Nous ne sommes pas dupes ! Solidarité avec Omar Radi ! Liberté !

4 août 2020 par Myriam Bourgy , ATTAC/CADTM Maroc , Pauline Imbach


(CC - Wikimedia : Lamya Achary)

Omar Radi journaliste d’investigation et militant des droits humains fait l’objet d’une violente campagne d’intimidation de la part des autorités marocaines. Accusé d’atteinte à la sûreté de l’État et d’espionnages, depuis le 25 juin, il a été convoqué 9 fois pour des interrogatoires dont certains duraient plus de 9 heures d’affilés. « Je n’ai jamais été et ne serai jamais au service d’un pouvoir étranger, (…) je ne suis ni un espion ni un agent payé par un fonds étranger », avait-il réagi en qualifiant les accusations le visant de « ridicules ».



Omar Radi s’est présenté le mercredi 29 Juillet à 10h du matin à la Brigade Nationale de la Police Judicaire (BNPJ) pour la 10e fois. Il a été directement transféré devant le juge d’instruction de la Cour d’appel de Casablanca puis a été placé en détention à la prison d’Okacha à Casablanca. L’ouverture du procès est programmée dans presque deux mois, le 22 Septembre 2020 ! Une nouvelle accusation lui a été infligée cette fois liée à une supposée affaire de viol avec violence.

Omar Radi a rédigé un communiqué mardi 28 juillet et avait demandé de ne pas publier sauf s’il n’était plus en mesure de communiquer. Nous reproduisons ici son communiqué, suivi d’une vidéo d’Omar Radi tournée avant son arrestation (sous-titre FR).

Nous reprenons également la déclaration « Contre l’instrumentalisation des combats féministes » écrite par un collectif indépendant de féministes marocaines suite à cette nouvelle accusation. Vous pouvez signez ce texte ici : « Pétition ouverte aux féministes marocaines et aux allié-es de leurs combats ».

Enfin nous vous proposons une revue de presse écrite francophone qui permet de comprendre la violence de la campagne menée contre Omar Radi.

Nous restons mobilisé !

#freeomarradi
Twitter : Free_Omar_Radi
Facebook : @freeomarradi

Communication de Omar Radi à l’opinion publique :

Samedi 25 juillet, immédiatement après ma sortie d’un interrogatoire mené par la Brigade nationale de la police judiciaire [au sujet des soupçons d’« espionnage » et de « financement étranger » pour lesquels il fait l’objet d’une enquête préliminaire depuis juin dernier, et pour lesquels il est aujourd’hui poursuivi en état de détention], l’Association marocaine des droits de l’Homme (AMDH) m’a informé, par le biais de son bureau central de Rabat, qu’une femme s’était rendue à leur siège pour les informer du dépôt d’une plainte m’accusant de viol dans la nuit du 12 au 13 juillet. La plaignante a sollicité le soutien de l’AMDH. J’ai par la suite pu relater ma version des faits à l’association.

Le 26 juillet, soit un jour plus tard, j’ai été convoqué par la Gendarmerie royale en compagnie d’une personne présente au moment des faits visés par la plainte susmentionnée. Nous nous sommes présentés devant la gendarmerie royale le 27 juillet, et j’ai été interrogé pendant une dizaine d’heures. La personne qui m’accompagnait a elle aussi été entendue en qualité de témoin.

Bien que je sois obligé de respecter le secret de l’enquête et de l’instruction, je considère qu’il est de mon devoir d’apporter les précisions suivantes, qui ne parviendront à l’opinion publique que dans l’éventualité où je ne serais plus en mesure de communiquer par mes propres moyens :

  • Au cours de l’enquête, j’ai fermement réfuté les accusations fausses et fallacieuses portées à mon encontre. J’ai assuré aux enquêteurs qu’il s’agissait d’une plainte malveillante, et que contrairement aux allégations de la plaignante, cette nuit-là, elle et moi avions eu à deux reprises des relations sexuelles consenties. J’ai également présenté aux enquêteurs des éléments confirmant l’acceptation mutuelle de cette relation, ainsi que d’autres preuves que je me réserve le droit de taire à ce stade, et qui seront présentées devant l’opinion publique le moment venu.
  • Lors de la confrontation qui s’est tenu entre moi et la plaignante en présence du témoin, j’ai défendu mon innocence et mis la plaignante face aux multiples contradictions que comportait sa version. S’étant sentie en difficulté, elle a attaqué le témoin, qui a lui aussi présenté des éléments allant à l’encontre de son récit, en le menaçant de poursuite pour intention criminelle. Or, celui-ci n’a aucune implication dans ce dossier, mis à part sa présence au moment des faits ayant constitué l’objet de cette plainte infondée.
    Outre les données très sommaires partagées dans ce communiqué, s’expliquant par le fait que l’instruction étant toujours en cours, je souhaiterais attirer l’attention de l’opinion publique sur les points suivants :
  • Je suis absolument certain que l’opinion publique nationale et internationale, ainsi que toutes celles qui me connaissent, qu’elles soient amies, collègues ou camarades, ne se laisseront pas flouer par les mensonges et la calomnie ciblant ma personne. Et nul ne peut croire que l’activation de cette plainte malveillante, en ce moment précis, n’est qu’une innocente coïncidence, ou un dossier tout à fait séparé du harcèlement judiciaire dont je fais l’objet. Tout le monde se souvient du piège qui m’a récemment été tendu en compagnie du journaliste Imad Stitou [1].
  • J’ai été victime d’un coup monté savamment orchestré, préparé depuis des mois. Les efforts visant à m’entraîner dans ce piège ont duré de longues semaines, en conjonction avec mes convocations répétées, qui m’épuisaient sur les plans physique et psychologique. J’assume l’entière responsabilité des décisions relevant de ma vie privée, ainsi que mes relations en tant qu’adulte, en conformité avec les convictions que j’ai toujours défendu, notamment durant l’enquête qui a porté sur ma liberté à entretenir des relations consenties. J’assure à l’opinion publique que mon seul crime dans ce dossier/coup monté est mon exercice de ma liberté individuelle avec une certaine indifférence face aux dangers qui me guettaient, et une insouciance vis-à-vis des oppresseurs qui me poursuivaient nuit et jour, recensaient mes déplacements et mes mouvements. Quelle que soit l’issue de ce dossier, je ne me laisserai pas abattre. Je garderai la tête haute. Je n’ai aucune crainte et aucune inquiétude. Je n’ai nui à personne, et n’ai trahi ni mes principes, ni les fondements de mon éducation, ni mes référentiels politiques, ni la confiance de mes amies et amis.
  • L’oppression n’est pas un horizon. La liberté arrivera, inévitablement. Si le moment est venu pour moi de payer le prix de mes engagements, au nom de la jeune génération tourmentée née entre l’ancien régime de Hassan II et le prétendu nouveau régime de Mohammed VI, je suis prêt à le payer avec courage, et j’irai vers mon destin rassuré, souriant et la conscience tranquille.

Écrit le mardi 28 juillet 2020 à Casablanca.

Lien vers vidéo : https://www.facebook.com/freeomarradi/videos/924390098062699/



Vidéos :
Forbidden Stories revient sur les enquêtes qui font d’Omar Radi une cible pour les autorités marocaines.

Omar Radi - Vidéo tournée avant son arrestation (sous-titre FR)

Revue de presse écrite francophone (non exhaustive) :
7 janvier 2020 – Médiapart Omar Radi : « Au Maroc, on revit les années de plomb de Hassan II » Le journaliste marocain Omar Radi a été jeté en prison pour avoir dénoncé la justice de son pays dans un tweet. Libéré après un élan de solidarité internationale, il revient sur son arrestation ainsi que sur le climat répressif qui règne au Maroc.

24 juin 2020 - Le Monde : Maroc : le journaliste d’investigation Omar Radi longuement interrogé par la police Après plusieurs heures d’interrogatoire, le journaliste Omar Radi est ressorti des locaux de la police où il avait été convoqué dans le cadre d’une enquête, deux jours après la mise en cause du pouvoir marocain dans l’espionnage de son téléphone.

25 juin 2020 – Médiapart Au Maroc, le régime s’acharne sur le journaliste Omar Radi Le journaliste marocain Omar Radi, qui fut emprisonné pour un tweet dénonçant la justice de son pays, était convoqué ce jeudi par la police après des révélations de l’ONG Amnesty International sur l’espionnage qu’il a subi de la part des autorités.

27 juin 2020 - Le Monde : Le Maroc dément l’espionnage du journaliste Omar Radi Amnesty International a affirmé lundi, dans un rapport, que le téléphone d’Omar Radi, un journaliste et militant des droits humains marocain, a été piraté par les autorités du royaume.

6 juillet 2020 – Médiapart Maroc : le journaliste marocain Omar Radi interpellé dimanche soir Le journaliste marocain et militant des droits humains Omar Radi, au cœur d’une double affaire d’espionnage, a été interpellé dimanche soir pour « ivresse publique et violences » puis placé en garde à vue à Casablanca, a-t-on appris lundi auprès du porte-parole de la sûreté nationale (DGSN).

6 juillet 2020 - Le Monde : Les journalistes marocains Omar Radi et Imad Stitou relâchés après un long interrogatoire Ils avaient été arrêtés après une altercation avec un cameraman de la chaîne Chouf TV. Les autorités marocaines ont accentué leur pression sur Omar Radi depuis la publication d’un rapport dénonçant l’espionnage de son téléphone.

16 juillet 2020 - Le Monde : Au Maroc, 110 journalistes se mobilisent contre les « médias de diffamation » Dans un manifeste, ils appellent notamment le Conseil national de la presse à prendre des « sanctions disciplinaires » contre ceux qui violent le code de déontologie.

16 juillet 2020 – Orient XXI : Maroc. Cette « stratégie sexuelle » qui lamine les journalistes « Le régime qui ne semble craindre que l’opinion publique internationale choisit les accusations qui divisent celle-ci tout en provoquant son attentisme. Comme à son habitude dans ce genre de dossier, il œuvre pour empêcher l’établissement d’une solidarité envers les accusés, en discréditant ou en diabolisant sa cible, en intimidant les premiers soutiens, en court-circuitant les réseaux et en anticipant la médiatisation des affaires en sa faveur notamment à l’international. »

29 juillet 2020 - Le Monde : Au Maroc, le journaliste Omar Radi placé en détention pour « viol » et « financements étrangers » Le défenseur des droits de l’homme a déjà été condamné à quatre mois de prison avec sursis pour avoir critiqué un juge. L’ONG Amnesty International estime qu’il est harcelé par les autorités marocaines du fait de son indépendance.

30 juillet 2020 – Libération : Au Maroc, le journaliste indépendant Omar Radi, poursuivi pour viol, dénonce « un coup monté » Ces derniers mois, trois procédures judiciaires ont été lancées contre Omar Radi, connu pour ses critiques ouvertes du régime. Il a été placé en détention mercredi.

30 juillet 2020 – Democraty Now ! : “They Have No Evidence Against Me” : Moroccan Journalist Omar Radi Jailed After He Criticized Gov’t (version française disponible)

1er Août 2020 - RFI : Affaire Radi au Maroc : temps difficiles pour la presse et restriction des libertés

1er août 2020 ATMF (Association des travailleurs maghrébins de France) L’arrestation du journaliste d’investigation marocain Omar RADI : un viol caractérisé de la liberté d’expression – Une réhabilitation de l’arbitraire et de la démesure du pouvoir répressif

2 août 2020 – Médiapart Free Omar Radi Du Maroc on connaît les vacances, le soleil, l’accueil, les tajines et le couscous... Une sorte de Dolce Vita si on accepte de fermer les yeux sur le manque de démocratie, la misère et la souffrance d’une très grande partie de la population qui arrive juste à survivre. Des voix s’élèvent, celles des journalistes indépendants. Elles et ils le paient de leur liberté.

Notes

[1Dimanche 5 juillet vers 23 heures Omar Radi et Imad Stitou ont été embarqués par la police après une altercation avec un cameraman de Chouf TV, un support réputé proche du pouvoir, qui a diffamé pendant de longues semaines les deux journalistes. En début de soirée, les deux journalistes se sont rendus au Vertigo, un pub du centre-ville. Au sortir de l’établissement, Omar Radi a remarqué la présence du cameraman de Chouf TV qui avait pris l’habitude de le harceler lors de ses convocations successives par la police. Le cameraman s’était garé à bord d’une Clio à l’entrée du pub en compagnie de son épouse, également journaliste à Chouf TV, et de leur enfant. Selon les témoignages recueillis par Le Desk auprès de personnes ayant croisé Radi et Stitou durant la soirée, le véhicule est demeuré stationné devant le Vertigo des heures durant, ce qui laisse supposer que ses occupants attendaient patiemment la sortie des deux journalistes. Constatant que le cameraman de Chouf TV avait l’intention de les filmer, les deux journalistes ont tenté de faire de même à l’aide de leurs smartphones. C’est alors que l’employé de Chouf TV est descendu de sa voiture pour vociférer dans la rue, accusant Radi et Stitou de l’avoir agressé alors qu’il se trouvait en présence de sa famille. Moins d’une minute plus tard, un fourgon de police qui se trouvait stationné à l’angle de la rue, est arrivé en trombe sur les lieux pour embarquer les deux journalistes. Suite à cet événement, les deux journalistes sont poursuivis en état de liberté et doivent comparaître devant le tribunal de première instance de Casablanca le 24 septembre. Ils sont accusés d’ivresse sur la voie publique, insultes et enregistrement vidéo d’une personne sans son consentement concernant Imad Stitou. Les mêmes chefs d’accusation ont été retenus contre Omar Radi, en plus de faits de violence. Le cameraman de ChoufTV.ma et son épouse seront quant à eux poursuivis pour insultes et enregistrement vidéo d’une personne sans son consentement en vue de nuire à sa vie privée.

ATTAC/CADTM Maroc

membre du réseau CADTM, l’Association pour la Taxation des Transactions en Aide aux Citoyens au Maroc (ATTAC Maroc) a été créée en 2000. ATTAC Maroc est membre du réseau international du Comité pour l’annulation de la dette du tiers monde (CADTM) depuis 2006 (devenu Comité pour l’abolition des dettes illégitimes depuis juin 2016). Nous comptons 11 groupes locaux au Maroc. ATTAC veut être un réseau aidant à l’appropriation par les acteurs engagés dans l’activité sociale, associative, syndicale et plus largement militante des enjeux de la mondialisation sur les problématiques de résistance sociale et citoyenne.
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