19 février 2018 par Patrick Saurin
« Les banques ont le devoir de lutter contre le marxisme… Elles sont le rempart du régime capitaliste ; leur fonction est basée sur ce régime et toute disposition législative qui tend à la saper… doit être combattue par elles. En agissant autrement, elles se suicideraient. » [1]
Je vais m’attacher à développer trois questions :
1/ Que faire durant la période précédant l’arrivée au pouvoir du gouvernement populaire ?
Dans la période précédant son arrivée aux affaires, un gouvernement populaire aura dû se livrer à une importante campagne préparatoire afin de présenter, expliquer et légitimer les mesures qu’il s’engage à adopter et à mettre en œuvre. Cette campagne doit impliquer la population à travers des actions. Dans la mesure où la nouvelle politique rompt radicalement avec celles des gouvernements précédents, il est impératif de préparer la population et par ce travail de formation participer à la reconstruction de la subjectivité et de la conscience de classe de celles et ceux qui sont à ce jour des dominés. Un tel travail de formation est particulièrement nécessaire sur le sujet des banques. Celles-ci sont perçues comme toutes-puissantes et capables de mettre à bas des économies lors de crises. Par ailleurs, les questions bancaires et financières sont mal connues du grand public. D’où la tentation de ne pas s’intéresser au sujet. Le travail préparatoire doit être mené sur deux plans :
2/ Quelles mesures immédiates essentielles adopter ?
Dès la mise en place du nouveau pouvoir, les institutions européennes, la BCE
BCE
Banque centrale européenne
La Banque centrale européenne est une institution européenne basée à Francfort, créée en 1998. Les pays de la zone euro lui ont transféré leurs compétences en matières monétaires et son rôle officiel est d’assurer la stabilité des prix (lutter contre l’inflation) dans la dite zone.
Ses trois organes de décision (le conseil des gouverneurs, le directoire et le conseil général) sont tous composés de gouverneurs de banques centrales des pays membres et/ou de spécialistes « reconnus ». Ses statuts la veulent « indépendante » politiquement mais elle est directement influencée par le monde financier.
en particulier, ne manqueront pas de réagir pour empêcher la mise en œuvre de la politique du nouveau gouvernement et remettre en cause sa légitimité, comme nous avons pu le vérifier avec l’exemple de la Grèce en 2015.
Afin de prévenir et de contrecarrer ces attaques, trois mesures essentielles préalablement préparées par le nouveau gouvernement avant son arrivée au pouvoir et applicables immédiatement, doivent être prises dans les plus brefs délais :
D’autres mesures d’application immédiate devront être préparées et présentées dès le nouveau pouvoir en place. Par exemple, la réforme du taux d’usure [4] pour imposer aux banques que ce taux s’applique non à la seule première échéance d’un contrat d’emprunt mais à toutes les échéances. Cette mesure concernerait à la fois les dettes publiques et les dettes privées.
3/ Comment réagir dans l’ancien cadre légal aux actions de déstabilisation ?
Dans l’éventualité d’une fermeture par la BCE du robinet des liquidités
Liquidité
Liquidités
Capitaux dont une économie ou une entreprise peut disposer à un instant T. Un manque de liquidités peut conduire une entreprise à la liquidation et une économie à la récession.
, le nouveau pouvoir pourrait mettre les banques sous tutelle sans attendre leur socialisation à venir. Contrôlant ces banques, il pourrait décider de mettre en place un moratoire
Moratoire
Situation dans laquelle une dette est gelée par le créancier, qui renonce à en exiger le paiement dans les délais convenus. Cependant, généralement durant la période de moratoire, les intérêts continuent de courir.
Un moratoire peut également être décidé par le débiteur, comme ce fut le cas de la Russie en 1998, de l’Argentine entre 2001 et 2005, de l’Équateur en 2008-2009. Dans certains cas, le pays obtient grâce au moratoire une réduction du stock de sa dette et une baisse des intérêts à payer.
pour certains engagements de celles-ci, voire de refuser purement et simplement de les honorer (par exemple les engagements des banques à l’égard de la BCE). Les quatre grands groupes bancaires français (BNP Paribas, Société Générale, Crédit Agricole, BPCE) étant des banques systémiques liées aux autres grandes banques, leur prise de contrôle serait de nature à peser dans le rapport de force entre le nouveau pouvoir et les institutions européennes et les autres représentants du camp du capital.
Dès le début de son mandat, un gouvernement populaire pourrait utiliser des mesures que les gouvernements de droite ou socio-démocrates ont coutume d’appliquer lorsqu’ils arrivent aux affaires. En voici trois exemples :
Voilà en bref quelques propositions sur les actions à mener avant l’arrivée au pouvoir d’un gouvernement de gauche radicale, dès sa mise en place, et en cas d’attaque ensuite par les forces du capital.
[1] Cette citation est extraite d’un document d’archives conservé à la Banque de France (Bordereau 118 0200 501, boîte 5) intitulé « Proposition de résolution tendant à inviter le gouvernement à réaliser la socialisation du crédit ». Le texte ne comporte pas de date et comporte en haut de la première page l’inscription manuscrite « Projet Socialiste ». Le texte signale que la citation est extraite d’un ouvrage d’un directeur d’une banque privée, mais ni le nom de ce dernier ni le titre du livre ne sont mentionnés.
[2] Appliqué au personnel au sein des entreprises, le benchmarking est une technique de management consistant à comparer et à classer en permanence les salariés en vue de générer par le stress toujours plus de productivité et de résultats.
[3] Une des ordonnances du gouvernement d’Emmanuel Macron publiée le 23 septembre 2017 a instauré la fusion des instances représentatives du personnel. Les trois instances qui existaient avant cette disposition (délégués du personnel, comité d’entreprise et comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail) sont remplacées par une instance unique, ce qui se traduit par moins de moyens pour les représentants des salariés dans les entreprises.
[4] Le taux d’usure est le taux maximum que les prêteurs sont autorisés à pratiquer lorsqu’ils consentent un crédit. Il est calculé chaque trimestre par la Banque de France. À ce jour, il existe 18 sortes de taux d’usure fonction de la durée de l’emprunt, de son objet et de la nature de l’emprunteur.
a été pendant plus de dix ans chargé de clientèle auprès des collectivités publiques au sein des Caisses d’Épargne. Il est porte-parole de Sud Solidaires BPCE, membre du CAC et du CADTM France. Il est l’auteur du livre « Les prêts toxiques : Une affaire d’état ».
Il est membre de la Commission pour la Vérité sur la dette publique de la Grèce, créée le 4 avril 2015.
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