Satisfaire les besoins sociaux et permettre aux chômeuses et chômeurs de percevoir au moins le salaire minimum

17 mai 2018 par Didier Epsztajn , GACDAC


« 6,6 millions de personnes sont inscrites à Pôle Emploi dont un tiers sont des travailleurs précaires. Seuls 43% des chômeurs inscrits perçoivent une allocation. 2 millions de personnes, chômeurs non-inscrits (radiés ou découragés) et en recherche d’emploi sont exclus des chiffrages. Au total, on estime à plus de 9 millions, le nombre de personnes à la recherche d’un emploi, ce, pendant que les chiffres officiels du chômage continuent à masquer la précarité du travail en continuelle augmentation »



Les auteur·es soulignent donc que « Le régime d’Assurance chômage ne répond donc pas aux besoins de protection sociale des travailleurs.es et son équilibre financier repose sur un endettement croissant sur les marchés financiers Marchés financiers
Marché financier
Marché des capitaux à long terme. Il comprend un marché primaire, celui des émissions et un marché secondaire, celui de la revente. À côté des marchés réglementés, on trouve les marchés de gré à gré qui ne sont pas tenus de satisfaire à des conditions minimales.
 »
et qu’il s’agit bien de choix politiques concrets. Iels (Elles et ils) interrogent : « D’où vient la dette Dette Dette multilatérale : Dette qui est due à la Banque mondiale, au FMI, aux banques de développement régionales comme la Banque africaine de développement, et à d’autres institutions multilatérales comme le Fonds européen de développement.
Dette privée : Emprunts contractés par des emprunteurs privés quel que soit le prêteur.
Dette publique : Ensemble des emprunts contractés par des emprunteurs publics.
de l’Assurance chômage ? Comment s’est-elle accrue ? A qui appartient-elle ? Est-elle légitime ? »
.

Le régime d’Assurance chômage ne répond pas aux besoins de protection sociale des travailleurs.es et son équilibre financier repose sur un endettement croissant sur les marchés financiers

En absence de certaines informations et de réponses, ce rapport ne peut être exhaustif. Néanmoins un instrument de travail et de mobilisation.

« Nous avons le plaisir de soumettre nos travaux au grand public afin que ce rapport intermédiaire fondé sur une expertise citoyenne, toutes et tous puissent en disposer, agir en connaissance de cause et donner corps à une protection sociale qui satisfasse les besoins humains fondamentaux ».

Les auteur·es présentent l’Assurance Chômage (la notion même d’assurance aurait mérité d’être critiquée), son contexte et les conséquences de la réforme en cours (dont le transfert des coûts aux contribuables), « Avec cette réforme de l’Assurance chômage, c’est tout l’édifice de la protection sociale qui est visé », l’antinomie que représente la dépendance aux marchés financiers et le service public, le rôle de la cotisation sociale et de la protection sociale généralisée, la construction de la dette de l’Unedic, « L’insuffisance des recettes de cotisations et un nombre de chômeurs trop important. Le taux de cotisation est insuffisant pour permettre une couverture complète et correcte des chômeurs », l’histoire et le fonctionnement de cette dette et la nécessité d’un audit de cet endettement.

Je souligne le chapitre Enquête et en particulier le rôle des agences de notation Agences de notation Les agences de notation (Standard and Poor’s, Moody’s et Fitch en tête) sont des agences privées qui évaluent la solvabilité et la crédibilité d’un émetteur d’obligations (État, entreprise). Jusqu’aux années 1970 elle étaient payées par les acheteurs potentiels d’obligations, depuis la libéralisation financière la situation s’est inversée : ce sont les émetteurs d’obligations qui rémunèrent les agences pour qu’elles les évaluent... Reconnaissons leur qualité de travail : c’est ainsi que Lehman Brothers se voyait attribuer la meilleure note juste avant de faire faillite. , les différents « investisseurs », les demandes du Medef, les limites construites à la « transparence », la Garantie de l’État, les contrôles interne et externe, l’effacement de certaines données, le meccano financier… sans oublier la question : à qui profite cette dette.

Les auteur·es reviennent sur cette Dette sociale et sur « qui doit à qui ? », la possible annulation de la dette illégitime. Iels font des propositions pour « Sortir de la financiarisation et du système-dette » et par exemple : Réduire le temps de travail et baisser l’âge de départ à la retraite ; Augmenter les salaires et les cotisations sociales et notamment celles de l’Assurance chômage ; Créer un véritable service public de l’emploi ; Créer un système bancaire socialisé au service de tous.

Un travail très utile, à faire connaître.

Avec cette réforme de l’Assurance chômage, c’est tout l’édifice de la protection sociale qui est visé

« Nous appelons les citoyens et les citoyennes à se mobiliser contre la répression des chômeurs et la baisse des indemnisations, les cadeaux faits au patronat, la taxation des salariés et des retraités ; à œuvrer pour la vérité et la totale transparence auxquelles ont droit les travailleurs en exigeant un audit citoyen de la dette de l’Unedic. ».

Le rapport se termine par une Lettre aux gestionnaires reproduite ci-dessous.

A télécharger : AUDIT DETTE ASSURANCE CHOMAGE rapport intermédiaire-1
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Audit de la dette de l’assurance-chômage, Rapport intermédiaire par le groupe d’Audit Citoyen de la Dette de l’Assurance Chômage (GACDAC), Avril 2018, 52 pages

Didier Epsztajn


Lettre aux gestionnaires

Groupe d’Audit Citoyen de la Dette de l’Assurance Chômage Objet : demande d’informations complémentaires

Nassigny, le 25 avril 2018

A l’attention de la Ministre du travail, des Administrateurs, de la Présidente du Directeur et du Directeur financier de l’Unédic,

Mesdames, Messieurs,

Nous souhaitons porter à votre connaissance notre rapport intermédiaire sur la dette de l’Assurance chômage, qui constitue le premier volet d’un audit citoyen que nous réalisons.

Nous sommes fondés et légitimes à agir comme nous l’expliquons dans le rapport précité en qualité de cotisants, d’ayant droits, de travailleurs et/ou de citoyens. Consacrant nos travaux depuis plusieurs mois à la financiarisation de l’UNEDIC – son histoire et ses procédures – nous sommes assurés qu’en votre qualité de Ministre du travail, d’Administrateur, de Présidente, de Directeur, de Directeur financier de l’organisme, vous saurez accompagner notre démarche à bonne fin.

En effet, les comptes de l’Assurance chômage présentent un endettement important malgré les multiples mesures entreprises ces dernières années et destinées dans leur ensemble à réduire la charge financière (notamment pour la part consacrée à l’indemnisation des allocataires). Et nous sommes loin d’être assurés que la prise en main de la gestion de l’Assurance chômage par l’Etat et financée désormais en partie par l’impôt, ne constitue pas davantage une aliénation consentie aux marchés financiers.

Nous avons pris connaissance des récents rapports ou déclarations écrites affirmant une embellie à l’horizon 2020. Cependant nous nous interrogeons sur le mode de gouvernance financière choisi, qui d’après les éléments disponibles, démontre un accroissement régulier depuis une trentaine d’années, et une certaine accélération du recours à l’emprunt sur les marchés financiers, notamment ces cinq dernières années.

Au demeurant, la manière dont vous présentez le retour à l’équilibre de l’Assurance chômage prévu au 2e semestre de l’année 2019, nous semble quelque peu aventureuse.

Vous semblez confiant dans l’évolution des taux d’intérêt Taux d'intérêt Quand A prête de l’argent à B, B rembourse le montant prêté par A (le capital), mais aussi une somme supplémentaire appelée intérêt, afin que A ait intérêt à effectuer cette opération financière. Le taux d’intérêt plus ou moins élevé sert à déterminer l’importance des intérêts.
Prenons un exemple très simple. Si A emprunte 100 millions de dollars sur 10 ans à un taux d’intérêt fixe de 5 %, il va rembourser la première année un dixième du capital emprunté initialement (10 millions de dollars) et 5 % du capital dû, soit 5 millions de dollars, donc en tout 15 millions de dollars. La seconde année, il rembourse encore un dixième du capital initial, mais les 5 % ne portent plus que sur 90 millions de dollars restants dus, soit 4,5 millions de dollars, donc en tout 14,5 millions de dollars. Et ainsi de suite jusqu’à la dixième année où il rembourse les derniers 10 millions de dollars, et 5 % de ces 10 millions de dollars restants, soit 0,5 millions de dollars, donc en tout 10,5 millions de dollars. Sur 10 ans, le remboursement total s’élèvera à 127,5 millions de dollars. En général, le remboursement du capital ne se fait pas en tranches égales. Les premières années, le remboursement porte surtout sur les intérêts, et la part du capital remboursé croît au fil des ans. Ainsi, en cas d’arrêt des remboursements, le capital restant dû est plus élevé…
Le taux d’intérêt nominal est le taux auquel l’emprunt est contracté. Le taux d’intérêt réel est le taux nominal diminué du taux d’inflation.
qui marquerait selon vous, le signe d’une meilleure conjoncture laquelle entrainerait mécaniquement une augmentation des contributions ou saurait, via l’impôt alimenter le nouveau système d’Assurance chômage. Cependant, rien ne dit que le poids de la dette, tel qu’il est structuré aujourd’hui, ne vienne grever lourdement les finances de l’Assurance chômage et entamer votre optimisme. Nous craignons notamment que cet endettement puisse caractériser une dette illégitime au regard du droit international.

En effet, celui-ci stipule par diverses dispositions et une jurisprudence constante, qu’un endettement survenu au mépris de l’intérêt général et des droits humains fondamentaux auxquels appartiennent les droits à la protection sociale – l’Assurance chômage, étant partie intégrante de ce bien fondamental qu’est la protection sociale – pourrait constituer non seulement un cas de responsabilité délictueuse, mais une situation d’illégalité manifeste.

Certains que vous partagez nos craintes, vous ne sauriez mieux faire que de soulever publiquement cet enjeu d’importance pour l’intérêt général, lequel constitue le socle et l’objectif d’une caisse d’Assurance chômage.

Ainsi, nous vous soumettons un ensemble de points qui méritent des éclaircissements et informations complémentaires, et nécessaires pour mener à bien un audit conforme et exhaustif des finances de l’Assurance chômage.

1) Comme le font déjà les collectivités locales, nous aurions besoin que l’Unedic publie un état détaillé de la dette de l’Unedic depuis 10 ans (2007-2017) avec un historique du paiement des intérêts et du remboursement du capital, et que soit établie une évolution de la dette par type de titres.

2) Qu’il soit mis fin aux documents « remis sur table » lors des réunions du Conseil d’Administration et que la transparence devienne la règle. Tous les documents soumis au Conseil d’Administration et ne concernant pas les données des assurés sociaux doivent être publiés sur le site public de l’Unedic.

3) Que les contrats commerciaux qui lient Pôle emploi aux opérateurs privés soient également publiés. Notamment, nous vous demandons de publier les contrats qui lient :

  • l’UNEDIC aux prestations de commissariat aux comptes
  • l’UNEDIC aux prestations d’Audit externe
  • l’UNEDIC aux agences de notation
  • l’UNEDIC à la fourniture de prestations d’assistance et de conseil au pilotage
  • l’UNEDIC aux projets des Systèmes d’information (Dsi)
  • Pôle emploi aux prestations de pilotages
  • Pôle emploi aux prestations des systèmes d’information
  • Pôle emploi aux prestations d’accompagnement des chômeurs
  • Pôle emploi aux prestations concernant les applications de la dématérialisation
  • Pôle emploi aux prestations de services d’insertion professionnelle
  • Pôle emploi aux prestations externalisées, détaillées par rubrique ci-dessus demandées : type appui à distance, traitement des demandes d’inscriptions, gestion hotline, AEM, traitement manuel des flux dématérialisés
  • Pôle emploi aux interfaces : Bob l’emploi, Emploi store…

4) Nous voudrions connaître :

  • Le cadre légal sous lequel est assujetti l’Association UNEDIC et le cadre légal de la mission de services publics de l’UNEDIC en matière de recherche de financement et quel sera celui-ci dans le cadre du projet de loi à venir
  • Le détail des Acquisitions et des cessions de placement
  • Le détail des Services extérieurs
  • Le détail de la ligne des Honoraires et Frais d’actes

5) Comment justifiez-vous les écarts de chiffrages du montant de la dette, allant de 33 à 36 milliards d’endettement à l’heure actuelle ?

6) Est-ce que les Honoraires et frais d’actes (dont dépenses de financement des organisations syndicales et patronales), soit 20,1 millions d’euros visibles dans le rapport financier 2016, comprennent la dotation financière (de 4,7M€) destinées aux organisations d’employeurs et de salariés ?

7) Nous voudrions obtenir un historique de la Gestion financière de L’Unedic depuis 1959. (Qui était le premier partenaire financeur de la dette de l’UNEDIC ? A qui étaient payés les intérêts de la dette lors du premier emprunt de l’Unedic, au bout de combien d’année le capital a-t-il été remboursé ?)

8) Quel a été le coût du premier emprunt ? Simultanément pour la même période que ce premier emprunt, quelle était la croissance en % du nombre de chômeurs indemnisés ?

9) Enfin, comment appréciez-vous le fait qu’un nombre conséquent des détenteurs de titres de la dette Titres de la dette Les titres de la dette publique sont des emprunts qu’un État effectue pour financer son déficit (la différence entre ses recettes et ses dépenses). Il émet alors différents titres (bons d’état, certificats de trésorerie, bons du trésor, obligations linéaires, notes etc.) sur les marchés financiers – principalement actuellement – qui lui verseront de l’argent en échange d’un remboursement avec intérêts après une période déterminée (pouvant aller de 3 mois à 30 ans).
Il existe un marché primaire et secondaire de la dette publique.
de l’Unedic aient des comptes ouverts dans des paradis judiciaires et fiscaux ?

Ce rapport d’audit citoyen constitue à la fois un instrument de travail et de mobilisation

Nous ne doutons pas que vous aurez à cœur de nous éclairer sur ces différents points et que vous mettrez tout en œuvre pour permettre un audit exhaustif et citoyen de la dette de l’Assurance chômage. D’avance, nous vous en remercions ; et attendant votre réponse, nous poursuivons nos investigations et en publions les résultats.

Nous vous adressons nos meilleures salutations.

Les membres du GACDAC


GACDAC

Groupe d’audit citoyen de la dette de l’Assurance chômage UNEDIC

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