La Fédération nationale des associations de microcrédit (FNAM) a publié un communiqué annonçant la décision de report des échéances des microcrédits à la demande de client·es dont les activités étaient impactées par la crise sanitaire actuelle [1].
Cependant, la fédération n’a pas précisé la période de report du paiement et n’a annoncé aucune exemption d’arriérés. Elle n’indiquait pas non plus d’exemption des intérêts. Elle a conditionné le bénéfice de cette mesure à la demande de client·es en difficulté économique ainsi qu’aux capacités des associations de microcrédit.
Qu’est-ce que cela signifie exactement ?
La fédération a évité de fixer une norme unifiée pour le report des remboursements des échéances mensuelles et a laissé aux institutions de microfinance le pouvoir de fixer le report des paiements en fonction des possibilités. Chacune des institutions sera autonome dans le traitement de ses client·es, qui soumettront une demande individuelle. Les IMF feront pression et imposeront leurs conditions pour assurer le recouvrement. Elles profiteront de cette situation pour reprogrammer l’échelonnement au plus court terme possible, tout en ajoutant des frais de dossier de report de paiement, en augmentant l’assurance et en augmentant le taux d’intérêt.
Ce sont les informations que nous avons eues après des contacts avec les victimes : une institution refusant tout report, tandis qu’une autre propose un report d’un mois et une autre de deux mois. Mais ce n’est qu’une mesure injuste d’imposer le paiement des échéances mensuelles, sans que l’emprunteur·se ne connaisse les conditions du nouveau contrat. Ce sont les mêmes méthodes que les institutions de microfinance ont l’habitude d’utiliser pour tromper leurs « client·es » quant aux obligations contenues dans le contrat de prêt qu’elles font signer sans que les client·es comprennent le contenu, ainsi que le taux d’intérêt effectif total qu’elles font payer en échange des petites avances qu’elles reçoivent. Les IMF exploitent la situation de nécessité des « client·es » pour leur imposer leurs conditions.
L’Association ATTAC/CADTM Maroc a précédemment montré, à travers sa recherche de terrain, les méthodes de fraude et de dol utilisées par les institutions de microcrédit, et indiqué l’illégalité de leurs contrats de prêt et leur invalidité sur la base de la loi sur les obligations et contrats, et la loi sur la protection des consommateurs et autres.
Le communiqué de la Fédération nationale des associations de microcrédit visant à reporter le remboursement des microcrédits sans mentionner sa durée ou son exemption d’arriérés et d’intérêts, n’est qu’une tentative pour contenir le début du mouvement des victimes du microcrédit suite à la diffusion de l’appel de l’association ATTAC/CADTM Maroc, qui a appelé à l’arrêt du remboursement du microcrédit pour une période de six mois, qui peut être prolongée avec exonération d’intérêts, et à la mise en place d’une compensation non inférieure au salaire minimum, au profit des victimes dont les projets ont fait faillite ou qui ont perdu leur emploi. Tou·te·s les emprunteurs et emprunteuses qui ont contacté l’association ATTAC/CADTM Maroc ont confirmé leur volonté de défendre leur cause dans la période d’urgence sanitaire créée par la pandémie de Coronavirus en collectant des signatures, et de s’organiser en association nationale pour mettre fin à la cupidité des institutions de microfinance.
Cependant, il s’agit d’un recul, quoique léger. Cela nécessite de continuer la mobilisation de tous les emprunteurs et des emprunteuses qui représentent environ un million de personnes. L’association ATTAC/CADTM Maroc continuera à soutenir toutes les victimes du microcrédit afin de gagner la bataille de l’arrêt du paiement des mensualités pour une période de 6 mois sans intérêts. Il appelle à nouveau toutes les organisations de la lutte à accroître la solidarité et le soutien.
Secrétariat national
Rabat, le 04 avril 2020
[1] Communiqué publié le 03 avril 2020 sur le site officiel de la fédération
https://fnam.co.ma/wp-content/uploads/2020/04/Communiqu%C3%A9_Ar_Fr.pdf
membre du réseau CADTM, l’Association pour la Taxation des Transactions en Aide aux Citoyens au Maroc (ATTAC Maroc) a été créée en 2000. ATTAC Maroc est membre du réseau international du Comité pour l’annulation de la dette du tiers monde (CADTM) depuis 2006 (devenu Comité pour l’abolition des dettes illégitimes depuis juin 2016). Nous comptons 11 groupes locaux au Maroc. ATTAC veut être un réseau aidant à l’appropriation par les acteurs engagés dans l’activité sociale, associative, syndicale et plus largement militante des enjeux de la mondialisation sur les problématiques de résistance sociale et citoyenne.
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