Au CADTM, on sait trop bien ce que c’est d’être flippéE, voire découragéE, par toutes ces questions sur lesquelles on sèche. Du coup, inspiréEs par nos meilleurEs piqueurs et piqueuses (notre famille, nos potes, le pizzaiolo d’en face, les gens que l’on rencontre en animation), le CADTM Liège a organisé plusieurs sessions d’élaborations collectives d’éléments de réponse à ces piques (qu’elles soient d’ordre technique ou plus « politique »).
Ce travail a engendré une brochure que vous pouvez retrouver en entier ici.
D’où vient-elle ?
Dette coloniale : les colons qui avaient emprunté de l’argent pour financer l’exploitation des pays du Sud leur ont légué (illégalement) ces dettes à l’heure de leurs « indépendances ».
Rq : Depuis, les pays du Sud ont remboursé plus de 100 fois cette dette initiale, et elle a pourtant été multipliée par 30.
Dette commerciale : ils ont été incités à s’endetter auprès des banques européennes qui cherchaient à écouler leurs liquidités.
Dette bilatérale : les pays riches leur ont prêté à condition qu’ils utilisent l’argent pour acheter leurs propres marchandises (c’est ce qu’on appelle « l’aide liée »).
Dette multilatérale : les IFIs (institutions financières internationales) – Banque mondiale en tête – leur ont multiplié les prêts pour les influencer et empêcher la « contagion communiste ».
À quoi a-t-elle servi ?
Soutien à des dictatures et détournement d’argent (la fortune des despotes correspond aujourd’hui à 14 fois la dette de leurs pays).
Financement d’ « éléphants blancs » : mégaprojets très coûteux et inutiles pour la population.
Achat de matériel militaire, financement de la répression, etc.
Crise de la dette
Après que les prix des matières premières aient chuté sur les marchés internationaux et que les taux d’intérêts aient explosé sous l’impulsion de la FED (banque centrale américaine), la crise de la dette s’est installée dans les années 1980.
Le FMI intervient alors pour fournir des « prêts de secours » aux pays en difficulté, à chaque fois sous deux conditions : continuer à rembourser la dette et appliquer des mesures néolibérales (les fameux « plans d’ajustement structurel »). Comme au Nord, plus tard.
Quelles solutions ?
Les institutions de Bretton Woods (FMI et Banque mondiale), en partenariat avec les créanciers publics (Club de Paris) et les créanciers privés (Club de Londres) ont mis en place l’initiative PPTE (« Pays pauvres très endettés »). Il s’agissait de restructurer certaines dettes pour éviter un défaut de paiement et s’assurer que les pays puissent continuer à rembourser. Ces plans « d’aide » étaient accompagnés de nouvelles conditionnalités...
Par contre, des pays ont suspendu le paiement de leur dette sans demander l’avis des créanciers (Argentine 2001), voire l’ont auditée pour ensuite en annuler une partie (Équateur 2009).
Remarques
La dette des pays du tiers-monde représente moins de 2 % de toutes les dettes publiques.
Les pays du Sud représentent 82 % de la population mondiale mais ne se partagent que 32 % de la richesse mondiale. 1/3 de la population mondiale vit ainsi avec moins de 2$ par jour.
C’est le Sud qui finance le Nord et non l’inverse. Pour 1€ « reçu », les pays du Sud envoient plus de 2€ au Nord.
Lire l’article « Dette au Sud : où en est-on ? » http://cadtm.org/Dette-du-sud-ou-en-est-on
Voir aussi Les Chiffres de la dette 2015, Chapitre 3 : La dette au Sud, CADTM, http://cadtm.org/La-Dette-au-Sud
Concepts
Annulation/Répudiation :
C’est clair ;).
Suspension de paiement :
Arrêt du remboursement de la dette pour un temps (in)déterminé, généralement décidé de manière unilatérale.
Restructuration :
Changement dans les termes du contrat, négocié avec les créanciers (diminution des taux d’intérêts, allongement des échéances de capital, annulation d’une partie du stock de la dette). Le plus souvent, les anciens titres de la dette sont échangés contre de nouveaux, et l’accord est accompagné de nouvelles conditionnalités.
Audit citoyen de la dette :
Autopsie populaire de la dette.
Il s’agit moins d’une enquête menée par des expertEs que d’un exercice démocratique de base qui consiste à ce que la population vérifie ce qu’on fait avec son argent.
Les objectifs principaux d’une campagne d’audit sont de : (1) faire connaître à un maximum de personnes des faits et chiffres peu connus de nature à souligner l’illégitimité de la dette qu’elles remboursent ; (2) fournir un maximum d’arguments permettant d’en remettre en cause le paiement aveugle ; (3) proposer des alternatives concrètes à ce paiement aveugle et, tout simplement, (4) de forcer le débat sur ce sujet tabou.
Le but final de l’audit est le contrôle populaire permanent sur les comptes publics, aux côtés d’autres mesures anticapitalistes.