Tandis que l’établissement fourbit ses armes
5 mars 2019 par Yorgos Mitralias
New-York, Etats-Unis (Image d’illustration, CC - Flickr - Chris Isherwood)
« Nous avons maintenant un million de volontaires prêts à se retrousser les manches et à se mettre au travail pour assurer que nous allons gagner la nomination Démocrate, battre Trump et transformer la vie économique et politique de notre pays. Je pense que vous comprenez tous que quand on parle de couverture maladie pour tous, quand on parle d’augmentation du salaire minimum, quand on parle de lutter contre le changement climatique, on s’attaque a des énormes intérêts particuliers, et vous connaissez lesquels. On parle de Wall Street, on parle de l’industrie de la santé, de l’industrie des combustibles fossiles, des sociétés pharmaceutiques, du complexe militaro-industriel, de l’industrie des prisons privées. Ceux-la sont des mecs tout-puissants, ils disposent des sommes d’argent illimitées, d’une énorme influence politique à Washington. Et le seul moyen que je connais pour les vaincre est quand des millions de gens d’un mouvement populaire, se lèvent et résistent, et demandent un gouvernement et une économie qui travaillent pour tous et pas pour le 1 %. Permettez-moi donc de remercier le million de gens qui ont déjà signé et de demander à ceux qui n’ont pas signé de le faire. Celle-ci va être une campagne historique, nous allons entrer dans l’histoire » [1].
Voilà ce que Bernie a dit en annonçant qu’en moins d’une semaine (!), a été atteint l’objectif « incroyablement ambitieux », comme plusieurs médias se sont empressés de le qualifier, du million de ses compatriotes qui seraient disposés de travailler comme volontaires pour sa campagne électorale. « Évidemment », la plupart de nos bons médias n’en soufflent mot. Mais, ce n’est pas grave. Comme précédemment en 2016, mais bien plus maintenant, ils ne pourront pas éviter de parler des conséquences cataclysmiques qu’aura sur leur monde néolibérale l’énorme mouvement populaire en formation qui soutient le vieux sénateur socialiste de Vermont.
Nous avons choisi de mettre en exergue les paroles de Bernie pour une raison évidente : Parce qu’elles indiquent avec grande exactitude tant l’énormité que l’enjeu de l’affrontement qui approche. Bernie non seulement appelle par son nom l’ennemi de classe qui est le grand capital nord-américain (et en même temps multinational), mais il appelle aussi ses fidèles à se battre en créant, tous ensemble et par en bas, le seul « outil » en état de leur donner des vraies possibilités et espoirs de vaincre : Le mouvement populaire de millions de gens décidés d’en finir avec les grands maux de notre temps : Les monstrueuses inégalités sociales et l’épée de Damoclès climatique suspendue au-dessus de l’humanité et de la planète.
Bernie Sanders constitue une criante “anomalie” dans la vie politique américaine. Mais, tandis que pendant des décennies, cette “anomalie” (socialiste) pouvait être traitée presque de... pittoresque, aujourd’hui, et en vue de la confrontation de 2020, elle se transforme en menace mortelle. Alors, pour les établissements américains (et internationaux) de toute espèce il n’y a qu’une chose à faire : Lutter à mort car cette fois non seulement Bernie se présente aux élections pour vaincre, mais de l’aveu commun il n’est pas exclu qu’il l’emporte ! Et manifestement, on met déjà le paquet pour mettre au point tout ce qu’il faut pour empêcher que cette damnée éventualité se réalise...
Emblématique de ces préparatifs est le fait suivant, passé sous silence en Europe, mais qui continue de provoquer maintes rections aux États-Unis : Le bateau amiral des médias américains, très proche du parti Démocrate et que le président Trump n’arrête pas d’appeler « ennemi du peuple » et de lui-même, la chaîne de télévision CNN a pris il y a quelques jours une décision bien « bizarre » : Elle a embauché, pour qu’elle dirige son service politique qui va couvrir la campagne électorale pour les présidentielles de 2020, une jeune femme du nom de Sarah Flores qui n’a jamais eu le moindre rapport avec le journalisme. Mais, attention. Tout indique que cette embauche n’avait rien à faire avec les (inexistantes) qualités professionnelles mais plutôt avec les caractéristiques politiques de la très réactionnaire Mme Flores, laquelle non seulement a fait partie du gouvernement Trump en tant que porte-parole du ministre de la Justice Jeff Sessions, mais elle a toujours brillé pour sa haine des Démocrates et de la CNN qu’elle avait l’habitude d’appeler... « Clinton News Network » !
La conclusion ne peut qu’être identique à celle tirée de l’accueil enthousiaste réservé par les députés et sénateurs Républicains mais aussi Démocrates – sauf quelques exceptions – à la déclaration solennelle de Trump que « jamais les États-Unis ne seront socialistes » : Tous ensemble contre le socialiste Bernie Sanders car les traditionnelles rivalités et inimitiés partidaires cèdent maintenant le pas à l’unité (de classe) imposée par la menace mortelle que représente Bernie et son mouvement populaire de masse sans précédent ! D’ailleurs, les médias « libéraux » ainsi que les barons et l’établissement du parti Démocrate n’ont pas attendu l’annonce de la candidature de Bernie pour se mettre au travail. En effet, il y a des mois depuis que, New York Times et Washington Post en tête, ils ont (ré)commencé d’attaquer et de calomnier quotidiennement le tandem Bernie et Alexandria Ocasio-Cortez qui menacent plus que jamais leur vieux système bipartite si bien huilé…
Cela dit, on comprend la raison qui fait que l’objectif principal de Bernie ne soit pas maintenant ni l’obtention de la nomination des Démocrates, ni même sa victoire aux présidentielles mais la création du plus grand mouvement populaire de l’histoire des États-Unis. Pourquoi ? Mais, parce que, vu que l’adversaire est tout-puissant, dans un tel affrontement ce qui compte est déterminant et le rapport des forces bien matérielles ! D’ailleurs, tandis que les victoires électorales sont éphémères, les grands mouvements sociaux et politiques radicaux non seulement perdurent mais ils sont la seule garantie pour la longévité des succès électoraux eux-mêmes. Et pour appeler les choses par leur nom, seuls des naïfs incorrigibles pourraient garantir que Trump et ses acolytes accepteraient de perdre le pouvoir sans broncher même au risque de provoquer une guerre civile bien sanglante. Et manifestement, Bernie Sanders n’en est pas un d’eux [2]...
Les premières déclarations et autres initiatives de Bernie Sanders après l’annonce de sa candidature ne laissent pas de doute que sa campagne sera bien offensive, qu’il refusera de mettre de l’eau dans son vin radical. Mais, attention : On doit s’attendre à ce que dorénavant, la propagande et la désinformation seront sans précédent car jamais dans le passé les intérêts économiques et politiques en jeu n’ont été aussi importants. Raison de plus pour qu’on essaye de former notre propre opinion indépendante – fondée sur des informations de première main – sur l’évolution de l’affrontement de classe en cours au cœur de la superpuissance mondiale. Alors, quoi de mieux que voir et écouter Bernie Sanders lui-même s’adresser au peuple nord-américain, pour annoncer sa candidature mais surtout pour présenter sans demi-mots les véritables objectifs, ennemis et enjeux d’un combat qu’il promet historique pour les États-Unis et pour le monde. (https://www.youtube.com/watch?v=TVK5LGdgUJU)
Traduit du grec
[1] On peut consulter la vidéo de ce discours de Bernie Sanders, ainsi que des milliers d’autres textes, images et vidéos (en anglais car de première main) avec des informations, des analyses et des prises de position sur ce qui se passe au sommet et surtout à la base de la société nord-américaine, au Facebook que nous avons initié il y a un peu plus de 3 ans : https://www.facebook.com/EuropeansForBerniesMassMovement/
[2] Le dernier à avertir que Trump serait disposé à tout faire pour rester cramponné au pouvoir a été son ancien avocat Michael Cohen, qui a déclaré récemment devant les députés américains : « Étant donné mon expérience d’avoir travaillé pour M. Trump, j’ai peur que s’il perd les élections de 2020, il n’y aura jamais de passation pacifique de pouvoir ». Mais, évidemment ni nos médias ni nos dirigeants et autres responsables politiques n’ont prêté la moindre attention à cet avertissement hautement alarmant qu’ils ont préféré passer sous un silence bien éloquent...
Journaliste, Giorgos Mitralias est l’un des fondateurs et animateurs du Comité grec contre la dette, membre du réseau international CADTM et de la Campagne Grecque pour l’Audit de la Dette. Membre de la Commission pour la vérité sur la dette grecque et initiateur de l’appel de soutien à cette Commission.
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