Communiqué de presse du CADTM Afrique contre l’approbation de la signature des Accords de partenariat économique – APE
17 juillet 2014 par CADTM Afrique
Après plusieurs années de tiraillement entre des pays de l’Afrique, Caraïbes, Pacifique (ACP) et l’Union européenne (UE) pour la signature des « Accords de partenariat économique » (APE), les États membres de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) ont finalement approuvé la signature de l’accord suicidaire dit « Accord de partenariat économique » avec l’Union européenne (UE) le 11 Juillet 2014.
Pour parvenir à cet accord, l’UE a changé de stratégie en divisant le groupe ACP qui était jusqu’alors opposé à ces APE. L’UE a alors opté pour des négocations régionales et vient ainsi d’obtenir des APE au niveau de l’Afrique de l’Ouest.
Cet accord signé sans le consentement des peuples aura de graves incidences sur le développement économique et social de ceux-ci.
Ledit accord, qui n’entrera en vigueur qu’une fois ratifié par le Parlement européen, résulte de pressions exercées par les firmes multinationales européennes, au service exclusif desquelles s’est mise la Commission européenne, parvenant à entrainer des chefs d’Etat africains qui sont restés insensibles devant les mises en garde répétées de la société civile.
Quant aux peuples d’Afrique de l’Ouest, ils ont tout à perdre. D’abord, les 12 États sur 16 ayant actuellement le statut de PMA
Pays moins avancés
PMA
Notion définie par l’ONU en fonction des critères suivants : faible revenu par habitant, faiblesse des ressources humaines et économie peu diversifiée. En 2020, la liste comprenait 47 pays, les derniers pays admis étant le Timor oriental et le Soudan du Sud. Elle n’en comptait que 26 il y a 40 ans.
(pays moins avancés) ne pourront plus taxer les 12,6 milliards d’euros de produits importés de l’UE en 2013, d’où une perte considérable de leurs ressources budgétaires. Ce que l’UE propose de leur verser comme contreparties ne fera pas le poids. C’est lâcher la proie pour l’ombre. Par exemple, pour le Ghana ses pertes de recettes fiscales seraient de 374 M$ s’il ratifie l’APE contre une perte de 52 M$ avec le statut de SPG s’il ne ratifie pas. Le Fonds de solidarité devrait payer pour poursuivre ses exportations dans l’UE.
Ensuite et surtout, pour tous les pays concernés, c’est l’ensemble de leur agriculture paysanne et vivrière, leur sécurité alimentaire et tous les projets actuels de transformation sur place, de développement de l’industrie et de la construction régionales, qui seront frappés de plein fouet par une concurrence déloyale destructrice d’emplois et par une dépendance accrue vis-à-vis des cours des marchés mondiaux. C’est le pillage programmé de leurs ressources naturelles, celles du sol et du sous-sol. Le développement endogène de la région et les projets d’intégration régionale seront sacrifiés au bénéfice d’une économie « tournée vers l’exportation » et de peuples réduits à importer des produits hautement subventionnés et de qualité douteuse venant concurrencer de façon rude et pernicieuse leurs propres productions.
Il est à noter que la Commission européenne a refusé de traiter de la question des subventions agricoles dans le texte de l’APE, arguant que cette question relève de la compétence exclusive de l’Organisation mondiale du commerce
OMC
Organisation mondiale du commerce
Créée le 1er janvier 1995 en remplacement du GATT. Son rôle est d’assurer qu’aucun de ses membres ne se livre à un quelconque protectionnisme, afin d’accélérer la libéralisation mondiale des échanges commerciaux et favoriser les stratégies des multinationales. Elle est dotée d’un tribunal international (l’Organe de règlement des différends) jugeant les éventuelles violations de son texte fondateur de Marrakech.
L’OMC fonctionne selon le mode « un pays – une voix » mais les délégués des pays du Sud ne font pas le poids face aux tonnes de documents à étudier, à l’armée de fonctionnaires, avocats, etc. des pays du Nord. Les décisions se prennent entre puissants dans les « green rooms ».
Site : www.wto.org
(OMC), la CEDEAO ne pourra donc poursuivre l’UE pour dumping au niveau des instances de concertation UE-AO de l’APE et la CEDEAO ne pourra pas davantage la poursuivre à l’OMC puisque la CEDEAO n’est pas membre de l’OMC. Seuls certains de ses États membres pourraient le faire mais ce sera bien plus difficile politiquement. L’importance de ce dumping de l’UE, très sous-évalué puisqu’il ne prend en compte qu’une part de ses exportations agricoles, est une raison suffisante pour ne pas signer l’APE.
Le nez caché de l’APE, c’est l’ouverture forcée de nos marchés à plus de 70 %, ce qui signifie la suppression des droits de douane. Et l’Afrique de l’Ouest ne doit pas réduire ses droits de douane à un niveau inférieur à celui de l’UE. Alors que l’Accord de partenariat économique exige de réduire les droits de douane de la CEDEAO sur 75 % des exportations de l’UE, non seulement l’APE n’oblige pas l’UE à éliminer ses subventions internes bénéficiant aux produits exportés comme on vient de le voir, mais encore l’Afrique de l’Ouest ne devrait pas réduire ses droits de douane sur les importations venant de l’UE à des niveaux inférieurs aux droits NPF (de la Nation la Plus Favorisée) de l’UE, en particulier sur les produits alimentaires de base.
La CEDEAO ne pourrait pas négocier des droits de douane consolidés à l’OMC qui seraient plus élevés. Il y a là une double contradiction : d’une part, l’UE restera libre d’augmenter ses propres Droits de douane (DD) appliqués tant qu’ils restent inférieurs à ses DD consolidés et, d’autre part, cette règle de l’APE empêcherait de facto la possibilité pour la CEDEAO de demander son adhésion à l’OMC ou au moins d’obtenir alors le bénéfice des droits consolidés qui seraient établis à la moyenne pondérée des DD consolidés de ses États membres.
Aux APE s’ajoute l’Accord d’investissement qui prévoit un égal traitement entre les entreprises nationales et les transnationales. Or comme l’histoire le montre, sans protection, aucune industrie nationale ne peut se développer. Rappelons que les préférences tarifaires non réciproques n’ont pas permis aux ACP de mieux se développer et s’intégrer dans le système commercial international.
Dès lors, il sera encore plus difficile pour les États africains de créer des infrastructures socio-économiques, telles que les pistes rurales, les écoles, les points d’eau, les dispensaires, les logements, les unités industrielles au profit de leurs peuples appauvris.
Les APE ne sont pas déconnectés du système dette
Dette
Dette multilatérale : Dette qui est due à la Banque mondiale, au FMI, aux banques de développement régionales comme la Banque africaine de développement, et à d’autres institutions multilatérales comme le Fonds européen de développement.
Dette privée : Emprunts contractés par des emprunteurs privés quel que soit le prêteur.
Dette publique : Ensemble des emprunts contractés par des emprunteurs publics.
, ils font partie de la deuxième phase des politiques d’ajustement structurel (PAS) parmi lesquelles figure la libéralisation commerciale.
La mise en œuvre de ces APE entraînera inévitablement l’augmentation de la dette publique. En effet, pour combler l’aggravation des déficits budgétaires causés par la signature de l’Accord de partenariat économique, nos États risquent de s’endetter auprès des Institutions financières internationales (IFI) dont la Banque mondiale
Banque mondiale
BM
La Banque mondiale regroupe deux organisations, la BIRD (Banque internationale pour la reconstruction et le développement) et l’AID (Association internationale de développement). La Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD) a été créée en juillet 1944 à Bretton Woods (États-Unis), à l’initiative de 45 pays réunis pour la première Conférence monétaire et financière des Nations unies.
En 2022, 189 pays en sont membres.
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et le FMI
FMI
Fonds monétaire international
Le FMI a été créé en 1944 à Bretton Woods (avec la Banque mondiale, son institution jumelle). Son but était de stabiliser le système financier international en réglementant la circulation des capitaux.
À ce jour, 190 pays en sont membres (les mêmes qu’à la Banque mondiale).
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Les APE sont non seulement une stratégie pour conduire les pays ACP à des endettements illégaux, illégitimes, injustes et odieux mais aussi un moyen de pouvoir les maintenir davantage dans l’esclavage de la dette.
Pour rompre avec le néocolonialisme, le Réseau CADTM Afrique exige :
Enfin, le Réseau CADTM Afrique appelle les organisations sociales, les mouvements sociaux et les partis politiques progressistes européens à se mobiliser contre la ratification par le parlement européen de cet accord inique.
Bamako, le 14 juillet 2014
Le groupe de coordination du CADTM Afrique
SECRETARIAT RESEAU CADTM AFRIQUE, CAD-Mali Djélibougou Rue : 326 Porte : 26 - BP. 2521 Bamako - Mali - Tél./Fax : 20 24 01 34 / E-mail : secretariatcadtmafrique chez gmail.com
Séminaire de renforcement des capacités des femmes et des organisations de la société civile togolaise sur les dettes illégitimes, leurs impacts sur les droits humains et les alternatives possibles
Déclaration de Lomé11 septembre, par CADTM Afrique , Attac-Togo , Womin , Foundation for a just society
21 juin, par Collectif , ATTAC/CADTM Maroc , CADTM Afrique
Atelier de renforcement des capacités de la société civile sur les dettes illégitimes, leurs impacts sur les droits humains, et les alternatives possibles
Déclaration de Yaoundé30 mars, par CADTM Afrique
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