Calderon, Colom, Arias, Morales, Chavez, Correa, Castro, Torrijos... Tant de
chefs d´État latino-américains qui décident de se réunir en urgence ce
lundi a Managua , c´est une première. L´histoire retiendra leur unanimité
et leur fermeté. Les pays de l´ALBA, du SICA, du Groupe de Rio et de l´OEA
exigent “le retour immédiat et inconditionnel du président Zelaya au
Honduras”. Sa volonté affirmée de rentrer au pays dès jeudi lui vaut une
standing ovation.
Alors que ses homologues dénoncent "le retour à la barbarie subie à l´époque
de la National Security" et refusent de “revenir à l´âge des cavernes”, le
journal français Le Monde, lui, évoque un “coup d´État d´un genre nouveau"
[1.] Ce titre, Sabot l´emprunte au “principal quotidien” nicaraguayen - sans
dire qu´il s´agit surtout du plus réactionnaire - « La Prensa ». C´est ce
journal que le président dominicain Leonel Fernandez, connu pour sa
prudence , brandit ce soir a Managua devant la trentaine de collègues
latino-américains pour en dénoncer la manchette : "deux présidents se
disputent un siège« . »Il n´y a qu´un président du Honduras, corrige un
Fernandez indigné, celui qui est sorti des urnes !". Le Monde feuillette
la “presse latino-américaine” comme si on pouvait trouver le pluralisme
dans la concentration économique de la presse écrite. Technique connue :
se retrancher “objectivement” derrière les citations. Cela permet de jeter
une ombre sur la consultation électorale avortée, cette enquête demandée
par 400.000 signatures citoyennes et que les partis de l´élite putschiste,
majoritaires au congrès, craignaient tant.
Pourquoi s´inquiéter d´une consultation voulue par la population au point
que les habitants montaient dimanche des barricades pour empêcher les
militaires de confisquer les urnes ? Mais voyons, cher lecteur, parce que
les honduriens pourraient demander ensuite une réforme constitutionnelle.
Et si les gens votent et s´ils décident de réélire Zelaya, eh bien, ce
sera - nous vous l´expliquerons bientôt - la dictature comme au Venezuela,
vous savez bien.
C´est la faute de Zelaya de croire que ni les États-Unis ni la Banque
Mondiale ne rendront la vue à des milliers de pauvres ou ne donneront aux
paysans les moyens de produire pour nourrir la population et de préférer
les programmes sociaux de l´ALBA et du Petrocaribe initiés par le
gouvernement venezuelien.
Pour écarter tout soupçon de partialité, le Monde cite un journal argentin,
qui nous précise-t-on est “de gauche”. “50 % pour Hitler, 50 % pour les
juifs” (Godard). Pourquoi faudrait-il démonter les rouages de l´élite
économique hondurienne et ces conseillers d´un Pentagone qui pèsent plus
qu´Obama dans leur volonté de briser le maillon le plus faible de l´ALBA ?
Nicolas Sabot cite la presse hondurienne mais ne dit rien du coup d´État
médiatique, du monopole privé du spectre radioélectrique, de ces
télévisions qui passent des telenovelas pour censurer la résistance de la
population. Tout récemment Lula, Correa et même Obama ont critiqué ces
médias qui attentent contre les institutions démocratiques ? Des “fils de
Chavez” sans doute.
Le Monde ne dira rien non plus de la part active du président venezuelien
dans la construction de ce front pluraliste de chefs d´ëtat pour sauver la
democratie au Honduras. Alors que le président venezuelien a reaffirme a
Managua, entouré de ses collêgues du reste du continent, que “l´ere des
fusils est bien finie et que les revolutions doivent etre pacifiques”, le
Monde reprend dès dimanche la vulgate mondiale :
“Chavez-met-ses-troupes-en-alerte”.
Pour conclure son article, Antonin Sabot a choisi un dessin de la Prensa
(Panama). Le président du Honduras court en pleurant vers son « père », Hugo
Chavez, qui lui demande, énervé : "Qui t’a mis ce coup ? Que je lui en mette
un !" Lorsque le Pinochet hondurien (Romeo Vasquez, formé a l´Ecole des
Amériques) rejoindra sa caserne grâce a la resistance civile et aux efforts
conjugués des chefs d´État latinoamericains, les honduriens devraient
décorer “Le Monde” pour sa courageuse contribution à la mobilisation
générale.