1er trimestre 2014 - n°61
17 février 2014
SOMMAIRE
Bancocratie : de la république de Venise à Mario Draghi et Goldman Sachs
par Éric Toussaint
Annuler la dette ou taxer le capital : pourquoi choisir ?
par Thomas Coutrot, Patrick Saurin, Éric Toussaint
Les chômeurs saignent l’État ou l’État saigne les chômeurs ?
par le Comité liégeois d’audit citoyen de la dette publique
Les politiques d’austérité au Portugal
par Rui Viana Pereira
Emprunts toxiques en France : la bonne nouvelle du Conseil constitutionnel
par Patrick Saurin
Lampedusa
par Pauline Imbach
Aux Philippines, deux mois après Haiyan : les enjeux de la reconstruction
par Pierre Rousset
Le nouveau prêt du FMI au Pakistan : la recette immanquable pour une misère amère
par Abdul Khaliq
Les indignés haïtiens aussi prennent la rue
par Yolanda Fresnillo
Haïti. Esclavage et réparations
par Claude Quémar
Sékou Diarra : « L’audit citoyen de la dette malienne doit réunir tous les acteurs qui luttent contre l’endettement illégitime »
Propos recueillis par Renaud Vivien
Maroc : l’austérité pour le peuple, pas pour le Palais
Entretien avec Omar Radi par Myriam Bourgy et Cécile Lamarque
Maroc. Micro-crédit, macro-arnaque
par Lucile Daumas
Dette tunisienne : le CADTM appelle le ministre des finances de la Belgique à revoir sa copie
par le CADTM Belgique
EDITO
Le 1er janvier 1994, jour d’entrée en vigueur de l’Alena (Accord de libre-échange nord-américain), les sans-terre, les sans-voix, les « oublié-es » que sont les Indien-ne-s, se soulevaient au cri de « Ya basta » (ça suffit) contre le gouvernement de Mexico. L’Armée zapatiste de libération nationale (EZLN) devint l’un des premiers symboles du mouvement altermondialiste.
Pied-de-nez à ceux qui pensaient que le mouvement zapatiste s’essoufflait, le 21 décembre 2012, date de la fin du monde selon le calendrier maya, plus de 40 000 Indiens défilaient silencieusement dans cinq grandes villes du Chiapas pour rappeler leur combat pour la liberté, la démocratie, la justice, la reconnaissance de leurs droits. « Écoutez, écoutez, le bruit de votre monde qui s’effondre, et d’un autre qui surgit ».
En août 2013 et janvier 2014, les communautés zapatistes invitaient les « zapatisants » du monde entier à partager leur quotidien et leurs expériences à l’occasion de l’Escuelita zapatista (’la petite école zapatiste’).
Pourquoi rappeler le 20e anniversaire du soulèvement zapatiste ? Parce que la quête d’autonomie des communautés rebelles du Chiapas constitue une impressionnante démonstration de force et d’inventivité. Les zapatistes ont développé une expérience qui, sans constituer un modèle, est une source d’inspiration, un encouragement à trouver les chemins propres à nos territoires, à nos cultures, à nos luttes.
Parce qu’on entend le bruit de cet autre monde qui surgit. Le Ya basta ! refait irruption dans les rues et sur les places aux quatre coins de la planète. Les zapatistes sont toujours debout et, partout, des gens se lèvent pour dénoncer le pouvoir accaparé par quelques-uns au détriment du plus grand nombre. Encore fragiles, de nouveaux mouvements rompent avec la résignation et l’apathie ambiantes.
« Nous avons fait, nous faisons, nous ferons, la liberté, notre liberté ». Parce que nous aussi, nous faisons le choix de la liberté. Et dans nos luttes pour l’obtenir, l’exercer, la défendre, le combat pour l’annulation de la dette
Dette
Dette multilatérale : Dette qui est due à la Banque mondiale, au FMI, aux banques de développement régionales comme la Banque africaine de développement, et à d’autres institutions multilatérales comme le Fonds européen de développement.
Dette privée : Emprunts contractés par des emprunteurs privés quel que soit le prêteur.
Dette publique : Ensemble des emprunts contractés par des emprunteurs publics.
n’est pas de ceux qui peuvent être relégués. Qu’il s’agisse de personnes surendettées (plombées par des frais de santé, un prêt étudiant ou un emprunt immobilier) ou de populations qui subissent l’austérité au nom de la dette publique, les gouvernements et les financiers veulent nous déposséder de notre avenir, nous enchaîner à l’horizon soi-disant indépassable du remboursement des dettes.
Du mouvement Strike Debt aux États-Unis au Maroc où un front s’organise contre les prêts usuriers des organismes de micro-crédits, en passant par le Mali et l’Europe où essaiment des collectifs citoyens d’audit de la dette publique, partout les luttes locales s’intensifient pour sortir de la spirale de l’endettement, se réapproprier l’avenir, construire de nouveaux possibles. Ya basta !