Construire ou reconstruire Haïti ?

12 septembre 2010 par Sophie Perchellet




Partie 1 : Haïti sous ajustement structurel

L’année 1986 est considérée comme un tournant politico-économique du pays. Elle est marquée à la fois par la chute de la dictature des Duvalier, mais aussi par le début de l’ère néolibérale imposée au forceps par les puissances dominantes et les IFI (institutions financières internationales). En Haïti, des élections démocratiques sont organisées, suite à l’exil de Duvalier, et le peuple choisit de placer Jean-Bertrand Aristide à la présidence le 16 décembre 1990 avec 67,48% des voix. Son adversaire, Marc Bazin, est un ancien haut fonctionnaire de la Banque mondiale Banque mondiale
BM
La Banque mondiale regroupe deux organisations, la BIRD (Banque internationale pour la reconstruction et le développement) et l’AID (Association internationale de développement). La Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD) a été créée en juillet 1944 à Bretton Woods (États-Unis), à l’initiative de 45 pays réunis pour la première Conférence monétaire et financière des Nations unies.

En 2022, 189 pays en sont membres.

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, ancien ministre des Finances sous Duvalier. Bien qu’il soit ardemment soutenu par les Etats-Unis, il est défait. Aristide est investi le 7 février 1991 et René Préval est nommé Premier ministre.

Le nouveau président est né le 15 juillet 1953, dans le sud d’Haïti. Cet ancien prêtre catholique est la personne qui centralise tous les espoirs des classes populaires haïtiennes. Des puissances étrangères appréhendent les conséquences de ces élections pour leurs intérêts. Les États-Unis sont particulièrement inquiets et, comme souvent quand leurs « intérêts stratégiques » sont menacés, des mesures radicales sont mises en place : ils appuient un coup d’État pour contrer la démarche d’Aristide. Seulement huit mois après qu’il a prêté serment, le 30 septembre 1991, un coup d’État déloge Aristide et le commandant en chef de l’armée, le Général Raoul Cédras, prend le pouvoir. Une répression sans précédent s’abat immédiatement, particulièrement sur les quartiers populaires. Au moins 5 000 personnes auraient été tuées pendant la période du coup d’État. Plus de 500 000 personnes fuient la capitale. Dans les mois qui suivent, des dizaines de milliers de personnes essaient de fuir, par la mer, sur des embarcations de fortune.

Le 8 octobre 1991, l’Organisation des Etats d’Amérique (OEA) décide un embargo contre la junte militaire et le gouvernement provisoire. Marc Bazin est nommé Premier ministre par intérim le 4 juin 1992. Il exerce ensuite la fonction de président par intérim jusqu’en juin 1993. Les Etats-Unis vont violer l’embargo à plusieurs reprises, en particulier lorsqu’il s’agit de leurs entreprises pétrolières. Le 16 juin 1993, une résolution du Conseil de sécurité de l’ONU décide un embargo sur le pétrole et les armes. En interne, la situation s’envenime et les sanctions commerciales extérieures deviennent de plus en plus dures. De 1990 à 1994, l’agriculture a connu une diminution de 32% de sa valeur ajoutée.

Le 19 septembre 1994, Bill Clinton lance l’opération « Restore democracy ». Deux mille soldats états-uniens débarquent en Haïti. Et le 15 octobre, le retour au pays d’Aristide va se faire aux conditions fixées par les États-Unis, c’est-à-dire en fait en le forçant à appliquer une politique ayant reçu l’approbation de Washington. Alors que les États-Unis se sont chargés de « restaurer la démocratie », les IFI prétendent apporter « stabilité financière et développement ». A travers des plans d’ajustement structurel (PAS), la souveraineté économique, politique et financière du pays est abandonnée à ses créanciers, aux grandes puissances et au dieu Marché.

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Construire ou reconstruire Haïti ?

Sophie Perchellet

CADTM France (Paris)

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