printer printer Cliquer sur l'icône verte à droite
La dette est un enjeu au cœur de la mondialisation
par Arnaud Zacharie
29 avril 2016

Message envoyé par Arnaud Zacharie à l’assemblée mondiale du CADTM réunie à Tunis du 26 au 30 avril 2016. Arnaud Zacharie a été un des fondateurs d’ATTAC à Liège et a été permanent du CADTM entre 2001 et 2003. Depuis 2008, il assume le secrétariat général du CNCD, la coordination des organisations belges francophones et germanophones qui sont actives dans la solidarité Nord/Sud. Il est l’auteur ou coauteur de plusieurs livres.

La dette joue un rôle central dans la mondialisation et le financement du développement. A la fin du 20e siècle, le problème de la dette était limité aux pays du tiers-monde, dont les plus pauvres et les plus endettés avaient comme principaux créanciers le FMI et la Banque mondiale. L’« initiative PPTE » d’allégement de la dette d’une trentaine de pays pauvres très endettés et l’amélioration de la conjoncture internationale, suite à la hausse des prix des matières premières et à la baisse des taux d’intérêt, ont contribué à rendre plus soutenable la dette des pays en développement au cours des années 2000. Mais le contexte est désormais très différent.

D’une part, la conjoncture internationale s’est retournée, suis à l’effondrement des prix des matières premières et à la hausse planifiée des taux d’intérêt aux Etats-Unis, alors que de nombreux pays en développement, dont des pays pauvres d’Afrique subsaharienne, ont emprunté sur les marchés financiers internationaux durant les années de vache grasse. La soutenabilité de leur dette est désormais fortement menacée.

D’autre part, la dette chinoise – surtout privée – a fortement augmenté depuis 2008 : la dette totale de la Chine atteint désormais 250% du PIB, comme aux Etats-Unis, suite à une hausse beaucoup plus rapide que celle expérimentée par les Etats-Unis avant 2008. Une crise de la dette en Chine, principal moteur de l’économie mondiale depuis plusieurs années, auraient des conséquences majeures partout dans le monde.

En outre, la dette est devenue un boulet pour les économies européennes depuis 2008. La Grèce, membre de la zone euro, a battu le triste record de l’Argentine en 2001 en termes de plus important défaut de paiement de l’histoire économique. La majorité des créances du FMI portent désormais sur des pays européens et l’économie européenne est déprimée suite aux politiques d’austérité instaurée à partir de 2010.

Enfin, les « fonds vautours », spécialisés dans le rachat à bas prix de titres de la dette en vue d’entamer à terme une procédure judiciaire pour tenter d’obtenir le paiement de la totalité de la valeur nominale de ces créances, sont toujours aussi actifs. Ils viennent de gagner un important bras de fer grâce au jugement du juge Griesa aux Etats-Unis, qui a donné raison aux fonds vautours contre l’Etat argentin qui avait pourtant adopté un accord de restructuration de sa dette avec 93% de ses créanciers. Non contents de se voir ainsi gratifiés du statut de créancier prioritaire, ils se permettent d’attaquer en justice les législations adoptées pour enrayer leur action – comme c’est le cas en Belgique contre la loi récemment votée par le Parlement belge.

C’est pourquoi la dette est un enjeu majeur qui nécessite l’action d’organisations de la société civile comme le CADTM. Analyser les mécanismes de la dette et leur impact sur les droits économiques et sociaux, promouvoir leur audit et l’annulation des dettes odieuses et illégitimes, couper les ailes aux fonds vautours représentent des objectifs cruciaux que le réseau CADTM vise depuis de nombreuses années.
Je suis persuadé que l’Assemblée mondiale du CADTM à Tunis sera une nouvelle occasion de mettre l’enjeu de la dette et de ses conséquences à l’avant-plan de l’agenda international des ONG et des mouvements citoyens. Je vous souhaite à toutes et tous plein succès dans vos travaux.

Arnaud Zacharie, secrétaire général du Centre national de coopération au développement.


Arnaud Zacharie

Secrétaire général du CNCD-11.11.11