Dossier spécial « Club de Paris »
19 juillet 2006 par CADTM France
A l’occasion du cinquantenaire du Club de Paris
Club de Paris
Créé en 1956, il s’agit du groupement de 22 États créanciers chargé de gérer les difficultés de remboursement de la dette bilatérale par les PED. Depuis sa création, la présidence est traditionnellement assurée par un·e Français·e. Les États membres du Club de Paris ont rééchelonné la dette de plus de 90 pays en développement. Après avoir détenu jusqu’à 30 % du stock de la dette du Tiers Monde, les membres du Club de Paris en sont aujourd’hui créanciers à hauteur de 10 %. La forte représentation des États membres du Club au sein d’institutions financières (FMI, Banque mondiale, etc.) et groupes informels internationaux (G7, G20, etc.) leur garantit néanmoins une influence considérable lors des négociations.
Les liens entre le Club de Paris et le FMI sont extrêmement étroits ; ils se matérialisent par le statut d’observateur dont jouit le FMI dans les réunions – confidentielles – du Club de Paris. Le FMI joue un rôle clé dans la stratégie de la dette mise en œuvre par le Club de Paris, qui s’en remet à son expertise et son jugement macroéconomiques pour mettre en pratique l’un des principes essentiels du Club de Paris : la conditionnalité. Réciproquement, l’action du Club de Paris préserve le statut de créancier privilégié du FMI et la conduite de ses stratégies d’ajustement dans les pays en voie de développement.
Site officiel : https://www.clubdeparis.fr/
, le CADTM s’est mobilisé pour mettre à jour l’action
Action
Actions
Valeur mobilière émise par une société par actions. Ce titre représente une fraction du capital social. Il donne au titulaire (l’actionnaire) le droit notamment de recevoir une part des bénéfices distribués (le dividende) et de participer aux assemblées générales.
discrète de ce regroupement de 19 pays riches créanciers qui se réunit environ chaque mois, dans les locaux du ministère français de l’économie à Bercy. Ce Club a pour but de gérer les difficultés de remboursement de la dette
Dette
Dette multilatérale : Dette qui est due à la Banque mondiale, au FMI, aux banques de développement régionales comme la Banque africaine de développement, et à d’autres institutions multilatérales comme le Fonds européen de développement.
Dette privée : Emprunts contractés par des emprunteurs privés quel que soit le prêteur.
Dette publique : Ensemble des emprunts contractés par des emprunteurs publics.
bilatérale des pays du Sud et de trouver une issue la plus favorable possible aux pays créanciers [1]. Notre combat pour libérer le tiers-monde de la dette et des politiques néolibérales nous conduit donc à nous opposer radicalement à ce Club un peu trop sûr de lui. Retour sur un printemps mouvementé...
16 mai 2006 — La première réunion du Club de Paris ayant eu lieu le 16 mai 1956, le CADTM a choisi ce jour-là pour organiser une série d’activités dans le quartier de Bercy. Tout d’abord, grâce à la Batucada et à la présence des Clowns amis du CADTM, une mobilisation bruyante, rythmée et dynamique a eu lieu devant les locaux du ministère, plusieurs dizaines de personnes posant devant un gâteau d’anniversaire et une pancarte « 50 ans de Club de Paris = 50 ans de trop ! Stop à la dette ! ». L’album photos ainsi confectionné est une preuve éclatante que l’image du Club de Paris dans l’opinion publique est loin d’être idyllique [2]... Puis nous avons gagné la péniche Alternat amarrée quai de Bercy pour un débat public sur le bilan du Club, avant de finir en musique avec un concert de Rocé et un DJ set de DJ Momo (Big Cheese), devant une centaine de personnes motivées et sensibilisées.
1er juin 2006 — Le Monde diplomatique publie un bilan du Club de Paris signé Damien Millet et Eric Toussaint, sous le titre « Des créanciers discrets, unis et tout-puissants ».
12-14 juin 2006 — Pour sa part, le Club de Paris a choisi le 14 juin pour célébrer son 50e anniversaire. Cette semaine-là va être l’occasion d’une mobilisation médiatique conséquente.
Dès le 12 juin, une dépêche de l’AFP, signée Marie Wolfrom, allume les projecteurs.
Le Figaro du 12 juin et Les Echos du 13 juin consacrent un long article au Club de Paris, dans lequel ils donnent très partiellement la position du CADTM.
Le 14 juin, Libération publie une pleine page sur le Club de Paris, sous le titre « Cinquante ans d’ardoises pour le Club de Paris » [3], avec un surtitre intéressant : « L’utilité de ce négociateur entre pays créditeurs et débiteurs de plus en plus discutée. » L’article de Christian Losson insiste sur le secret dans lequel s’est muré le Club.
« Avant d’ouvrir, sous la pression des sociétés civiles, un site Internet au contenu... inaccessible si l’on n’a pas bac + 12. ‘Cela reste un cartel opaque des pays créanciers, souffle Damien Millet, président du Comité d’annulation de la dette du tiers-monde, et qui devrait disparaître.’ Surtout, de plus en plus d’ONG et de gouvernements de pays débiteurs dénoncent les conditions (orthodoxie budgétaire, libéralisation, etc.) imposées par le FMI pour passer devant le Club de Paris. ‘Le Club de Paris n’a en rien contribué au règlement durable du problème de la dette du tiers-monde’, résume de son côté Marta Ruiz, du réseau CNCD, une ONG de solidarité. »
La conclusion tombe comme un couperet : « Par ailleurs, de plus en plus de pays émergents producteurs de matières premières (Russie, Algérie, etc.) remboursent leur dette par anticipation. Privant les créanciers d’une partie du paiement des intérêts. D’autres pays du Sud optent pour les marchés financiers, via des émissions obligataires ou les mannes de gros bailleurs, telle la Chine. Le Club sera-t-il à la retraite anticipée ? La même question se pose pour le FMI... »
Un autre article [4] présente le Club vu du Sud, faisant écho à la position du réseau CADTM au Mali : « c’est peu dire que le Club de Paris n’a rien de populaire. Posez la question au Comité d’annulation de la dette du Mali, par exemple. Cela donne, comme le souffle Aminata Barry, sa présidente : ‘Le Club de Paris ? On suit à la trace ce qui s’y négocie, les magnifiques effets d’annonce après le G8 qui claironnait la fin de la dette, etc. Résultat ? Ben, on lâche toujours 100 millions d’euros en remboursements et le pays paie toujours plus qu’il ne reçoit de remises de dette. A l’arrivée, la dette a augmenté de 53 % depuis le lancement du processus pays pauvres très endettés, en 1999.’ Selon elle, le Club de Paris fait partie d’un tout. ‘C’est le bras armé de la fausse compassion.’ Où, pour avoir droit à des réductions de dette, il faut mettre la main dans un rouleau compresseur de ‘bonnes gouvernances’. Un haut responsable du ministère des Finances malien : ‘C’est simple, en fait. On impose la privatisation, du rail à l’eau ; les ONG nous mettent des bornes-fontaines dans les rues. On limite les salaires des fonctionnaires ; les parents doivent payer pour scolariser leurs enfants.’ Et, sur fond de léthargie et de corruption généralisée, le mal-développement prospère. »
L’article du CADTM intitulé « Club de Paris : un scandale institutionnel » est même relayé sur le site de Libération.
14 juin 2006, 14h — Plusieurs associations européennes organisent un match de football inéquitable devant Bercy et rendent public, à cette occasion, un texte critique sur le Club de Paris. Le CADTM en est bien sûr signataire.
Déclaration de la société civile sur le cinquantenaire du Club de Paris : ni légitime, ni soutenable.
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14 juin 2006, 15h — Pour la célébration officielle, environ 400 personnes sont invitées au Centre de conférences Pierre Mendès-France, à Bercy, dont une douzaine de représentants d’associations européennes. Trois membres actifs
Actif
Actifs
En général, le terme « actif » fait référence à un bien qui possède une valeur réalisable, ou qui peut générer des revenus. Dans le cas contraire, on parle de « passif », c’est-à-dire la partie du bilan composé des ressources dont dispose une entreprise (les capitaux propres apportés par les associés, les provisions pour risques et charges ainsi que les dettes).
du CADTM y ont pris part.
L’après-midi commence par un discours de Thierry Breton, ministre français de l’Economie et des Finances, lu par Xavier Musca, directeur du Trésor et président actuel du Club de Paris, suivi par Stanley Fischer, Gouverneur de la Banque d’Israël et ancien Premier Directeur général adjoint du Fonds monétaire international. Fischer, déjà très présent dans le film Life and debt sur la Jamaïque que les proches du CADTM connaissent bien, n’hésitent pas à déclarer que « les principes de conditionnalités Conditionnalités Ensemble des mesures néolibérales imposées par le FMI et la Banque mondiale aux pays qui signent un accord, notamment pour obtenir un aménagement du remboursement de leur dette. Ces mesures sont censées favoriser l’« attractivité » du pays pour les investisseurs internationaux mais pénalisent durement les populations. Par extension, ce terme désigne toute condition imposée en vue de l’octroi d’une aide ou d’un prêt. sont essentiels ». Bien sûr, pour lui, le cas de l’Argentine est un traumatisme : « Espérons que l’Argentine ne sera pas un précédent pour l’avenir ». On imagine fort bien qu’un pays qui arrête le remboursement de la part privée de sa dette, qui impose à ses créanciers privés une forte réduction de leurs créances Créances Créances : Somme d’argent qu’une personne (le créancier) a le droit d’exiger d’une autre personne (le débiteur). et n’hésite pas à dire non au FMI lui donne des migraines...
La première table ronde, intitulée « Le Club de Paris dans l’architecture internationale », est centrée autour de l’intervention de Jacques de Larosière, Conseiller du Président de BNP Paribas, ancien Directeur général du Fonds monétaire international et ancien Président du Club de Paris de 1974 à 1978. Il détaille les trois phases de l’histoire du Club : les années 50-70 où les fonds publics étaient majoritaires, les années 70-90 où les banques prennent le relais, la période actuelle où ce sont les marchés financiers qui mènent le bal en ce qui concerne les prêts aux pays du Sud. Pour lui, le Club de Paris est aujourd’hui devenu un acteur modeste. Il détaille aussi les principes qui gouvernent le Club, comme le « cas par cas », le consensus ou la comparabilité de traitement. Le fait qu’un nombre croissant de pays rembourse par anticipation le FMI et refuse de passer par un programme avec le FMI est un problème pour le Club pour qui un tel accord est obligatoire avant d’entamer les discussions avec un pays. De plus, les créanciers privés ne sont pas partie prenante dans les renégociations de dette, tout comme certains pays non membres du Club, qui du coup en supporte une part très importante, ce qui pose question.
La discussion qui a suivi a donc surtout porté sur le partage du risque entre créanciers publics et privés d’une part, et d’autre part entre pays du Club et pays hors Club, comme la Chine, qui supportent peu de contraintes.
Mark Carney, Vice-Ministre des Finances du Canada, souligne l’importance du Club dans le bon fonctionnement international. Il ajoute que pour lui, « le secteur public doit garantir au secteur privé le moins d’incertitudes possibles » et que le but du Trésor canadien est avant tout de « protéger les contribuables ».
Pour Enrique Iglesias, président de la Banque interaméricaine de développement de 1988 à 2005, « le Club de Paris n’était pas bien préparé à la mondialisation
Mondialisation
(voir aussi Globalisation)
(extrait de F. Chesnais, 1997a)
Jusqu’à une date récente, il paraissait possible d’aborder l’analyse de la mondialisation en considérant celle-ci comme une étape nouvelle du processus d’internationalisation du capital, dont le grand groupe industriel transnational a été à la fois l’expression et l’un des agents les plus actifs.
Aujourd’hui, il n’est manifestement plus possible de s’en tenir là. La « mondialisation de l’économie » (Adda, 1996) ou, plus précisément la « mondialisation du capital » (Chesnais, 1994), doit être comprise comme étant plus - ou même tout autre chose - qu’une phase supplémentaire dans le processus d’internationalisation du capital engagé depuis plus d’un siècle. C’est à un mode de fonctionnement spécifique - et à plusieurs égards important, nouveau - du capitalisme mondial que nous avons affaire, dont il faudrait chercher à comprendre les ressorts et l’orientation, de façon à en faire la caractérisation.
Les points d’inflexion par rapport aux évolutions des principales économies, internes ou externes à l’OCDE, exigent d’être abordés comme un tout, en partant de l’hypothèse que vraisemblablement, ils font « système ». Pour ma part, j’estime qu’ils traduisent le fait qu’il y a eu - en se référant à la théorie de l’impérialisme qui fut élaborée au sein de l’aile gauche de la Deuxième Internationale voici bientôt un siècle -, passage dans le cadre du stade impérialiste à une phase différant fortement de celle qui a prédominé entre la fin de Seconde Guerre mondiale et le début des années 80. Je désigne celui-ci pour l’instant (avec l’espoir qu’on m’aidera à en trouver un meilleur au travers de la discussion et au besoin de la polémique) du nom un peu compliqué de « régime d’accumulation mondial à dominante financière ».
La différenciation et la hiérarchisation de l’économie-monde contemporaine de dimension planétaire résultent tant des opérations du capital concentré que des rapports de domination et de dépendance politiques entre États, dont le rôle ne s’est nullement réduit, même si la configuration et les mécanismes de cette domination se sont modifiés. La genèse du régime d’accumulation mondialisé à dominante financière relève autant de la politique que de l’économie. Ce n’est que dans la vulgate néo-libérale que l’État est « extérieur » au « marché ». Le triomphe actuel du « marché » n’aurait pu se faire sans les interventions politiques répétées des instances politiques des États capitalistes les plus puissants (en premier lieu, les membres du G7). Cette liberté que le capital industriel et plus encore le capital financier se valorisant sous la forme argent, ont retrouvée pour se déployer mondialement comme ils n’avaient pu le faire depuis 1914, tient bien sûr aussi de la force qu’il a recouvrée grâce à la longue période d’accumulation ininterrompue des « trente glorieuses » (l’une sinon la plus longue de toute l’histoire du capitalisme). Mais le capital n’aurait pas pu parvenir à ses fins sans le succès de la « révolution conservatrice » de la fin de la décennie 1970.
des marchés financiers » et « la question des pays à revenus intermédiaires reste un vrai défi » Dans la question entre le prêt et le don, il préfère le premier car « l’utilisation de l’emprunt maintient un suivi de la façon dont ces prêts sont exécutés ».
Selon Jean Lemierre, président de la BERD et ancien président du Club de Paris entre 1999 et 2000, il faut « revoir l’analyse du risque » et les institutions financières internationales doivent « protéger le secteur privé contre ses propres débordements et son propre enthousiasme ». Il est impératif, pour lui, de « laisser le risque là où il doit être : dans le secteur privé ».
Sergei Stortchak, Vice-Ministre des Finances de la Fédération de Russie, s’est réjoui des liens entre le Club et la Russie. Ancien client du Club, son pays a fait changer le Club et suite à une longue session en 1998 qui a duré 4 jours, la Russie a intégré le Club. A cette occasion, les autres membres ont été contraints de prendre la peine d’écrire noir sur blanc des principes de fonctionnement, ce qui n’avait jamais été fait jusque là. La Russie est à la fois membre du Club et débitrice par rapport aux autres pays du Club, mais dès le lendemain, la situation devait changer puisque le Club allait examiner la proposition russe de rembourser toute sa dette aux pays du Club par anticipation.
A la fin de cette première table ronde, une courte discussion avec le public a commencé. Après des interventions d’un vice-ministre brésilien et d’une responsable de la Société générale, Damien Millet a fait l’intervention suivante :
« Je suis président du CADTM France, le Comité pour l’annulation de la dette du tiers-monde, et je représente ici un réseau international présent dans 22 pays. Je suis abasourdi par l’autisme des responsables qui se sont exprimés à la tribune. J’ai l’impression d’entendre la liste de petits problèmes entre créanciers, mais il y a 2,8 milliards de personnes qui survivent avec moins de 2 dollars par jour, et je n’ai pas entendu parler de ces personnes, et j’ai bien peur qu’elles ne soient pas présentes non plus dans la suite de l’après-midi. Je voudrais dire que la logique que le Club de Paris défend est responsable de la dégradation des conditions de vie des populations les plus pauvres du Sud. Vos choix sont profondément idéologiques mais vous les présentez comme des principes immuables. Or tant que vous ne changerez pas de logique, vous ne trouverez pas de solution juste et durable aux problèmes économiques du monde. Le 16 mai dernier, nous nous sommes mobilisés à Paris et en province et je vous ai apporté en cadeau ce recueil de photos [brandi en même temps] de gens qui disaient « 50 ans ça suffit ». Pour nous, le Club de Paris est un maillon essentiel dans la domination des populations du Sud au profit des créanciers, qui doit cesser. Pour ma part, je veux formuler aujourd’hui le vœu que cet anniversaire du Club de Paris soit le dernier. » |
Ensuite, un représentant pakistanais est intervenu sur la dette des dictateurs comme Mobutu et le thème de la fuite des capitaux. Enfin, Jean Merckaert, coordinateur de la plate-forme Dette et développement, a pris la parole pour détailler l’activité de rue concernant le match de football inéquitable, insistant sur l’inefficacité du Club et demandant un droit international de la dette sous l’égide de l’ONU auquel devrait se plier le Club de Paris au lieu d’être juge et partie.
Xavier Musca a semblé un peu déstabilisé au moment de répondre. Il s’est adressé par deux fois directement à Damien en le nommant et en répondant qu’il valait mieux une organisation comme le Club de Paris que la loi de la jungle (ce qui est stupide, on pouvait aussi dire ça il y a 150 ans pour l’esclavage : il vaut mieux l’esclavage que la loi de la jungle...), puis que la réunion d’aujourd’hui prouvait qu’ils n’étaient pas autistes (ben voyons !).
Après une courte pause, la seconde table ronde a porté sur « Le Club de Paris et le rétablissement de la soutenabilité de la dette » et était présidée par Donald Kaberuka, président de la Banque africaine de développement, qui a insisté sur le fait que « l’Afrique a profité du travail du Club » tout en niant l’instrument de domination qu’il représente.
L’intervention principale était celle de Michel Camdessus, ancien directeur général du Fonds monétaire international et président du Club de Paris entre 1982 et 1984. Il a insisté sur l’importance de la soutenabilité de la dette qui est l’enjeu central de l’initiative PPTE : « La soutenabilité de la dette est un objectif essentiel car elle permet de maximiser dans la durée la probabilité que la dette sera intégralement repayée ». Cela a au moins le mérite d’être clair. Il a rappelé le caractère sacro-saint du contrat (mais ne comprend visiblement pas que le contrat ne fait pas le poids face aux droits humains fondamentaux). Pour lui, l’initiative d’allégement de dette décidée en 2005 par le G8, que nous critiquons fermement car elle se place dans le sillage de l’initiative PPTE, est une mauvaise décision : « Je crains que le G8 n’ait quelque peu dérapé ». Devant le risque d’une nouvelle crise de la dette, il en appelle « à la sagesse des nouveaux créanciers », qui se distinguent bien davantage par leur avidité que par leur sagesse...
Lors de la discussion qui a suivi, Agustin Carstens, directeur général adjoint du Fonds monétaire international, est allé dans le même sens : « Il ne faut pas utiliser l’allégement à l’excès ». Pour lui, l’initiative du G8 aurait dû préalablement étudier si les bénéfices étaient supérieurs aux distorsions qu’ils peuvent créer.
Ngozi Okonjo Iweala, Ministre des Finances du Nigeria, a d’abord reconnu qu’il peut y avoir « de la créativité et de l’innovation au Club de Paris ». Elle a rappelé que pour Kofi Annan, secrétaire général de l’ONU, la soutenabilité doit intégrer le respect des objectifs du millénaire pour le développement et elle a demandé comment le Club de Paris allait intégrer cette donnée-là. Pour elle, les changements intervenus dernièrement pose la question : « le Club de Paris peut-il survivre avec les règles actuelles ? ». Il semble que la définition de la soutenabilité de la dette et le fonctionnement du Club sont à revoir.
Nous reproduisons ci-dessous le discours de Francesco Oddone, représentant le réseau Eurodad à la tribune :
Monsieur le Président, mesdames, messieurs, Je voudrais tout d’abord vous remercier sincèrement pour cette invitation, en particulier parce que, comme vous le soupçonnez certainement, la perspective des ONG sur l’activité du Club de Paris n’est pas en ligne avec la vision somme toute très flatteuse présentée jusqu’ici, comme il est clairement exprimé dans la déclaration de la société civile rendue publique aujourd’hui. D’autre part, je pense que ceci est bien ce qui est attendu de moi, et je ne veux certainement décevoir personne ! Donc voici quelques idées et suggestions qui contrastent avec les propos tenus jusqu’à présent... Je pense que l’heure est à une réflexion sans tabous, plutôt qu’à une célébration du passé qui ne serait pas appropriée si on considère la performance concrète de ce cartel de créanciers sur le long terme. Bien évidemment, ce n’est pas lié aux qualités ou à l’engagement des personnes qui représentent ici les 19 membres - je l’étais moi-même il n’y a pas très longtemps ! - ou encore aux formidables capacités professionnelles du Secrétariat, mais à quelque chose de bien plus systémique et qui concerne de façon immédiate la volonté et la cohérence politique des pays ici représentés. Quel est donc le track record des créanciers au cours des dernières décennies ? Quand on regarde le nombre de négociations effectuées par un nombre très important de débiteurs (14 pour le Sénégal, 11 pour la RDC, 8 pour Bolivie et Indonésie, et bien d’autres), on voit que ce qui a été atteint était, au mieux, une soutenabilité financière de court terme - le rétablissement de la fameuse capacité de paiement, purement et simplement. Mais il ne pouvait en être autrement, le but déclaré et immuable étant la sauvegarde de tout capital prêté et surtout le maintien de l’ouverture des marchés du Sud pour les exportations à crédit, en fonction des intérêts géostratégiques du moment. Que cela ait représenté un cercle vicieux est bien illustré par les « doses » d’allègement de plus en plus puissantes - les termes successifs d’ici ou là - mais tout indique que cette situation était en fait recherchée. Hélas il ne s’agit pas d’un simple retard analytique comme semble l’indiquer M. Camdessus, mais d’une volonté délibérée de ne pas consentir une sortie définitive du joug de la dette pour garder contrôle et influence - et par conséquent, empêcher une réelle autonomisation économique et politique des pays du Sud. Cet état de fait était déjà inacceptable avant le milieu des années 90, mais il l’est d’autant plus depuis que tous les pays membres du Club se sont engagés formellement à faire leur part pour permettre d’atteindre les Objectifs du Millénaire. M. Camdessus a dit que l’initiative d’allègement de la dette multilatérale s’opérait en dehors de tout concept de soutenabilité. De fait, par cette initiative les pays du G8 confirment l’insuffisance de l’initiative PPTE : ils admettent que la dette pouvait être soutenable selon le concept classique, tout en étant insupportable au regard des ODM. Il ne s’agit pas d’un « dérapage » des créanciers. L’IADM (initiative d’allégement de la dette multilatérale) doit donc être la prémisse d’une redéfinition du concept de soutenabilité de la dette qui tienne compte et mette au centre les ressources nécessaires pour atteindre les ODM. Selon une récente étude d’universitaires britannique une telle redéfinition appelle une réduction de 400 à 600 milliards de dollars pour l’ensemble des pays du Sud. L’IADM n’a donc fait que 10% du chemin... Mais il faudrait éviter de caricaturer la position des ONG : nous savons très bien que toute annulation à elle seule est insuffisante pour financer les OdM. C’est pourquoi nous militons pour le respect immédiat des engagements formels des pays riches à consacrer 0,7% du PIB PIB Produit intérieur brut Le PIB traduit la richesse totale produite sur un territoire donné, estimée par la somme des valeurs ajoutées. Le Produit intérieur brut est un agrégat économique qui mesure la production totale sur un territoire donné, estimée par la somme des valeurs ajoutées. Cette mesure est notoirement incomplète ; elle ne tient pas compte, par exemple, de toutes les activités qui ne font pas l’objet d’un échange marchand. On appelle croissance économique la variation du PIB d’une période à l’autre. à l’APD APD On appelle aide publique au développement les dons ou les prêts consentis à des conditions financières privilégiées accordés par des organismes publics des pays industrialisés à des pays en développement. Il suffit donc qu’un prêt soit consenti à un taux inférieur à celui du marché pour qu’il soit considéré comme prêt concessionnel et donc comme une aide, même s’il est ensuite remboursé jusqu’au dernier centime par le pays bénéficiaire. Les prêts bilatéraux liés (qui obligent le pays bénéficiaire à acheter des produits ou des services au pays prêteur) et les annulations de dette font aussi partie de l’APD, ce qui est inadmissible. . En vérité, au lieu de se lamenter un peu rhétoriquement sur le problème naissant du free riding qui résulte surtout des financements insuffisants disponibles, comme l’a fait également remarquer le Financial Times la semaine dernière, il serait opportun que « les pays riches mettent leur argent où est leur langue », comme disent les anglo-saxons, et fournissent donc eux-mêmes aux pays en ayant besoin les ressources nécessaires pour entrer dans la trajectoire des ODM. En forme de dons ? Nous ne demanderions pas mieux ! Un bon début dans ce sens serait certainement la prise de conscience d’un phénomène bien embarrassant pour nos pays. Comme l’ont si bien été décrit les auteurs du rapport de la Commission pour l’Afrique, dont M. Camdessus, « la dette a, pour l’essentiel, été contractée par des dictateurs qui se sont enrichis grâce au pétrole, aux diamants et aux autres ressources de leur pays et qui, pendant la guerre froide, ont bénéficié du soutien des pays qui aujourd’hui touchent le remboursement de la dette. Nombre de ces dirigeants ont pillé des milliards de dollars en se servant des systèmes financiers des pays développés. » Fin de citation. Je n’aurais pu mieux l’exprimer : il est grand temps que les créanciers assument leurs responsabilités, reconnaissent l’existence de dettes illégitimes et les annulent inconditionnellement. La majeure partie des dettes odieuses ayant déjà été remboursées, les créanciers publics et privés devront restituer ces montants aux pays spoliés. Ce sera un premier pas - utile mais pas suffisant - pour reconstruire une soutenabilité réelle vers les ODM... Et pour ne pas donner l’impression que nous n’applaudissons jamais les gouvernements qui font des choses positives, laissez-moi souligner le fait que la Norvège a formellement commencé à approfondir la question de la dette odieuse Dette odieuse Selon la doctrine, pour qu’une dette soit odieuse, et donc nulle, elle doit remplir deux conditions : 1) Elle doit avoir été contractée contre les intérêts de la Nation, ou contre les intérêts du Peuple, ou contre les intérêts de l’État. 2) Les créanciers ne peuvent pas démontrer qu’ils ne pouvaient pas savoir que la dette avait été contractée contre les intérêts de la Nation. Il faut souligner que selon la doctrine de la dette odieuse, la nature du régime ou du gouvernement qui la contracte n’est pas particulièrement importante, puisque ce qui compte, c’est l’utilisation qui est faite de cette dette. Si un gouvernement démocratique s’endette contre l’intérêt de la population, cette dette peut être qualifiée d’odieuse, si elle remplit également la deuxième condition. Par conséquent, contrairement à une version erronée de cette doctrine, la dette odieuse ne concerne pas seulement les régimes dictatoriaux. (voir : Eric Toussaint, « La Dette odieuse selon Alexander Sack et selon le CADTM » ). Le père de la doctrine de la dette odieuse, Alexander Nahum Sack, dit clairement que les dettes odieuses peuvent être attribuées à un gouvernement régulier. Sack considère qu’une dette régulièrement contractée par un gouvernement régulier peut être considérée comme incontestablement odieuse... si les deux critères ci-dessus sont remplis. Il ajoute : « Ces deux points établis, c’est aux créanciers que reviendrait la charge de prouver que les fonds produits par lesdits emprunts avaient été en fait utilisés non pour des besoins odieux, nuisibles à la population de tout ou partie de l’État, mais pour des besoins généraux ou spéciaux de cet État, qui n’offrent pas un caractère odieux ». Sack a défini un gouvernement régulier comme suit : « On doit considérer comme gouvernement régulier le pouvoir suprême qui existe effectivement dans les limites d’un territoire déterminé. Que ce pouvoir soit monarchique (absolu ou limité) ou républicain ; qu’il procède de la « grâce de Dieu » ou de la « volonté du peuple » ; qu’il exprime la « volonté du peuple » ou non, du peuple entier ou seulement d’une partie de celui-ci ; qu’il ait été établi légalement ou non, etc., tout cela n’a pas d’importance pour le problème qui nous occupe. » Donc, il n’y a pas de doute à avoir sur la position de Sack, tous les gouvernements réguliers, qu’ils soient despotiques ou démocratiques, sous différentes variantes, sont susceptibles de contracter des dettes odieuses. , avec un sens de la responsabilité qui lui fait honneur : nous disons donc bravo et invitons les autres créanciers à se joindre à l’effort ! Et encore : comment justifier le fait qu’une jeune démocratie comme le Nigeria, qui a besoin de tout le soutien du Nord pour se sortir de ses difficultés, ne reçoive une annulation que de 60% - contre les 80% de l’Iraq, pays martyrisé mais avec un PIB par habitant bien plus élevé ? Comment justifier que pour cela le Nigeria doive verser dans les coffres de nos agences de crédit à l’exportation 12,5 milliards de dollars dans l’espace de 6 mois, plus de ce que le IADM représente pour l’ensemble de l’Afrique en 10 ans ! Chère Madame la Ministre, laissez-moi vous dire qu’après ce paiement énorme ce n’est pas très étonnant que vos anciens créanciers vous embrassent et reçoivent à bras ouverts à chaque occasion ! Cette incohérence, cette schizophrénie institutionnelle entre ce que le Club continue à faire - il n’est pas une agence au développement, nous a-t-on répété récemment... - et ce que les gouvernements qui y siègent affirment en d’autres lieux, est fort malheureusement structurelle : elle est même due à la forme de ce groupement, où les créanciers décident quant aux règles et aux mesures à imposer aux débiteurs individuels qui se présentent ici, dans l’arbitraire le plus complet - ce que Professeur Fisher appelle, avec un choix de vocabulaire symboliquement marquant, « flexibilité »... Et en effet on est tous conscients, étant tous adultes, que c’est bel et bien une question tout à fait politique, et non pas technique. C’est en effet à mille lieux d’un véritable procès multilatéral équitable et transparent, tout comme d’un cadre juridique garant des droits du débiteur tel qu’il est reconnu dans les systèmes nationaux des 19 membres ici présents, où un juge impartial - et non pas une partie en cause - décide de l’application et de la validité des contrats. Aujourd’hui c’est la loi des plus forts, les créanciers, qui préside à la gestion internationale de la dette : comme si, pour utiliser une métaphore footballistique, on était en présence d’une équipe de 19 joueurs sur le terrain, avec l’autre composée d’un seul élément. Et de plus, avec des règles du jeu écrites par les premiers, qui peuvent aussi les changer en cours de match, et sans arbitre ! Pour sortir donc de l’arbitraire et pour garantir une solution équitable pour tous les acteurs, qu’ils soient débiteurs ou créanciers, publics ou privés, il est donc urgent de poser des règles du jeu claires, équitables et contraignantes à l’endettement international, donnant légitimité aux lieux où celui-ci est traité. Comme le disait déjà au 19e siècle le juriste français Lacordaire, « entre le riche et le pauvre, entre le fort et le faible, c’est la liberté qui opprime et c’est la loi qui libère ». L’absence de règles en matière de dettes se fait aux dépens des plus faibles de la planète. Avec les débiteurs, les créanciers doivent prévoir des mécanismes exhaustifs, justes et impartiaux, pour traiter les dettes insoutenables dans le sens des ODM. Personne ne parle ici de succomber à la loi de la jungle : ce qui est demandé est simplement, mais fondamentalement, un cadre de règles justes et équitables. Les gouvernements membres du Club de Paris devraient donc saisir l’occasion de cet anniversaire pour mettre fin aux pratiques actuelles et en instaurer des nouvelles. Sinon, en faisant recours à une autre métaphore footballistique, ce sera l’histoire qui montrera au Club de Paris, haut et fort, un carton rouge sans appel... |
Comme prévu auparavant, à ce moment là, tous les représentants d’ONG dans la salle ont brandi un carton rouge format A4 (environ une douzaine). Le problème est que, du coup, nous n’avons pas pu applaudir et que seuls les gens de la tribune l’ont vu, pas le reste de la salle car nous étions au fond...
Enfin, Daniel Cohen, professeur de Sciences économiques à l’École normale supérieure de Paris a insisté sur l’idée de prêts assortis de clauses contingentes, comme les variations des cours des matières premières.
Dans les interventions issues de la salle qui ont suivi, notons le ministre du Budget du Sénégal, qui a souligné, chiffres à l’appui, que la réduction de dette décidée par le G8 en 2005 ne fera que contrebalancer pour son pays le surcoût lié à la hausse du prix du pétrole, et elle ne libèrera en rien des ressources supplémentaires pour le développement par rapport aux années précédentes. Pour sa part, une femme africaine s’est étonnée que plusieurs intervenants aient parlé de savoir anticiper la prochaine crise, disant que l’Afrique voulait se gérer toute seule, et qu’elle souhaitait que dans 50 ans, le Club de Paris n’existe plus. Les représentants d’ONG ont chaudement applaudi et les gens de la tribune ont quand même été un peu surpris !
Jean-Claude Trichet, président de la Banque centrale européenne
BCE
Banque centrale européenne
La Banque centrale européenne est une institution européenne basée à Francfort, créée en 1998. Les pays de la zone euro lui ont transféré leurs compétences en matières monétaires et son rôle officiel est d’assurer la stabilité des prix (lutter contre l’inflation) dans la dite zone.
Ses trois organes de décision (le conseil des gouverneurs, le directoire et le conseil général) sont tous composés de gouverneurs de banques centrales des pays membres et/ou de spécialistes « reconnus ». Ses statuts la veulent « indépendante » politiquement mais elle est directement influencée par le monde financier.
et président du Club de Paris entre 1985 et 1993, a prononcé un discours de clôture sans grand intérêt.
15 juin 2006 — La seule publication sur le thème du Club postérieure à la célébration officielle est un article de La Tribune, intitulé « Le Club de Paris sous le feu des critiques ». Céline About retranscrit assez fidèlement les critiques des associations :
« ‘Pure anomalie institutionnelle’, ‘cartel opaque des pays créanciers’, l’instance n’est pas épargnée par les critiques. Le Comité pour l’annulation de la dette du tiers-monde (CADTM) s’insurge par exemple contre ‘la logique froidement financière’ du Club et demande sa ‘suppression pure et simple’. Plusieurs ONG ont surtout récemment dénoncé la différence de traitement accordé aux débiteurs, en fonction d’intérêts géopolitiques. ‘Pourquoi l’Irak a-t- il bénéficie de 80 % d’annulation de sa dette, alors que les pays touchés par le tsunami de décembre 2004 n’ont pas eu mieux qu’un simple moratoire
Moratoire
Situation dans laquelle une dette est gelée par le créancier, qui renonce à en exiger le paiement dans les délais convenus. Cependant, généralement durant la période de moratoire, les intérêts continuent de courir.
Un moratoire peut également être décidé par le débiteur, comme ce fut le cas de la Russie en 1998, de l’Argentine entre 2001 et 2005, de l’Équateur en 2008-2009. Dans certains cas, le pays obtient grâce au moratoire une réduction du stock de sa dette et une baisse des intérêts à payer.
d’un an entraînant des intérêts supplémentaires à payer ?’, s’est interrogé le CADTM. »
L’article se termine par « la montée en puissance des pays émergents, désormais à même de rembourser leurs dettes et même parfois de se muer à leur tour en créancier concurrent. »
25 juin 2006 — Enfin, l’hebdomadaire Jeune Afrique revient à son tour sur cette célébration : « Les représentants de plusieurs ONG - notamment Francesco Oddone d’Eurodad et Damien Millet du Comité pour l’annulation de la dette du Tiers Monde - sont venus troubler l’autosatisfaction ambiante en critiquant l’arbitraire et l’opacité de décisions de créditeurs qui sont ‘juge et partie’ et en demandant à nouveau l’annulation de l’ensemble de la dette du Sud, qu’ils imputent à l’aveuglement cupide des prêteurs et aux malversations de quelques dictateurs soutenus par le Nord. »
Pour la première fois, la contestation du Club de Paris a été portée jusque dans son sein. Le CADTM a été un des moteurs de cette contestation et cette cible si particulière va bien évidemment rester dans notre viseur [5]...
[1] Pour en savoir plus sur notre analyse du Club de Paris, nous vous reportons à l’article de Damien Millet et Eric Toussaint dans Le Monde diplomatique de juin 2006 et à l’article « Club de Paris, un scandale institutionnel » sur le site du CADTM : www.cadtm.org/article.php3 ?id_article=1919
[5] voir aussi sur notre site l’article d’Emad Mekay A 50 ans, le Club de Paris est-il une relique coloniale ?
11 mai, par CADTM France , Collectif
18 avril, par CADTM France , Collectif
20 décembre 2022, par CADTM France , Collectif
18 novembre 2022, par CADTM France , Collectif
16 novembre 2022, par CADTM France , CETRI (Centre Tricontinental)
7 octobre 2021, par CADTM France , Collectif
5 octobre 2021, par CADTM France , Collectif
28 septembre 2021, par CADTM France , Collectif
21 mai 2021, par CADTM France , Survie , CADTM Afrique
26 novembre 2020, par CADTM France , Collectif Stop TAFTA