Grèce

Au moment où la Troïka et la Grèce clôturent leurs négociations à Paris, le CADTM exige l’annulation pure et simple de la dette odieuse à l’égard de la Troïka

Communiqué de presse

5 septembre 2014 par CADTM


La Troïka, composée des représentants du Fonds monétaire international (FMI), de la Banque centrale européenne (BCE) et de la Commission européenne, a mené pour la première fois du 2 au 4 septembre des négociations avec le gouvernement grec à l’extérieur du pays. Lieu choisi : Paris, plus précisément le siège de la très libérale Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), au château de la Muette.



À croire que ces négociateurs craignent les manifestations du peuple grec qui subit depuis 2010 une cure d’austérité sans précédent et qui lutte pour sa dignité à l’image des 595 femmes de ménage du ministère des finance, licenciées abusivement et devenues le symbole de la résistance à la Troïka. Une journée internationale de mobilisation de soutien à ces 595 femmes est d’ailleurs prévue le 20 septembre prochain.

Ces négociations, qui se sont déroulées au moment où le gouvernement Valls renforce lui aussi l’austérité, représentent pour la Troïka « une évaluation de routine » des réformes en cours qui permettra, « dans le meilleur des cas » de débloquer l’ultime tranche de prêt de l’Union européenne (UE) d’environ 2 milliards d’euros à condition que le gouvernement applique de nouvelles mesures d’austérité.

Or, la cure d’austérité qui est imposée depuis quatre ans pour (officiellement) réduire une dette Dette Dette multilatérale : Dette qui est due à la Banque mondiale, au FMI, aux banques de développement régionales comme la Banque africaine de développement, et à d’autres institutions multilatérales comme le Fonds européen de développement.
Dette privée : Emprunts contractés par des emprunteurs privés quel que soit le prêteur.
Dette publique : Ensemble des emprunts contractés par des emprunteurs publics.
 insoutenable, aggrave en réalité le poids de celle-ci et enfonce les Grecs dans la misère. Ces mesures d’une violence inouïe sont imposées en échange de prêts de la Troïka. Depuis 2010, cette dernière a déjà endetté le pays à hauteur de 240 milliards d’euros et c’est sans compter les intérêts que le peuple devra en plus rembourser en se saignant aux quatre veines.

Sur injonction de la Troïka, le gouvernement grec s’est engagé à licencier 6500 fonctionnaires d’ici la fin de l’année 2014 alors qu’environ 20 000 agents ont déjà été mis au chômage via la fusion ou la suppression d’organismes publics. Et ce n’est pas fini. Selon le quotidien grec Kathimerini, 600 nouvelles mesures doivent encore être adoptées. L’une d’elles pourrait bientôt permettre aux employeurs de licencier librement sans justification. Une autre mesure que la Troïka veut mettre en place pour aider les banques grecques ployant sous 70 milliards d’euros de créances Créances Créances : Somme d’argent qu’une personne (le créancier) a le droit d’exiger d’une autre personne (le débiteur). douteuses est de leur permettre de saisir les biens immobiliers dans le cas de crédits non payés.

Pendant ce temps, et malgré la mascarade du plan d’allègement intervenu en 2012, la dette publique poursuit son ascension. Celle-ci s’élève aujourd’hui à 175,1% du PIB PIB
Produit intérieur brut
Le PIB traduit la richesse totale produite sur un territoire donné, estimée par la somme des valeurs ajoutées.
Le Produit intérieur brut est un agrégat économique qui mesure la production totale sur un territoire donné, estimée par la somme des valeurs ajoutées. Cette mesure est notoirement incomplète ; elle ne tient pas compte, par exemple, de toutes les activités qui ne font pas l’objet d’un échange marchand. On appelle croissance économique la variation du PIB d’une période à l’autre.
(318 milliards d’euros) contre 129,7% du PIB en 2009 avant l’arrivée de la Troïka.

La politique dictée par ses créanciers au gouvernement grec complice conduit logiquement au délabrement de la société toute entière, au chômage de masse qui stagne à 27 % de la population active (celui des jeunes a triplé depuis 2008) et à une profonde récession Récession Croissance négative de l’activité économique dans un pays ou une branche pendant au moins deux trimestres consécutifs. .
La réunion de Paris, comme chacune des missions précédentes de la Troïka, n’améliorera en rien les conditions de vie de la population. Les seuls bénéficiaires de la gestion de la crise sont les grandes entreprises multinationales et nationales qui profitent des privatisations et de la baisse des salaires et les quelques oligarques à leurs services.

Les recettes tirées des privatisations (réseau de télécoms – OTE, office des paris sportifs- OPAP, loteries nationales, compagnie de gaz, la compagnie des eaux de Thessalonique, les ports du Pirée et de Thessalonique, des aéroports régionaux, etc.) partent aussitôt en remboursement de la dette. De même, chaque prêt de la Troïka repart en grande partie en remboursement des dettes antérieures.

Le CADTM condamne l’ingérence de la Troïka qui viole la souveraineté du peuple grec, et exige l’annulation pure et simple de toutes les dettes odieuses, illégales et illégitimes de la Grèce. Le peuple grec rembourse depuis trop longtemps cette dette imposée par l’UE et le FMI FMI
Fonds monétaire international
Le FMI a été créé en 1944 à Bretton Woods (avec la Banque mondiale, son institution jumelle). Son but était de stabiliser le système financier international en réglementant la circulation des capitaux.

À ce jour, 190 pays en sont membres (les mêmes qu’à la Banque mondiale).

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pour l’asservir.
Pour de nombreux Grecs précarisés, affamés, en situation de survie, au bord du suicide ou sur le chemin de l’exode, les dommages sont irréversibles.

Plusieurs rapports officiels publiés en 2013 et 2014, dont celui du Commissaire européen aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe [1], de l’Expert de l’ONU sur la dette ou encore l’opinion juridique du professeur de droit Andreas Fischer-Lescano commissionnée par la Chambre de travail de Vienne [2], démontrent avec précision que la Troïka a violé une série de droits humains protégés par les textes internationaux.

Il est temps de poursuivre en justice la Troïka et d’exiger des réparations pour les dégâts humains et écologiques.

Enfin, le CADTM exige que soient rendues publiques les dépenses de cette fastueuse rencontre aux frais des contribuables.


Notes

[1Rapport « Safegarding human rights in time of economic crises », publié le 3 décembre 2013

[2Rapport « Human Rights in Times of Austerity Policy », publié le 17 février 2014

Traduction(s)