Communiqué de presse
25 avril 2010 par CADTM
Timothy Geithner, secrétaire au Trésor des Etats-Unis, vient de lancer un
nouveau fonds nommé « Programme global pour l’agriculture et la sécurité
alimentaire » doté de 475 millions de dollars. Après de belles phrases sur
le sauvetage des banques et de l’économie, il fait le parallèle avec la
lutte contre la faim et souhaite que ce fonds vienne sauver l’agriculture
dans les pays pauvres. Ce combat lui semble être un devoir moral et une
nécessité pour assurer la stabilité du monde, dans lequel un milliard de
personnes sont sous-alimentées, ce qui ne serait plus acceptable pour le
gouvernement Obama.
Pour le CADTM, Geithner oublie un peu vite que pendant ce temps, les
subventions agricoles des Etats-Unis à leurs producteurs sapent les
fondements mêmes de l’agriculture du tiers-monde. Et les montants de ces
subventions sont autrement plus conséquents : environ 90 milliards de
dollars par an. Par ailleurs, les Etats-Unis, comme l’Union européenne,
maintiennent des barrières douanières qui empêchent souvent les
productions agricoles des pays en développement de pénétrer librement sur
leur marché.
Dans le cadre de la mondialisation
Mondialisation
(voir aussi Globalisation)
(extrait de F. Chesnais, 1997a)
Jusqu’à une date récente, il paraissait possible d’aborder l’analyse de la mondialisation en considérant celle-ci comme une étape nouvelle du processus d’internationalisation du capital, dont le grand groupe industriel transnational a été à la fois l’expression et l’un des agents les plus actifs.
Aujourd’hui, il n’est manifestement plus possible de s’en tenir là. La « mondialisation de l’économie » (Adda, 1996) ou, plus précisément la « mondialisation du capital » (Chesnais, 1994), doit être comprise comme étant plus - ou même tout autre chose - qu’une phase supplémentaire dans le processus d’internationalisation du capital engagé depuis plus d’un siècle. C’est à un mode de fonctionnement spécifique - et à plusieurs égards important, nouveau - du capitalisme mondial que nous avons affaire, dont il faudrait chercher à comprendre les ressorts et l’orientation, de façon à en faire la caractérisation.
Les points d’inflexion par rapport aux évolutions des principales économies, internes ou externes à l’OCDE, exigent d’être abordés comme un tout, en partant de l’hypothèse que vraisemblablement, ils font « système ». Pour ma part, j’estime qu’ils traduisent le fait qu’il y a eu - en se référant à la théorie de l’impérialisme qui fut élaborée au sein de l’aile gauche de la Deuxième Internationale voici bientôt un siècle -, passage dans le cadre du stade impérialiste à une phase différant fortement de celle qui a prédominé entre la fin de Seconde Guerre mondiale et le début des années 80. Je désigne celui-ci pour l’instant (avec l’espoir qu’on m’aidera à en trouver un meilleur au travers de la discussion et au besoin de la polémique) du nom un peu compliqué de « régime d’accumulation mondial à dominante financière ».
La différenciation et la hiérarchisation de l’économie-monde contemporaine de dimension planétaire résultent tant des opérations du capital concentré que des rapports de domination et de dépendance politiques entre États, dont le rôle ne s’est nullement réduit, même si la configuration et les mécanismes de cette domination se sont modifiés. La genèse du régime d’accumulation mondialisé à dominante financière relève autant de la politique que de l’économie. Ce n’est que dans la vulgate néo-libérale que l’État est « extérieur » au « marché ». Le triomphe actuel du « marché » n’aurait pu se faire sans les interventions politiques répétées des instances politiques des États capitalistes les plus puissants (en premier lieu, les membres du G7). Cette liberté que le capital industriel et plus encore le capital financier se valorisant sous la forme argent, ont retrouvée pour se déployer mondialement comme ils n’avaient pu le faire depuis 1914, tient bien sûr aussi de la force qu’il a recouvrée grâce à la longue période d’accumulation ininterrompue des « trente glorieuses » (l’une sinon la plus longue de toute l’histoire du capitalisme). Mais le capital n’aurait pas pu parvenir à ses fins sans le succès de la « révolution conservatrice » de la fin de la décennie 1970.
néolibérale, subventionner lourdement
une agriculture exportatrice revient à coup sûr à organiser une
concurrence déloyale qui ne pourra qu’appauvrir les plus faibles. C’est
ainsi que Haïti est devenu totalement dépendant du riz américain
subventionné le jour où il a été contraint par la Banque mondiale
Banque mondiale
BM
La Banque mondiale regroupe deux organisations, la BIRD (Banque internationale pour la reconstruction et le développement) et l’AID (Association internationale de développement). La Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD) a été créée en juillet 1944 à Bretton Woods (États-Unis), à l’initiative de 45 pays réunis pour la première Conférence monétaire et financière des Nations unies.
En 2022, 189 pays en sont membres.
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de
baisser ses barrières douanières, alors qu’il était quasiment
autosuffisant auparavant. Cela s’est révélé catastrophique en 2008 quand
les prix du riz ont flambé.
Parmi les mesures soutenues pas le gouvernement des Etats-Unis, le
développement des OGM
OGM
Organisme génétiquement modifié
Organisme vivant (végétal ou animal) sur lequel on a procédé à une manipulation génétique afin de modifier ses qualités, en général afin de le rendre résistant à un herbicide ou un pesticide. En 2000, les OGM couvraient plus de 40 millions d’hectares, concernant pour les trois-quarts le soja et le maïs. Les principaux pays producteurs étaient les USA, l’Argentine et le Canada. Les plantes génétiquement modifiées sont en général produites intensivement pour l’alimentation du bétail des pays riches. Leur existence pose trois problèmes.
Problème sanitaire. Outre la présence de nouveaux gènes dont les effets ne sont pas toujours connus, la résistance à un herbicide implique que le producteur va multiplier son utilisation. Les produits OGM (notamment le soja américain) se retrouvent gorgés d’herbicide dont dont on ignore les effets sur la santé humaine. De plus, pour incorporer le gène nouveau, on l’associe à un gène de résistance à un antibiotique, on bombarde des cellules saines et on cultive le tout dans une solution en présence de cet antibiotique pour ne conserver que les cellules effectivement modifiées.
Problème juridique. Les OGM sont développés à l’initiative des seules transnationales de l’agrochimie comme Monsanto, pour toucher les royalties sur les brevets associés. Elles procèdent par coups de boutoir pour enfoncer une législation lacunaire devant ces objets nouveaux. Les agriculteurs deviennent alors dépendants de ces firmes. Les États se défendent comme ils peuvent, bien souvent complices, et ils sont fort démunis quand on découvre une présence malencontreuse d’OGM dans des semences que l’on croyait saines : destruction de colza transgénique dans le nord de la France en mai 2000 (Advanta Seeds), non destruction de maïs transgénique sur 2600 ha en Lot et Garonne en juin 2000 (Golden Harvest), retrait de la distribution de galettes de maïs Taco Bell aux USA en octobre 2000 (Aventis). En outre, lors du vote par le parlement européen de la recommandation du 12/4/2000, l’amendement définissant la responsabilité des producteurs a été rejeté.
Problème alimentaire. Les OGM sont inutiles au Nord où il y a surproduction et où il faudrait bien mieux promouvoir une agriculture paysanne et saine, inutiles au Sud qui ne pourra pas se payer ces semences chères et les pesticides qui vont avec, ou alors cela déséquilibrera toute la production traditionnelle. Il est clair selon la FAO que la faim dans le monde ne résulte pas d’une production insuffisante.
figure en bonne place. La Banque mondiale, dont les
exigences ont entraîné le sacrifice de l’agriculture vivrière au Sud, est
appelée en renfort par Washington. Pourtant, l’expérience de ces 30
dernières années indique clairement que l’agriculture paysanne et vivrière
est de loin la meilleure solution pour répondre aux problèmes de la faim
et de la pauvreté qui sévit dans les campagnes des pays du Sud. Si elle
est certes capable de nourrir les populations, elle a le défaut aux yeux
de l’agrobusiness de ne pas dépendre d’achats d’intrants
Intrants
Éléments entrant dans la production d’un bien. En agriculture, les engrais, pesticides, herbicides sont des intrants destinés à améliorer la production. Pour se procurer les devises nécessaires au remboursement de la dette, les meilleurs intrants sont réservés aux cultures d’exportation, au détriment des cultures vivrières essentielles pour les populations.
à l’étranger.
Le CADTM dénonce l’idée de Geithner et de la Banque mondiale qui est de
connecter les agriculteurs de tous les pays au marché alimentaire mondial
avec un modèle productiviste et biotech dont les Etats-Unis sont les
champions. Bill Gates, grand promoteur des OGM à travers sa fondation, a
d’ailleurs été remercié par Geithner pour son implication financière dans
ce fonds. La logique sous-jacente est donc toujours bien de livrer
l’agriculture du Sud aux appétits des grandes sociétés transnationales.
Pour le CADTM, le système agricole productiviste est un très fort émetteur
de gaz à effet de serre, qui détruit la fertilité des sols et qui n’a
jamais enrichi les petits producteurs, ni au Nord ni au Sud, pas plus
qu’il n’a alimenté les populations pauvres. Parce que tel n’est pas son
but. En revanche, il enrichit les sociétés de l’agrobusiness et plaît aux
grands créanciers. Le CADTM y voit autant de raisons de le refuser.
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