise en place d’un audit officiel est donc le résultat du travail crucial du Front parlementaire et social d’accompagnement de la dette publique et de la mobilisation citoyenne.
Les travaux de la CPI ont débuté officiellement le 19 août 2009 et les réunions se déroulent sur une base hebdomadaire. Lors de la réunion du 2 septembre 2009, le rapporteur de la Commission a présenté une proposition de plan de travail en quatre points : un relatif à la dette publique fédérale dont les données sont détenues par les autorités de la Banque centrale ; un autre relatif aux dettes des entités fédérées avec la convocation des secrétaires d’Etat au Trésor ; un troisième relatif à celles des municipalités et enfin le fait qu’il sera fait appel à des spécialistes [23].L’audit portera sur les dettes publiques internes et externes contractées par ces différents acteurs entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2009.

PHILIPPINES

En septembre 2004, le parlement élabore une résolution sur l’audit de la dette. Une commission parlementaire est créée afin d’étudier les livres de comptes et d’évaluer les politiques en matière d’endettement. Parallèlement, est mené un audit citoyen de la dette, faisant des Philippines, le cas le plus abouti de collaboration entre Parlement et mouvements sociaux.
Aujourd’hui, la résolution est bloquée au Sénat mais l’organisation philippine Freedom from Debt Coalition continue son travail de lobbying [24].

NIGERIA

Alors que le prix élevé du pétrole met le Nigeria en position de force face à ses créanciers et que l’attitude ferme de l’Argentine lui montre qu’on peut suspendre unilatéralement le remboursement de la dette, le parlement nigérian vote le 9 mars 2005 une résolution demandant la répudiation de la dette, largement héritée de la junte militaire.
Le Président Obasanjo préfère négocier avec le Club de Paris, en octobre 2005, dont il obtient une réduction de 60 % de la dette nigériane en contrepartie d’un remboursement anticipé, sans aucune mention du concept de dette odieuse.

PARAGUAY

Le 26 août 2005, le gouvernement du Paraguay promulgue un décret notifiant que le pays ne paiera pas la dette contractée auprès de banques suisses.
L’affaire remonte aux années 1986-1987, lorsque le Consul du Paraguay à Genève, Gustavo Gramont, contracte au nom du gouvernement paraguayen (la dictature de Stroessner) une dette de 85 millions de dollars auprès d’une banque genevoise, l’Overland Trust Bank. Cette dernière sait pertinemment que le consul n’a aucun pouvoir légal pour contracter ce prêt mais le lui accorde pourtant. Dans les années 1990, l’Overland Trust Bank vend les titres de cette dette à 9 autres banques privées, qui en 1995 en réclament le remboursement. Le Paraguay refusant de payer, l’affaire est portée devant les juges suisses qui donnent raison aux banques. Le 26 août 2005, par le biais du décret 6295, le Paraguay prend la décision de répudier la dette litigieuse.
Peu de temps auparavant, le Président avait déclaré devant l’assemblée des Nations-Unies que : « Cette dette frauduleuse a été contractée par les membres d’une dictature corrompue qui, en connivence avec un groupe de banquiers internationaux, prétendent nous dépouiller de ce dont nous avons besoin d’urgence pour la paix sociale de notre pays » [25]. L’acte de répudiation a été communiqué officiellement par voie diplomatique au gouvernement suisse pour consolider les droits de l’Etat paraguayen.
Il convient de rappeler que l’acte de répudiation de dette est un acte unilatéral, reconnu par le droit international [26]. Cela fait aujourd’hui 13 ans que le Paraguay refuse de payer et aucune sanction ne lui a été appliquée.

EQUATEUR

En 2007, l’Equateur met en place un audit gouvernemental de sa dette publique -interne et externe. L’objectif est de réaliser une analyse critique de la dette et de réunir les informations nécessaires afin de statuer sur son caractère légitime ou illégitime.
Après 14 mois d’enquête, la majorité de la Commission a proposé au gouvernement de recourir à un acte souverain d’annulation de la dette commerciale externe et d’une partie importante de la dette multilatérale et bilatérale, de traduire en justice les responsables équatoriens de l’endettement illégitime et frauduleux et de faire un procès aux banques nord-américaines à New York pour le rôle néfaste qu’elles ont joué dans l’endettement du pays [27].
Au 11 juin dernier, pas moins de 91% des détenteurs de ces bons ont accepté la proposition équatorienne de reconnaître tout au plus 30 à 35% de sa valeur nominale [28]. Rafael Correa a déclaré lors de son discours d’investiture le 10 août 2009 que
cela « signifie un gain de plus de 300 millions de dollars annuels
durant les prochaines vingt années, sommes qui serviront non aux
portefeuilles des créanciers mais au développement national » [29].

Toutes ces mesures, pour insuffisantes qu’elles soient, marquent des avancées non négligeables qui peuvent être utilisées par les mouvements sociaux du Sud et du Nord pour exiger l’annulation totale et inconditionnelle de la dette.
Cette dernière est, rappelons-le, une nécessité, tant les sommes consacrées au remboursement entravent les droits économiques, sociaux, et culturels des populations. Revendiquer l’annulation de la dette n’est d’ailleurs pas le fait des seuls pays emprunteurs, comme nous venons de le voir. La pression est telle que la Banque mondiale ne peut plus ignorer l’existence de la doctrine de la dette odieuse, bien qu’elle tente de la discréditer complètement [30]. M. Cephas Lumina, l’expert de l’ONU sur la dette externe, travaille actuellement en collaboration avec la CNUCED sur l’élaboration d’une définition juridique claire de la dette illégitime. Conscient des conséquences désastreuses du remboursement de la dette sur nombre de populations vulnérables, il encourage tous les Etats à mener l’audit de la dette [31].
Si ce discours est encourageant, il convient de rappeler que le rapport que M. Cephas Lumina remettra à l’assemblée des Nations-Unies en 2010 n’aura aucune valeur contraignante.
« C’est pourquoi, dit-il, il faudra un large soutien des citoyens au Nord et au Sud et une pression populaire sur les gouvernements » [32].


Notes :

[1Loi n° 209, 25 juillet 2000 , « Iniziative per la riduzione del debito estero dei PVS », sur le site http://www.parlamento.it.

[2L’initiative PPTE a été lance en 1996 par le FMI et la Banque mondiale dans l’objectif d’alléger la dette multilatérale de 41 pays, jugés “pauvres et très endettés”. Pour plus d’infos : http://www.cadtm.org/spip.php?mot21&lang=fr

[3Toutefois, certains pays émergents comme l’Inde et la Chine bénéficient également de prêts AID

[4Par une opération de conversion, un pays créancier convertit une dette en sa valeur nominale et, en contrepartie, un débiteur investit une partie de ce montant dans des projets de développement conformément à diverses modalités préalablement négociées entre les deux parties.

[5Marta Ruiz, Parliamentary activity on debt : a growing challenge, an assessment on debt laws and other parliamentary actions in Europe on debt policies, juin 2007 in www.eurodad.org

[6Loi 38/2006, 7 décembre 2006, sur http://www.senado.es/otrasdis/legislac/normas/LEY3806.html

[7Ibid.

[8Le texte intégral de la résolution est sur www.cadtm.org/IMG/pdf/070327Senat.pdf

[9« Si un pouvoir despotique contracte une dette non pas pour les besoins et dans les intérêts de l’État, mais pour fortifier son régime despotique, pour réprimer la population qui le combat, etc., cette dette est odieuse pour la population de l’Etat entier (…). Cette dette n’est pas obligatoire pour la nation ; c’est une dette de régime, dette personnelle du pouvoir qui l’a contractée, par conséquent elle tombe avec la chute de ce pouvoir  » dans Alexander Sack, Les Effets des Transformations des Etats sur leurs dettes publiques et autres obligations financières, 1927

[10La coalition ayant permis l’adoption de la résolution était composée des partis politiques suivants : PS, SP.A, ECOLO/GROEN, CDH et CD&V tandis que la coalition gouvernementale réunissait PS, MR, CDH, CD&V, VLD et SP.A qui a quitté le gouvernement en 2007. ECOLO/GROEN est dans l’opposition. En 2009, ECOLO/GROEN est toujours dans l’opposition avec SP.A.

[11R. Vivien, G. Denis, « Fonds vautours : l’Afrique riposte ? », 10 août 2009 sur http://www.cadtm.org/Fonds-vautours-l-Afrique-riposte

[12www.senate.be (doc. nº 4-482/4)

[13Propos d’Eric Solheim, cités par Kjetil G. Abildsnes, Pourquoi la Norvège Prend Ses Responsabilités de Créancier – L’Affaire de la Campagne d’Exportation de Navires ,mars 2007 in www.dette2000.org

[14Groupement informel d’Etats créanciers chargé de renégocier la dette publique bilatérale des pays du Sud en difficulté de paiement. Créé en 1956, il comprend 19 Etats (Allemagne, Australie, Autriche, Belgique, Canada, Danemark, Espagne, Etats-Unis, Finlande, France, Irlande, Italie, Japon, Norvège, Pays-Bas, Royaume-Uni, Russie, Suède et Suisse), qui se réunissent 10 à 11 fois par an à Paris. Il n’a ni existence légale, ni statuts (il se définit lui-même comme une « non-institution ») mais entretient des liens étroits avec le FMI.

[15Jeff Rudin, « L’Afrique du Sud ou la dette de l’Apartheid », 2002, sur http://www.cadtm.org/L-Afrique-du-Sud-ou-la-dette-de-l

[16Ernest Harsch, « Le Brésil s’acquitte de sa dette envers l’Afrique », Afrique Relance, janvier 2004 sur http://www.un.org/french/ecosocdev/geninfo/afrec/vol17no4/174brazilfr.htm

[17« Peut-on annuler les dettes odieuses ? », sur www.dette2000.org

[18Cas n° 14 467, jugé en cours criminelle et correctionnelle fédérale, le 23 juillet 2000. Le texte complet de la sentence est disponible, en espagnol, sur le site www.cadtm.org

[19Eric Toussaint, Hugo Ruiz Diaz, « L’audit de la dette : un instrument dont les mouvements sociaux devraient se saisir », 18 juillet 2004 sur www.lagauche.com

[20Entretien avec Gay Hurley, « Pérou, trop riche pour payer ses dettes », sur www.sosfaim.be

[21L’article 26 de l’Acte sur les dispositions transitoires de la Constitution de 1988 dispose que : « Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente Constitution, le Congrès de la Nation promouvra à travers une commission mixte, l’analyse et l’expertise des actes et faits générateurs de l’endettement ». Il précise que cette commission aura le caractère légal de commission d’enquête parlementaire associée à la Cour des comptes, et qu’en « cas d’irrégularité le Congrès émettra une déclaration de nullité et transmettra au Ministère public » cette commission aura le caractère légal de commission d’enquête parlementaire associée à la Cour des comptes, et qu’en « cas d’irrégularité le Congrès émettra une déclaration de nullité et transmettra au Ministère public ».

[22Virginie de Romanet, « Brésil : la commission d’enquête parlementaire sur la dette. Vers un audit officiel ? », 6 juin 2009, sur www.cadtm.org

[23Virginie de Romanet, « La Commission d’enquête parlementaire sur la dette, le 19 août 2009, journée historique pour le Brésil », 14 septembre 2009, sur www.cadtm.org

[24Ouvrage collectif, Menons l’enquête sur la dette. Manuel pour des audits de la dette du Tiers-Monde, octobre 2006, p. 19

[25Propos tenus le 3 octobre 2005, cités par Hugo Ruiz Diaz Balbuena, « La décision souveraine de déclarer la nullité de la dette », 8 septembre 2008 sur http://www.cadtm.org/spip.php ?page=imprimer&id_article=3658

[26Hugo Ruiz Diaz Balbuena, ibid.

[27Les conclusions de la CAIC sont accessibles en espagnol, format PDF à partir du site du CADTM à la page : http://www.cadtm.org/spip.php?article3902

[28Maria Lucia Fattorelli, Rodrigo Vieira de Ávila , Un premier résultat de l’audit de la dette par l’Equateur, 30 juillet 2009, sur http://www.cadtm.org/Un-premier-resultat-de-l-audit-de

[31Renaud Vivien, entretien avec l’expert de l’ONU sur la dette externe, 16 juin 2009, sur www.cadtm.org/spip.php?article4483

[32Ibid

Renaud Vivien

membre du CADTM Belgique, juriste en droit international. Il est membre de la Commission pour la Vérité sur la dette publique de la Grèce créée le 4 avril 2015. Il est également chargé de plaidoyer à Entraide et Fraternité.

Hélene Baillot

Stagière au CADTM en 2009