5 octobre 2023 par CADTM Belgique , Thérèse Di Campo
Les rencontres d’Automne, qui se sont déroulées du 29 septembre au 1er octobre à l’auberge Simenon de Liège, ont été un grand succès. Intitulées « Des Suds aux Nords, la dette au carrefour des luttes », elles ont rassemblé près 100 participants et participantes, venues majoritairement d’Europe et d’Afrique. Retour sur un grand moment de retrouvailles militantes, de partage et surtout de convergence des luttes.
3 journées de débats intenses, 6 ateliers, 2 plénières riches en alternatives et des présentations de livres. Au cœur de nos débats, le combat contre la dette
Dette
Dette multilatérale : Dette qui est due à la Banque mondiale, au FMI, aux banques de développement régionales comme la Banque africaine de développement, et à d’autres institutions multilatérales comme le Fonds européen de développement.
Dette privée : Emprunts contractés par des emprunteurs privés quel que soit le prêteur.
Dette publique : Ensemble des emprunts contractés par des emprunteurs publics.
et ses logiques néolibérales
mais aussi la dénonciation du rôle central qu’elle occupe dans les oppressions liées au racisme, au genre et au capital. Cette année, les divers ateliers des rencontres d’automne du CADTM ont su rassembler et fédérer nos énergies de luttes pour œuvrer ensemble à plus de justice sociale, des Nords aux Suds.
Bien au-delà des constats et d’une analyse nécessaire, ce week-end, placé sous le signe de la convivialité, avait pour objectif de penser des alternatives et penser la mobilisation pour combattre les fausses réponses néolibérales que nous servent les grandes institutions financières face à cette crise profonde du capitalisme que nous connaissons.
Les luttes n’ont pas manqué au rendez-vous : combats des écoféministes du Sud qui soutiennent les femmes paysannes et les communautés pour résister à l’extractivisme
Extractivisme
Modèle de développement basé sur l’exploitation des ressources naturelles, humaines et financières, guidé par la croyance en une nécessaire croissance économique.
destructeur des pays du Nord, combats contre les microcrédits et contre l’endettement populaire, combats décoloniaux avec nos intervenantes et militantes Yvonne Ngoyi venue de la République démocratique du Congo, ou Reine Baïmey de WoMin (African Women Activists) en Côte d’Ivoire, combats juridiques à travers l’élaboration d’une loi belge pour lutter contre les fonds vautours
Fonds vautour
Fonds vautours
Fonds d’investissement qui achètent sur le marché secondaire (la brocante de la dette) des titres de dette de pays qui connaissent des difficultés financières. Ils les obtiennent à un montant très inférieur à leur valeur nominale, en les achetant à d’autres investisseurs qui préfèrent s’en débarrasser à moindre coût, quitte à essuyer une perte, de peur que le pays en question se place en défaut de paiement. Les fonds vautours réclament ensuite le paiement intégral de la dette qu’ils viennent d’acquérir, allant jusqu’à attaquer le pays débiteur devant des tribunaux qui privilégient les intérêts des investisseurs, typiquement les tribunaux américains et britanniques.
, restructurer leurs dettes au regard du droit de l’Union européenne et bien d’autres encore. Militants et militantes, d’ici et d’ailleurs, au Nord comme au Sud, se sont retrouvé·es pour partager et discuter de leurs expériences de lutte, pour initier une construction d’alliances. Les débats ont ainsi été animés autour d’une question commune qui nous unit, des Suds aux Nords : Comment mobiliser nos forces autour de nos différentes luttes si communes et comment construire des liens renforçant le combat pour la justice sociale ?
Les rencontres d’automne ont été également un lieu d’écoute sur des problématiques urgentes et brûlantes d’actualité, en particulier à travers l’analyse des liens étroits entre les politiques d’asile et de migration honteuses de nos gouvernements européens et les politiques d’austérité néolibérales mises en place par les grandes institutions financières. Parmi nos intervenant·es, Ada A, qui signe un très beau livre accompagné de dessins et de peintures s’intitulant « Le Petit Berger ou l’intégration perpétuelle », nous a raconté son parcours de vie depuis le Niger, jalonné de combats, d’exils en exils forcés, jusqu’à Liège. Un témoignage qui met en lumière toutes les formes d’exploitations humaines qui l’ont amené à fuir son pays. Le livre d’Ada A, berger de troupeaux de vaches au Niger, est un puissant appel à la solidarité internationaliste, au respect des droits humains et une dénonciation de l’exploitation humaine sous toutes ses formes.« C’est n’est pas le papier qui fait l’homme, c’est l’homme qui a créé les papiers, et la vie existe bel et bien avant les papiers. », nous dit-il. Cette présentation de livre faisait écho à celle d’Éric Toussaint, et de son ouvrage « Banque mondiale
Banque mondiale
BM
La Banque mondiale regroupe deux organisations, la BIRD (Banque internationale pour la reconstruction et le développement) et l’AID (Association internationale de développement). La Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD) a été créée en juillet 1944 à Bretton Woods (États-Unis), à l’initiative de 45 pays réunis pour la première Conférence monétaire et financière des Nations unies.
En 2022, 189 pays en sont membres.
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, une histoire critique » qui nous a permis de rappeler les responsabilités des politiques néolibérales imposées par les institutions financières internationales dans les mécanismes de migration, mais aussi l’échec des gouvernements européens, soumis à ses logiques ravageuses, à garantir les droits économiques, sociaux et culturels pour tous et toutes.
Dette privée et publique, dette écologique
Dette écologique
La dette écologique est la dette contractée par les pays industrialisés envers les autres pays à cause des spoliations passées et présentes de leurs ressources naturelles, auxquelles s’ajoutent la délocalisation des dégradations et la libre disposition de la planète afin d’y déposer les déchets de l’industrialisation.
La dette écologique trouve son origine à l’époque coloniale et n’a cessé d’augmenter à travers diverses activités :
La « dette du carbone ». C’est la dette accumulée en raison de la pollution atmosphérique disproportionnée due aux grandes émissions de gaz de certains pays industriels, avec, à la clé, la détérioration de la couche d’ozone et l’augmentation de l’effet de serre.
La « biopiraterie ». C’est l’appropriation intellectuelle des connaissances ancestrales sur les semences et sur l’utilisation des plantes médicinales et d’autres végétaux par l’agro-industrie moderne et les laboratoires des pays industrialisés qui, comble de l’usurpation, perçoivent des royalties sur ces connaissances.
Les « passifs environnementaux ». C’est la dette due au titre de l’exploitation sous-rémunérée des ressources naturelles, grevant de surcroît les possibilités de développement des peuples lésés : pétrole, minéraux, ressources forestières, marines et génétiques.
L’exportation vers les pays les plus pauvres de produits dangereux fabriqués dans les pays industriels.
Dette écologique et dette extérieure sont indissociables. L’obligation de payer la dette extérieure et ses intérêts impose aux pays débiteurs de réaliser un excédent monétaire. Cet excédent provient pour une part d’une amélioration effective de la productivité et, pour une autre part, de l’appauvrissement des populations de ces pays et de l’abus de la nature. La détérioration des termes de l’échange accentue le processus : les pays les plus endettés exportent de plus en plus pour obtenir les mêmes maigres recettes tout en aggravant mécaniquement la pression sur les ressources naturelles.
, dette du care
Care
Le concept de « care work » (travail de soin) fait référence à un ensemble de pratiques matérielles et psychologiques destinées à apporter une réponse concrète aux besoins des autres et d’une communauté (dont des écosystèmes). On préfère le concept de care à celui de travail « domestique » ou de « reproduction » car il intègre les dimensions émotionnelles et psychologiques (charge mentale, affection, soutien), et il ne se limite pas aux aspects « privés » et gratuit en englobant également les activités rémunérées nécessaires à la reproduction de la vie humaine.
, dette migratoire, dette coloniale, dette due au vivant et à la terre… Elles sont nombreuses à peser de tout leur poids sur les peuples. Ces rencontres d’automne ont renforcé la conviction, dans la joie et la bonne humeur, que nous avons au CADTM : la nécessité de s’unir sur tous les fronts communs contre les politiques néolibérales ravageuses mises en place par la Banque Mondiale et le FMI
FMI
Fonds monétaire international
Le FMI a été créé en 1944 à Bretton Woods (avec la Banque mondiale, son institution jumelle). Son but était de stabiliser le système financier international en réglementant la circulation des capitaux.
À ce jour, 190 pays en sont membres (les mêmes qu’à la Banque mondiale).
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qui nuisent aux populations et aux écosystèmes de notre planète.
Lors de nos deux sessions plénières, nos camarades de Debt for Climate, ont notamment rappelé l’importance et l’urgence de débattre pour mettre en place un mouvement populaire mondial et internationaliste à partir de la base, en unissant les travailleur·euses, les féministes, les luttes environnementales et anticapitalistes, et toutes les forces vives afin d’annuler la dette financière du Sud global, pour permettre une transition juste et autodéterminée.
Moments conviviaux par excellence, les rencontres ont été aussi rythmées par le slam acéré et féministe de Zouz, qui a enflammé la scène antifasciste du Festifal’ de Liège, le samedi soir. Colère, joie et luttes, des mots à l’image de nos rencontres. Les punchlines de Zouz ont fusé avec ce pouvoir de créer des ponts de combat contre les violences genrées, racistes et capitalistes que subissent toutes celles et ceux qui se retrouvent du mauvais côté des rapports sociaux.
Nous en profitons pour remercier chaleureusement tou·te·s les participant·e·s, intervenant·e·s, et bénévoles des rencontres d’automne et leurs belles énergies, ainsi que le Front antifasciste de Liège !
Nous publierons ici, sur note site, très prochainement les enregistrements audios, comptes-rendus écrits et vidéos de tous nos ateliers en détails. A l’année prochaine !
Le prochain rendez-vous militant important ? C’est bientôt à Marrakech. Le CADTM, ses militants et ses militantes se retrouvent du 12 au 15 octobre à Marrakech, à l’occasion des prochaines assemblées annuelles de la BM et du FMI, pour partager et organiser la lutte. Plus de 70 organisations et une dizaine de réseaux internationaux ont inscrit des ateliers au programme de ce grand évènement et sont complètement mobilisé·es pour la réussite de ce contre-sommet. Il n’est pas trop tard pour nous rejoindre sur place ou pour suivre cet évènement en ligne. Pour visiter le site internet du contre-sommet, avec toutes les dernières informations, c’est ici.
2 octobre, par CADTM Belgique , JOC Liège
27 septembre, par CADTM Belgique
25 septembre, par CADTM Belgique
24 septembre, par CADTM Belgique
12 septembre, par CADTM France , CADTM Belgique , Emmanuelle Carton
9 septembre, par CADTM Belgique
3 septembre, par CADTM Belgique , Comité Ujamaa
13 août, par CADTM Belgique , Mamy Rakotondrainibe
30 juillet, par CADTM Belgique
11 juillet, par CADTM Belgique
Première journée de l’Université d’été du CADTM Afrique :
« Partout, il faut combattre la crise de la dette et sa logique néocoloniale qui confine les Etats africains dans une impossibilité d’assurer le bien-être de leurs populations »2 septembre, par CADTM Afrique , Thérèse Di Campo
12 août, par Thérèse Di Campo
15 juillet, par Thérèse Di Campo , Federico Sibaja
28 mai, par Thérèse Di Campo
7 mai, par Thérèse Di Campo , Pascal Mirindi
29 janvier, par CADTM Belgique , Thérèse Di Campo
24 novembre 2023, par CADTM Belgique , Thérèse Di Campo , David Alvarez
23 octobre 2023, par Thérèse Di Campo
6 mars 2023, par CADTM Belgique , Thérèse Di Campo
1er septembre 2022, par Pablo Laixhay , Thérèse Di Campo