De l’Afrique du Sud à Israël, l’État grec a toujours eu un faible pour l’apartheid
21 mai 2024 par Yorgos Mitralias

Photo : Thérèse Di Campo
« Si certains pensent qu’ils peuvent répéter ce qu’ils ont pu voir dans d’autres pays et occuper des universités, planter des tentes et foutre le bordel, ils se trompent profondément. »
Cette -si éminemment délicate- déclaration du Premier ministre grec, qui a suivi l’« évacuation » brutale de la faculté de droit le mardi 14 mai (28 arrestations), ne peut surprendre que les personnes non informées : l’État grec et ses gouvernements ont toujours eu un faible pour tout ce qui touche à l’apartheid et aux régimes d’apartheid ! Aujourd’hui Israël, jadis l’Afrique du Sud et la Rhodésie. Et ce, non seulement pour des raisons d’affinités électives idéologiques, mais surtout parce que les intérêts (matériels) des diverses élites grecques l’exigent. D’ailleurs, cette si manifeste « faiblesse » pour ces régimes monstrueux a presque toujours poussé l’État grec et ses gouvernements à braver les recommandations et les décisions de la soi-disant « communauté internationale » (ONU, etc.) et à violer les blocus économiques (embargos) imposés à ces régimes, tout en traitant d’« anarchistes », voire de « terroristes », ceux qui respectaient et voulaient appliquer ces décisions de la communauté internationale. En d’autres termes, un peu comme M. Mitsotakis le fait aujourd’hui…
À cette époque, pas si lointaine que ça car elle a duré pratiquement jusqu’à la fin de ces régimes d’apartheid, les tristement célèbres armateurs grecs perpétuant une longue tradition de leurs congénères, violaient allégrement l’embargo imposé par l’ONU à la Rhodésie raciste de Ian Smith. Et de l’autre coté, l’État grec et ses capitalistes se transformaient en un véritable « lavoir » des exportations sud-africaines, « afin d’obtenir le cachet grec et ne plus être soumises à l’embargo de l’ONU ». Et cette histoire continue aujourd’hui avec la bénédiction de l’actuel gouvernement grec de M. Mitsotakis, qui célèbre les succès de ces mêmes armateurs ou de leurs descendants, qui font des milliards en violant ou/et en profitant des embargos en cours, « pour transporter le pétrole russe ». C ‘est ainsi que selon un très instructif article de Forbes publié le 16 mai, « les sanctions imposées après l’invasion de l’Ukraine ont fait grimper en flèche la valeur du pétrole, propulsant la fortune de plusieurs magnats grecs du transport maritime à des niveaux record et créant au moins sept nouveaux milliardaires ». Alors, vu que 9 sur 10 des médias grecs appartiennent à ces mêmes armateurs milliardaires, il est plus que « normal » qu’ils soutiennent pleinement les obsessions répressives de M. Mitsotakis contre ces étudiants qui persistent à vouloir empêcher de tourner en rond les affaires peu recommandables de ces messieurs avec des célébrités génocidaires et va-t-en guerre comme Vladimir Poutine et Bibi Netanyahou…
À cette époque, ce fut donc l’ONU et son embargo, et aussi la campagne internationale de boycott de l’Afrique du Sud raciste. Aujourd’hui, ce sont les étudiantes du monde entier, ceux qui - selon M. Mitsotakis - « occupent les universités, y plantent des tentes et foutent le bordel », parce qu’ils mènent une campagne analogue et veulent imposer un embargo analogue à l’Israël de l’apartheid. Comment ? En frappant les racistes là où ça leur fait le plus mal, dans leur portefeuille. Et malgré la répression féroce, avec des succès déjà notables.
Comme par exemple en Espagne, où la Confédération des universités espagnoles (CRUE), qui regroupe 77 universités (50 publiques et 27 privées) vient de prendre la décision historique de rompre tout lien avec les universités et les entreprises israéliennes ! Et en plus, de renforcer les relations avec les universités palestiniennes et le système éducatif palestinien, tout en luttant contre l’antisémitisme et l’islamophobie ! Et tout ça grâce à la mobilisation des étudiantes espagnoles et catalanes qui ont occupé leurs universités, et plus généralement... « y on semé le bordel » parce que tout simplement ils n’étaient pas suffisament impassibles pour se contenter de suivre en direct sur leurs écrans de télévision le génocide des Palestiniens de Gaza. Tout comme cela s’est produit en Irlande, où le Trinity College a pris la décision de se désinvestir d’Israël à la suite de la mobilisation de ses étudiants. Et comme cela doit se passer partout où les universités ont développé des relations étroites avec cet Israël d’apartheid et ses institutions complices.
Alors, bien que provisoire, notre conclusion ne laisse pas de doutes : la bataille n’en est qu’à ses débuts et sera aussi féroce que le génocidaire Natanyahou et ses divers complices -genre Mitsotakis- semblent le souhaiter. Mais la cause ne pourrait être plus sacrée : la défense de la vie contre les adeptes de la destruction et de la mort !
Journaliste, Giorgos Mitralias est l’un des fondateurs et animateurs du Comité grec contre la dette, membre du réseau international CADTM et de la Campagne Grecque pour l’Audit de la Dette. Membre de la Commission pour la vérité sur la dette grecque et initiateur de l’appel de soutien à cette Commission.
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