Belgique

Le roi, la loi et la liberté… de négocier !

7 août 2013 par Nico Cué


L’été a fini par arriver. Les esprits sont en congé et les médias dominants organisent ces vacances en recyclant de vieilles histoires racontées aux enfants sages en attendant le passage du marchand de sable. Un prince au bois dormant réveillé par Blanche Neige se prépare à accéder au trône laissé vacant par un roi fatigué et qui aspire à une retraite paisible.



Les réjouissances s’annoncent hautes en couleur. De quoi dissiper l’image brouillée d’une famille difficile qui jusque-là défrayait la chronique avec une gestion douteuse d’un patrimoine nourri de dotations publiques ou par des soucis publiquement étalés avec quelque greffon sur un arbre généalogique déjà compliqué.

Sous le soleil de juillet, la vie semble plus belle et plus simple. Bientôt de joyeuses entrées dans les bonnes villes du royaume dissiperont toutes nos difficultés …

Les réalités suivent pourtant leur cours sous les flots d’eau de rose et les fanions tricolores.

Des événements significatifs retiennent cependant l’attention d’esprits moins frivoles.

La dette Dette Dette multilatérale : Dette qui est due à la Banque mondiale, au FMI, aux banques de développement régionales comme la Banque africaine de développement, et à d’autres institutions multilatérales comme le Fonds européen de développement.
Dette privée : Emprunts contractés par des emprunteurs privés quel que soit le prêteur.
Dette publique : Ensemble des emprunts contractés par des emprunteurs publics.
publique est officiellement passée au-dessus du cap symbolique des 100% du produit intérieur brut PIB
Produit intérieur brut
Le PIB traduit la richesse totale produite sur un territoire donné, estimée par la somme des valeurs ajoutées.
Le Produit intérieur brut est un agrégat économique qui mesure la production totale sur un territoire donné, estimée par la somme des valeurs ajoutées. Cette mesure est notoirement incomplète ; elle ne tient pas compte, par exemple, de toutes les activités qui ne font pas l’objet d’un échange marchand. On appelle croissance économique la variation du PIB d’une période à l’autre.
. Selon la Commission européenne, elle atteindra 102% en 2014, soulignant ainsi une évidence : les politiques d’austérité qui ne fonctionnent pas en Grèce, en Espagne ou au Portugal ne produisent pas chez nous de meilleurs fruits. Les recettes foireuses de là-bas sont foireuses ici aussi.

Plus de trente années de politiques libérales ont créé des « dépendances de sentiers » qui conduisent… au précipice. Dans l’euphorie maniaco-royaliste et selon un mythe qui veut que les lemmings se jettent à la mer pour mourir ensemble, nous approchons dangereusement des falaises, poussés dans le dos par une force irrationnelle.

Cette année, le gouvernement d’Elio Di Rupo a enclenché la vitesse supérieure.

Les employeurs veulent abandonner le modèle de concertation élaboré durant la seconde guerre mondiale et formalisé dans le pacte social de 1944. Le « Projet d’accord de solidarité sociale » aura été vidé de sa substance avant qu’on ne souffle les 70 bougies de son anniversaire.

Ce gouvernement de « centre-centre » a viré à droite toute. Il n’entend plus se mettre en travers de la route de patrons qui règnent mais ne gouvernent pas. Il est bien aidé par des institutions européennes qui ne rendent de comptes devant aucune instance démocratique et qui ont élevé le principe de « compétitivité » au rang d’une infaillibilité dogmatique, de principe général et de religion absolue.

La liberté de négocier les salaires constituait un obstacle majeur à la stratégie de transfert de la richesse produite vers le capital. Elle est sous l’éteignoir.

Faute d’un accord interprofessionnel sur la marge salariale, la ministre de l’Emploi a publié le 2 mai dernier un arrêté royal gelant les salaires en 2013 et 2014. Il empêche toute négociation dans les secteurs et dans les entreprises. Nos délégués iront donc négocier, les mains liées derrière le dos et solidement entravées par des colsons serrés. Ce texte concrétise le premier pas d’un rêve patronal : laisser le marché fixer la hauteur des rémunérations… Dans un contexte de chômage massif, ce chemin conduit inévitablement à l’appauvrissement généralisé de toute la classe ouvrière !

Dans le même temps, la productivité continuera de croître, ce qui nourrira directement les profits des entreprises. Selon le théorème de Schmidt, « les profits d’aujourd’hui sont les investissements de demain et les emplois d’après-demain », les investissements devraient exploser. Sauf que depuis plus de vingt ans, si le refrain était exact, nous devrions être en situation de plein emploi. Par ailleurs, dans un contexte de récession Récession Croissance négative de l’activité économique dans un pays ou une branche pendant au moins deux trimestres consécutifs. , les opportunités d’investissement seront, à l’évidence, réduites à peu de chose : la demande de consommation est déprimée par le recul généralisé du pouvoir d’achat (blocage des salaires, réforme du chômage, coupes sombres dans la sécu, anémies de budgets publics, étranglement des communes…). Le gouvernement Di Rupo, in fine, aura bien travaillé… pour les dividendes et les autres revenus du capital.

Ce faisant, il nous pousse dans une spirale de récession.

Comme acteurs des temps présents, nous ne pouvons évidemment pas accepter, les bras croisés, cette perspective. La MWB a donc décidé d’attaquer l’Arrêté Royal au Conseil d’Etat. Dès la publication de ce recours au Moniteur, toutes les instances de la FGTB qui le souhaitent seront libres de s’associer à cette démarche de combat. Ensemble, on est plus forts !

Edito de Nico Cué, 22/07/2013.
Nico Cué, Secrétaire général de la MWB-FGTB (organisation syndicale commune dénommée « Métallurgistes Wallonie-Bruxelles »).