Accord de paix RDC-Rwanda, les populations oubliées

29 juillet par Paul Martial


Source : MONUSCO Photos, Flickr, CC, https://www.flickr.com/photos/monusco/

L’accord de paix entre la RDC et le Rwanda sous l’égide des États-Unis est globalement défavorable à la partie congolaise et reste fragile.



Après avoir laissé pendant des années la Chine exploiter le sous-sol africain, les États-Unis changent leur politique. D’autant que lors du bras de fer sur les taxes douanières entre les deux pays, la Chine avait menacé d’embargo les exportations de minerais rares essentiels pour l’industrie étatsunienne.

 Un accord perdant-gagnant

La médiation des États-Unis pour un accord de paix entre la RDC et le Rwanda entre dans ce cadre. Le président congolais Tshisekedi, dans l’incapacité de riposter aux attaques du M23 soutenu massivement par l’armée rwandaise, avait proposé à Trump la sécurisation du pays contre l’exploitation de ses nombreuses richesses minérales. Ce dernier avait saisi la balle au bond et proposait un accord de paix entre les deux pays mettant fin à un conflit de plus de trente ans.

Si l’accord signé le 27 juin réaffirme le principe de souveraineté de la RDC, le départ de l’armée rwandaise du sol congolais est conditionné au démantèlement des FDLR, un groupe armé issu des génocidaires hutus qui se sont réfugiés en RDC dans le cadre de l’opération militaire française « Turquoise » menée au Rwanda en 1994.

Cette exigence sera difficile à remplir pour les forces armées de RDC qui par le passé ont tissé des liens avec cette milice. De plus, une bonne partie de l’implantation des FDLR se trouve sur des territoires occupés par le M23. Enfin, une stratégie possible des FDLR serait d’intégrer ses hommes dans les nombreuses milices armées qui existent dans le pays.

La partie économique prévoit que les entreprises étatsuniennes pourront exploiter le sous-sol de la RDC et que les minerais seront traités par le Rwanda et exportés vers les USA en utilisant le corridor de Lobito, une infrastructure ferroviaire et routière qui débouche sur l’océan Atlantique, faisant concurrence aux exportations chinoises.

 En attendant Doha

Dans cet accord, l’essentiel de la plus-value Plus-value La plus-value est la différence entre la valeur nouvellement produite par la force de travail et la valeur propre de cette force de travail, c’est-à-dire la différence entre la valeur nouvellement produite par le travailleur ou la travailleuse et les coûts de reproduction de la force de travail.
La plus-value, c’est-à-dire la somme totale des revenus de la classe possédante (profits + intérêts + rente foncière) est donc une déduction (un résidu) du produit social, une fois assurée la reproduction de la force de travail, une fois couverts ses frais d’entretien. Elle n’est donc rien d’autre que la forme monétaire du surproduit social, qui constitue la part des classes possédantes dans la répartition du produit social de toute société de classe : les revenus des maîtres d’esclaves dans une société esclavagiste ; la rente foncière féodale dans une société féodale ; le tribut dans le mode de production tributaire, etc.

Le salarié et la salariée, le prolétaire et la prolétaire, ne vendent pas « du travail », mais leur force de travail, leur capacité de production. C’est cette force de travail que la société bourgeoise transforme en marchandise. Elle a donc sa valeur propre, donnée objective comme la valeur de toute autre marchandise : ses propres coûts de production, ses propres frais de reproduction. Comme toute marchandise, elle a une utilité (valeur d’usage) pour son acheteur, utilité qui est la pré-condition de sa vente, mais qui ne détermine point le prix (la valeur) de la marchandise vendue.

Or l’utilité, la valeur d’usage, de la force de travail pour son acheteur, le capitaliste, c’est justement celle de produire de la valeur, puisque, par définition, tout travail en société marchande ajoute de la valeur à la valeur des machines et des matières premières auxquelles il s’applique. Tout salarié produit donc de la « valeur ajoutée ». Mais comme le capitaliste paye un salaire à l’ouvrier et à l’ouvrière - le salaire qui représente le coût de reproduction de la force de travail -, il n’achètera cette force de travail que si « la valeur ajoutée » par l’ouvrier ou l’ouvrière dépasse la valeur de la force de travail elle-même. Cette fraction de la valeur nouvellement produite par le salarié, Marx l’appelle plus-value.

La découverte de la plus-value comme catégorie fondamentale de la société bourgeoise et de son mode de production, ainsi que l’explication de sa nature (résultat du surtravail, du travail non compensé, non rémunéré, fourni par le salarié) et de ses origines (obligation économique pour le ou la prolétaire de vendre sa force de travail comme marchandise au capitaliste) représente l’apport principal de Marx à la science économique et aux sciences sociales en général. Mais elle constitue elle-même l’application de la théorie perfectionnée de la valeur-travail d’Adam Smith et de David Ricardo au cas spécifique d’une marchandise particulière, la force de travail (Mandel, 1986, p. 14).
dans la région profiterait au Rwanda, la RDC serait cantonnée à un réservoir de ressources naturelles. Ce qui ne changerait pas vraiment de la situation actuelle, sauf que les transferts illicites des minerais congolais vers le Rwanda seraient officialisés.

Beaucoup d’observateurs soulignent l’absence de compensation pour les populations victimes de la guerre déclenchée par le Rwanda, pour les centaines de milliers de personnes déplacées, les violences subies, les pillages de maisons ou les destructions des villages. Un accord qui entérine aussi l’impunité pour les chefs de guerre.

Sur le terrain, les conflits continuent car la cessation des conflits est conditionnée à un autre accord, celui de Doha entre les autorités de la RDC et la milice M23. Cette dernière a ses propres exigences en termes d’intégration de ses forces dans l’armée nationale et de sécurisation de ses activités économiques et propriétés foncières.

La question est aussi de savoir si les entreprises étatsuniennes investiront dans un environnement qui reste instable et peu sécurisé.


Paul Martial

est animateur d’Afriques en Lutte, membre de la QI en France.