8 décembre 2017 par Nathan Legrand , Fatima Zahra El Beghiti
Des délégations du réseau international du CADTM se sont réunies à Bamako, au Mali, du 15 au 25 novembre 2017 afin de participer à plusieurs activités de coordination et de formation politiques. C’est en effet à l’occasion du troisième séminaire « Femmes, dettes et microcrédits » qui s’est tenu dans cette capitale ouest-africaine du 15 au 19 novembre que le CADTM a décidé d’organiser sa formation internationale annuelle (qui avait eu lieu à Amsterdam les deux années précédentes) et la réunion de son Conseil international au même endroit. Au total, une cinquantaine de personnes a participé à ces réunions, en partie ou en totalité. Les délégations représentées venaient du pays hôte, le Mali, du Bénin, du Burkina Faso, du Cameroun, de la République démocratique du Congo (Kinshasa), de la République du Congo (Brazzaville), de la Côte d’Ivoire, du Gabon, de la Guinée (Conakry), du Maroc (représentant le Secrétariat international partagé du CADTM), du Niger, du Sénégal, du Togo, ainsi que, pour les autres régions du monde, d’Argentine, de Belgique (représentant le Secrétariat international partagé), de France et d’Inde.
Le séminaire (dont un compte-rendu a été publié en ligne) s’est ouvert par une conférence publique, en présence d’une audience importante (environ 250 personnes, en majorité des femmes). Les intervenantes y ont présenté la dette
Dette
Dette multilatérale : Dette qui est due à la Banque mondiale, au FMI, aux banques de développement régionales comme la Banque africaine de développement, et à d’autres institutions multilatérales comme le Fonds européen de développement.
Dette privée : Emprunts contractés par des emprunteurs privés quel que soit le prêteur.
Dette publique : Ensemble des emprunts contractés par des emprunteurs publics.
privée et la dette publique comme deux facettes d’un même système de subordination par l’endettement, en faisant le lien entre les programmes d’ajustement structurel (PAS) et l’implantation des microcrédits. D’autres contributions ont montré le rôle joué par la microfinance dans l’aggravation de la dépendance financière et dans l’appauvrissement des femmes.
Ces réalités ont ensuite été abordées plus en détail par les participantes au séminaire. L’enjeu de cet événement était de créer un espace libre, permettant aux femmes d’échanger entre elles sur les différentes expériences et actions menées dans leurs pays contre les effets des dettes illégitimes. Les expériences concrètes vécues par les participantes et partagées lors du séminaire ont renforcé le constat selon lequel la microfinance ne constitue jamais un outil d’émancipation des femmes, mais, au contraire, a approfondi la situation subordonnée des femmes dans une société patriarcale et capitaliste.
Des alternatives à la microfinance ont été présentées et étudiées. Cependant, le combat contre la pauvreté ne se concentre pas seulement dans l’accès aux financements, mais implique le droit à la santé, à l’éducation, au logement, au travail, à l’alimentation et à l’écologie. En bref, la lutte contre la pauvreté s’inscrit dans une lutte globale pour une vie décente et digne.
Le séminaire, considéré par les participantes comme une importante réussite, a eu un bon écho médiatique au Mali, et s’est clôturé par un meeting rassemblant environ 400 personnes. Les participantes ont également rédigé et adopté une déclaration finale revenant sur les liens entre le capitalisme, les PAS, le microcrédit et l’oppression structurelle que subissent les femmes.
De nombreuses femmes ayant participé à ce séminaire ont par la suite pris part à la formation internationale du CADTM.
Puisqu’une part importante des participant-e-s à la formation internationale du CADTM était constituée de membres ayant récemment adhéré à l’une des associations membres du réseau, il a été jugé opportun de revenir sur l’histoire du CADTM, de sa naissance en Belgique à son élargissement dans d’autres pays du monde, de sa revendication principale d’annulation de la dette du tiers-monde à celle de l’abolition de toutes les dettes illégitimes, publiques comme privées. Cette généalogie a été introduite par Éric Toussaint, co-fondateur du CADTM en 1990 en Belgique, et enrichie par les interventions de militant-e-s d’Afrique de l’Ouest, du Maroc, d’Argentine et d’Inde.
Il a été rappelé que le CADTM trouve ses origines dans l’Appel de la Bastille à l’occasion de la grande manifestation de 1989 à Paris contre le G7 G7 Groupe informel réunissant : Allemagne, Canada, États-Unis, France, Grande-Bretagne, Italie, Japon. Leurs chefs d’État se réunissent chaque année généralement fin juin, début juillet. Le G7 s’est réuni la première fois en 1975 à l’initiative du président français, Valéry Giscard d’Estaing. , qui avait été organisée sous le slogan « Dette, Apartheid, Colonies : Ça suffat comme ci ! ». Ces mots d’ordre reflétaient l’actualité des luttes contre le capitalisme et le néocolonialisme, dans une période marquée par la crise de la dette des pays du Sud à partir du défaut de paiement du Mexique de 1982 et par la crise des finances publiques dans les pays du Nord, et alors que Fidel Castro en 1985 et Thomas Sankara en 1987 avaient appelé les pays victimes de la domination impérialiste à ne pas payer leurs dettes.
De contre-sommet en contre-sommet, des rencontres s’organisent dans les années 1990 avec une série de groupes et de militant-e-s au niveau international et le CADTM participe ainsi au développement de ce que l’on appellera bientôt le mouvement altermondialiste : manifestation contre la réunion du FMI
FMI
Fonds monétaire international
Le FMI a été créé en 1944 à Bretton Woods (avec la Banque mondiale, son institution jumelle). Son but était de stabiliser le système financier international en réglementant la circulation des capitaux.
À ce jour, 190 pays en sont membres (les mêmes qu’à la Banque mondiale).
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et de la Banque mondiale
Banque mondiale
BM
La Banque mondiale regroupe deux organisations, la BIRD (Banque internationale pour la reconstruction et le développement) et l’AID (Association internationale de développement). La Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD) a été créée en juillet 1944 à Bretton Woods (États-Unis), à l’initiative de 45 pays réunis pour la première Conférence monétaire et financière des Nations unies.
En 2022, 189 pays en sont membres.
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célébrant en 1994 leur 50e anniversaire à Madrid, rencontre la même année des militant-e-s zapatistes du Chiapas au Mexique, participation aux contre-sommets organisés contre les réunions du G7 puis du G8
G8
Ce groupe correspond au G7 plus la Fédération de Russie qui, présente officieusement depuis 1995, y siège à part entière depuis juin 2002.
, etc. En 1999, lors du G8 à Cologne, est remise la pétition, alors signée par 17 millions de personnes, de la campagne Jubilee 2000 réclamant l’annulation de la dette du tiers-monde. Refusant de se satisfaire des belles paroles prononcées par les dirigeants des principales puissances de ce monde suite à la remise de cette pétition (ceux-ci annoncent vouloir annuler 100 milliards de dollars de dettes de « pays pauvres très endettés
PPTE
Pays pauvres très endettés
L’initiative PPTE, mise en place en 1996 et renforcée en septembre 1999, est destinée à alléger la dette des pays très pauvres et très endettés, avec le modeste objectif de la rendre juste soutenable.
Elle se déroule en plusieurs étapes particulièrement exigeantes et complexes.
Tout d’abord, le pays doit mener pendant trois ans des politiques économiques approuvées par le FMI et la Banque mondiale, sous forme de programmes d’ajustement structurel. Il continue alors à recevoir l’aide classique de tous les bailleurs de fonds concernés. Pendant ce temps, il doit adopter un document de stratégie de réduction de la pauvreté (DSRP), parfois juste sous une forme intérimaire. À la fin de ces trois années, arrive le point de décision : le FMI analyse le caractère soutenable ou non de l’endettement du pays candidat. Si la valeur nette du ratio stock de la dette extérieure / exportations est supérieure à 150 % après application des mécanismes traditionnels d’allégement de la dette, le pays peut être déclaré éligible. Cependant, les pays à niveau d’exportations élevé (ratio exportations/PIB supérieur à 30 %) sont pénalisés par le choix de ce critère, et on privilégie alors leurs recettes budgétaires plutôt que leurs exportations. Donc si leur endettement est manifestement très élevé malgré un bon recouvrement de l’impôt (recettes budgétaires supérieures à 15 % du PIB, afin d’éviter tout laxisme dans ce domaine), l’objectif retenu est un ratio valeur nette du stock de la dette / recettes budgétaires supérieur à 250 %. Si le pays est déclaré admissible, il bénéficie de premiers allégements de son service de la dette et doit poursuivre avec les politiques agréées par le FMI et la Banque mondiale. La durée de cette période varie entre un et trois ans, selon la vitesse de mise en œuvre des réformes clés convenues au point de décision. À l’issue, arrive le point d’achèvement. L’allégement de la dette devient alors acquis pour le pays.
Le coût de cette initiative est estimé par le FMI en 2019 à 76,2 milliards de dollars, soit environ 2,54 % de la dette extérieure publique du Tiers Monde actuelle. Les PPTE sont au nombre de 39 seulement, dont 33 en Afrique subsaharienne, auxquels il convient d’ajouter l’Afghanistan, la Bolivie, le Guyana, Haïti, le Honduras et le Nicaragua. Au 31 mars 2006, 29 pays avaient atteint le point de décision, et seulement 18 étaient parvenus au point d’achèvement. Au 30 juin 2020, 36 pays ont atteint le point d’achèvement. La Somalie a atteint le point de décision en 2020. L’Érythrée et le Soudan n’ont pas encore atteint le point de décision.
Alors qu’elle devait régler définitivement le problème de la dette de ces 39 pays, cette initiative a tourné au fiasco : leur dette extérieure publique est passée de 126 à 133 milliards de dollars, soit une augmentation de 5,5 % entre 1996 et 2003.
Devant ce constat, le sommet du G8 de 2005 a décidé un allégement supplémentaire, appelée IADM (Initiative d’allégement de la dette multilatérale), concernant une partie de la dette multilatérale des pays parvenus au point de décision, c’est-à-dire des pays ayant soumis leur économie aux volontés des créanciers. Les 43,3 milliards de dollars annulés via l’IADM pèsent bien peu au regard de la dette extérieure publique de 209,8 milliards de dollars ces 39 pays au 31 décembre 2018.
– PPTE »), le CADTM et les organisations de pays du Sud constituant Jubilee Sud s’associent pour préparer la rencontre internationale de Dakar, en décembre 2000. Il y est décidé de continuer la lutte contre la dette et les PAS imposés par la Banque mondiale et le FMI.
Le réseau CADTM s’élargit par une coopération accrue avec des associations déjà existantes, et la création de sections nationales du CADTM dans différents pays. En 2003, il est décidé de formaliser la création d’un réseau mondial lors d’une réunion internationale tenue en Inde. Ce réseau met en relation des organisations présentes en Afrique, en Amérique latine, en Asie et en Europe. La première Assemblée mondiale du réseau (AMR) a lieu en 2008 en Belgique. Le CADTM se dote d’une charte politique et d’une charte de fonctionnement qui viennent s’ajouter à l’Appel de la Bastille comme textes de référence du réseau (ainsi, les organisations membres du réseau sont souveraines dans leurs tâches et orientations, dans la limite du respect de ces chartes). En 2013, il est décidé que les tâches du Secrétariat international, qui avaient été attribuées depuis sa création en 2008 au CADTM Belgique, seraient partagées entre le CADTM Belgique et ATTAC-CADTM Maroc.
Les participant-e-s ont discuté de l’évolution des terrains de lutte du CADTM, dont l’objectif, ambitieux et partagé par toutes celles et tous ceux qui se battent sincèrement contre l’exploitation et les oppressions, est de changer le cours de l’histoire. Pour ce faire, le CADTM agit principalement à travers le levier de la dette, se battant contre un système économique et financier mortifère imposé par les institutions financières internationales, par nos gouvernements et par les classes dominantes locales. Dès sa création, les positions radicales du CADTM ont suscité des débats avec certaines des organisations qui participaient au mouvement global contre la dette, ce qui a permis en retour de renforcer ces positions : annulation inconditionnelle de la dette des pays du tiers-monde, refus des arbitrages internationaux et des restructurations de dette pour leur préférer l’audit à participation populaire et les actes unilatéraux de suspension de paiement et de répudiation. Ces positions ont remporté un succès international avec l’expérience réussie d’audit intégral en Équateur, entre 2007 et 2009.
Avec la crise financière internationale débutée en 2007-2008 et son évolution en Europe en crise des dettes souveraines à partir de 2009-2010, le réseau du CADTM prend en considération l’évolution de la situation. Dans les États du Nord dans lesquels il est présent, le CADTM dénonce les sauvetages bancaires qui sont réalisés par les gouvernements en faisant payer la population à travers les politiques d’austérité, autant de mesures qui alourdissent le poids de la dette publique et appauvrissent les populations. Le FMI participe, en Grèce (mai 2010, mars 2012, juillet 2015), en Irlande (décembre 2010), au Portugal (juin 2011), à Chypre (avril 2013), à la mise en œuvre de politiques d’ajustement structurel comparables à celles qui avaient été déployées en premier lieu dans des économies du Sud. Le CADTM revendique la tenue d’audits des dettes publiques et participe à la mise en place de comités d’audit citoyen dans plusieurs pays d’Europe. En 2015, il participe activement à la Commission d’audit convoquée par la présidente du parlement grec et aux manifestations en soutien au peuple grec soumis au chantage de la Troïka. Si, en 2017, la crise de la dette n’est plus au cœur des débats publics (alors qu’elle reste un élément de discours utilisé par les gouvernants pour justifier leurs politiques antisociales !), le fonctionnement des banques privées, premières responsables de la crise, n’a pas été fondamentalement changé et le CADTM continue d’alerter quant aux risques d’une nouvelle crise financière majeure, et de se battre pour la mise en œuvre d’alternatives.
Par ailleurs, le CADTM a étendu ses luttes à l’endettement privé, qui a fortement augmenté depuis l’entrée du capitalisme dans sa phase néolibérale. Lors du séminaire précédant la formation, il a ainsi été question des microcrédits, qui affaiblissent les groupes les plus marginalisés, et notamment les femmes, au prétexte de les faire participer au marché et de les inclure dans la mondialisation
Mondialisation
(voir aussi Globalisation)
(extrait de F. Chesnais, 1997a)
Jusqu’à une date récente, il paraissait possible d’aborder l’analyse de la mondialisation en considérant celle-ci comme une étape nouvelle du processus d’internationalisation du capital, dont le grand groupe industriel transnational a été à la fois l’expression et l’un des agents les plus actifs.
Aujourd’hui, il n’est manifestement plus possible de s’en tenir là. La « mondialisation de l’économie » (Adda, 1996) ou, plus précisément la « mondialisation du capital » (Chesnais, 1994), doit être comprise comme étant plus - ou même tout autre chose - qu’une phase supplémentaire dans le processus d’internationalisation du capital engagé depuis plus d’un siècle. C’est à un mode de fonctionnement spécifique - et à plusieurs égards important, nouveau - du capitalisme mondial que nous avons affaire, dont il faudrait chercher à comprendre les ressorts et l’orientation, de façon à en faire la caractérisation.
Les points d’inflexion par rapport aux évolutions des principales économies, internes ou externes à l’OCDE, exigent d’être abordés comme un tout, en partant de l’hypothèse que vraisemblablement, ils font « système ». Pour ma part, j’estime qu’ils traduisent le fait qu’il y a eu - en se référant à la théorie de l’impérialisme qui fut élaborée au sein de l’aile gauche de la Deuxième Internationale voici bientôt un siècle -, passage dans le cadre du stade impérialiste à une phase différant fortement de celle qui a prédominé entre la fin de Seconde Guerre mondiale et le début des années 80. Je désigne celui-ci pour l’instant (avec l’espoir qu’on m’aidera à en trouver un meilleur au travers de la discussion et au besoin de la polémique) du nom un peu compliqué de « régime d’accumulation mondial à dominante financière ».
La différenciation et la hiérarchisation de l’économie-monde contemporaine de dimension planétaire résultent tant des opérations du capital concentré que des rapports de domination et de dépendance politiques entre États, dont le rôle ne s’est nullement réduit, même si la configuration et les mécanismes de cette domination se sont modifiés. La genèse du régime d’accumulation mondialisé à dominante financière relève autant de la politique que de l’économie. Ce n’est que dans la vulgate néo-libérale que l’État est « extérieur » au « marché ». Le triomphe actuel du « marché » n’aurait pu se faire sans les interventions politiques répétées des instances politiques des États capitalistes les plus puissants (en premier lieu, les membres du G7). Cette liberté que le capital industriel et plus encore le capital financier se valorisant sous la forme argent, ont retrouvée pour se déployer mondialement comme ils n’avaient pu le faire depuis 1914, tient bien sûr aussi de la force qu’il a recouvrée grâce à la longue période d’accumulation ininterrompue des « trente glorieuses » (l’une sinon la plus longue de toute l’histoire du capitalisme). Mais le capital n’aurait pas pu parvenir à ses fins sans le succès de la « révolution conservatrice » de la fin de la décennie 1970.
. Il a été souligné que la microfinance s’est fortement développée en parallèle de la mise en œuvre des PAS, ce qui ne relève pas du hasard, mais est une conséquence logique de l’augmentation de la pauvreté, du chômage, du recul du rôle de l’État dans les services qui devraient être publics. D’autres types de dettes privées ont été évoqués. Les dettes étudiantes, avec la libéralisation de l’enseignement supérieur, l’instauration de frais d’inscription à l’université et l’augmentation régulière de ceux-ci, sont désormais un phénomène massif dans des pays tels que l’État britannique, les États-Unis et le Japon. Les dettes hypothécaires – qui ont joué aux États-Unis, à travers ce que l’on a appelé la crise des subprimes
Subprimes
Crédits hypothécaires spéciaux développés à partir du milieu des années 2000, principalement aux États-Unis. Spéciaux car, à l’inverse des crédits « primes », ils sont destinés à des ménages à faibles revenus déjà fortement endettés et étaient donc plus risqués ; ils étaient ainsi également potentiellement plus (« sub ») rentables, avec des taux d’intérêts variables augmentant avec le temps ; la seule garantie reposant généralement sur l’hypothèque, le prêteur se remboursant alors par la vente de la maison en cas de non-remboursement. Ces crédits ont été titrisés - leurs risques ont été « dispersés » dans des produits financiers - et achetés en masse par les grandes banques, qui se sont retrouvées avec une quantité énorme de titres qui ne valaient plus rien lorsque la bulle spéculative immobilière a éclaté fin 2007.
Voir l’outil pédagogique « Le puzzle des subprimes »
, le rôle d’étincelle dans la crise que nous traversons – sont quant à elles une entrave au droit au logement, et leur augmentation résulte du caractère prédateur du capitalisme qui n’hésite pas à spéculer sur quatre murs et un toit afin de réaliser un profit.
Jean Nanga, de la République du Congo (Brazzaville), est revenu sur la formation et le rôle des classes dominantes locales en Afrique. Cette prise en compte des classes dominantes africaines est d’autant plus importante qu’elle permet d’éviter l’écueil consistant à considérer que seules les institutions financières internationales et les classes dominantes des États impérialistes (parmi lesquels on trouve désormais la Chine) sont responsables de la situation de subordination, d’absence d’investissements productifs et d’absence de redistribution des richesses sur le continent africain. Il ne s’agit pas de remettre en cause le fait que l’impérialisme est l’un des principaux responsables de cette situation, mais d’avoir une analyse prenant en compte les dynamiques du capitalisme en Afrique afin de déterminer les tâches à remplir par les mouvements d’émancipation sur le continent, qui devront se confronter aux classes dominantes locales.
Depuis environ une décennie, on n’entend plus seulement parler de l’Afrique comme continent où règne la pauvreté, mais aussi comme celui où émergent des États « lions » à la croissance forte ainsi que des individus millionnaires et milliardaires, qui seraient les symboles du « décollage économique » de l’Afrique.
Il y a cinquante ans, Frantz Fanon, auteur des Damnés de la Terre, présentait les limites de la bourgeoisie africaine : « Au sein de cette bourgeoisie nationale, on ne trouve ni industriels, ni financiers. La bourgeoisie nationale des pays sous-développés n’est pas orientée vers la production, l’invention, la construction, le travail. Elle est toute entière canalisée vers des activités de type intermédiaire. Être dans le circuit, dans la combine, telle semble être sa vocation profonde. » Pour Frantz Fanon, il s’agit d’une classe qui sera toujours subordonnée et qui ne sera jamais actrice d’un changement radical au profit des peuples.
Notons que le débat qui a eu lieu dans les années 1960 autour de l’existence ou non des classes sociales en Afrique ne mérite pas d’être continué, puisque Kwame Nkrumah, qui avait d’abord théorisé le « consciencisme » autour de l’idée que les classes sociales n’existaient pas sur le continent, a finalement publié, après son renversement par un coup d’État militaire, un ouvrage intitulé Les luttes de classes en Afrique.
Il y a ainsi des classes dominantes en Afrique, représentées aujourd’hui par ces millionnaires et milliardaires. Cependant, les classes dominantes locales ne sont pas apparues dans les dix dernières années.
Voir également l’article de Jean Nanga « Aperçu sur l’actuelle classe dominante en Afrique »
Depuis l’arrivée des premiers Européens sur le continent, il y a toujours eu une minorité native de l’Afrique qui a identifié ses intérêts avec ceux des Européens qui pratiquaient la traite négrière – c’est le cas notamment des rois africains. Cette minorité participait à la capture de celles et ceux qui deviendraient des esclaves et les amenaient dans les ports négriers, et ce jusqu’au 19e siècle. Après l’abolition de l’esclavage, cette nouvelle classe dominante native a continué des activités de traite et d’autres activités commerciales avec les colons. La participation de certaines familles à l’entreprise coloniale est ainsi l’un des facteurs clés de la naissance de classes dominantes en Afrique, et certains individus parmi les plus riches du continent aujourd’hui descendent de telles familles.
Ces classes dominantes ont également bénéficié des politiques post-coloniales d’indigénisation à partir des années 1960. Les gouvernants africains ont exproprié des capitalistes étrangers, seulement pour remettre leurs parts aux mains de capitalistes locaux. Ces entreprises, dirigées au bénéfice d’une minorité peu encline à respecter les règles de son propre jeu, ont bénéficié de crédits de banques publiques qui n’ont jamais été remboursés, contribuant en cela à la crise de la dette des années 1980.
La crise a conduit à la mise en place des PAS, donc aux privatisations d’entreprises et à la libéralisation des marchés. Les investisseurs étrangers ne sont pas les seuls à avoir profité de ces privatisations : des membres de la classe dominante africaine en ont bénéficié aux dépens des catégories les plus pauvres des populations.
Ainsi, cette classe dominante locale n’est peut-être pas aussi puissante que le capital étranger, mais elle n’est pas négligeable.
Depuis la mise en place des PAS, ce processus d’accumulation se fait avec le soutien des institutions financières internationales. Elles guident ce processus, encouragent les États à soutenir l’initiative privée. Les États mauvais élèves de ce processus sont mal classés dans le rapport Doing Business de la Banque mondiale.
Voir également l’article de Jean Nanga « Aperçu sur l’actuelle classe dominante en Afrique »
L’exposé de Jean Nanga a continué sur l’idée que les classes dominantes locales sont très souvent liées aux pouvoirs politiques, et certain-e-s dirigeant-e-s politiques sont eux-mêmes ou elles-mêmes des entrepreneurs. Par exemple, le président de la république du Nigeria de 1999 à 2007, Olusegun Obasanjo, a profité de son poste pour s’octroyer des milliers d’actions
Action
Actions
Valeur mobilière émise par une société par actions. Ce titre représente une fraction du capital social. Il donne au titulaire (l’actionnaire) le droit notamment de recevoir une part des bénéfices distribués (le dividende) et de participer aux assemblées générales.
d’une entreprise pétrolière et pour distribuer des actions à d’anciens généraux à la retraite. Un autre exemple est l’enrichissement d’Isabel Dos Santos, fille de José Eduardo dos Santos, président de l’Angola de 1979 à 2017. En une dizaine d’années, celle que les Angolais surnomment la « princesse » est devenue milliardaire notamment grâce aux privatisations décidées par son père en sa faveur. Elle détient aujourd’hui des actions dans les télécommunications, dans des banques commerciales
Banques commerciales
Banque commerciale
Banque commerciale ou banque de dépôt : Établissement de crédit effectuant des opérations de banque avec les particuliers, les entreprises et les collectivités publiques consistant à collecter des fonds pour les redistribuer sous forme de crédit ou pour effectuer à titre accessoire des opérations de placements. Les dépôts du public bénéficient d’une garantie de l’État. Une banque de dépôt (ou banque commerciale) se distingue d’une banque d’affaires qui fait essentiellement des opérations de marché. Pendant plusieurs décennies, suite au Glass Steagall Act adopté pendant l’administration Roosevelt et aux mesures équivalentes prises en Europe, il était interdit aux banques commerciales d’émettre des titres, des actions et tout autre instrument financier.
, dans les énergies fossiles, etc.
Quand ces entrepreneurs contractent des prêts qui deviennent non-performants, le fardeau de l’endettement retombe sur l’État et sur les classes les plus populaires. Par ailleurs, ces classes dominantes pratiquent souvent la fraude fiscale, ce qui alourdit le déficit public et ainsi le recours à l’endettement, et empêche la mobilisation de ressources par l’État à des fins de dépenses sociales. Pourtant, ces investisseurs et investisseuses ne sont jamais inquiété-e-s par de potentiels redressements fiscaux.
Lors du Africa CEO Forum (une rencontre annuelle du patronat africain et d’investisseurs internationaux organisée par Jeune Afrique et Rainbow unlimited, une entreprise suisse, et soutenue par la Banque africaine de développement, pour discuter des affaires économiques sur le continent) de 2014, il a été annoncé que les entreprises africaines contribuaient à 23 % des investissements sur le continent, alors que ce chiffre était de 8 % en 2007. Il a également été annoncé que le groupe d’entreprises africaines était le deuxième groupe investissant en Afrique, derrière les entreprises d’Europe de l’Ouest. Ce groupe se targue enfin d’être le deuxième groupe créateur d’emplois sur le continent. En réalité, on trouve parmi ces employés une minorité de cadres aux salaires élevés, qui peuvent être nationaux mais qui sont majoritairement des expatriés d’autres continents. Il ne faut pas croire que les classes dominantes africaines pratiqueraient la solidarité avec la force de travail africaine. Ces classes dominantes, qui investissent dans leurs pays d’origine, mais aussi sur le reste du continent africain, versent à la main-d’œuvre d’origine africaine des salaires moins élevés qu’à leurs salarié-e-s expatrié-e-s, et moins élevés également que les salaires versés par certaines entreprises étrangères.
Ces entreprises investissent également hors de l’Afrique, qu’il s’agisse des Pays-Bas, de la Corée du Sud, de la Russie ou encore du Brésil. Ces gens appartiennent ainsi à ce que certain-e-s appelleraient une classe dominante internationale.
Il peut bien sûr y avoir une certaine concurrence entre différents groupes de capitalistes (et donc entre capitalistes nationaux et capitalistes étrangers), comme dans toute société capitaliste, et une dénonciation des monopoles étrangers dans certains secteurs. Le capital africain peut parfois s’inquiéter d’être étouffé par le capital étranger. Ainsi, l’Association industrielle africaine s’était positionnée contre les accords de partenariat économique (APE). Mais les classes dominantes locales ne sont pas fondamentalement opposées au grand capital étranger, puisqu’elles en sont, dans une certaine mesure, un prolongement. Les capitaux sont aujourd’hui très interconnectés. Quelle que soit leur origine, ils obéissent avant tout à une logique qui est celle de la recherche des meilleurs rendements.
Voir également l’article de Jean Nanga « Aperçu sur l’actuelle classe dominante en Afrique »
Quant aux liens entre ces classes dominantes locales et la non-remise en cause des cycles d’endettement par la plupart des dirigeant-e-s africain-e-s, Éric Toussaint a précisé en quoi les capitalistes locaux (qui sont donc généralement proches, sinon confondus, avec les dirigeants politiques) ont tout intérêt à ce que leurs États se financent par l’endettement, tant interne qu’externe. Concernant l’endettement interne, on comprend aisément que les classes dominantes locales sont tout à fait enclines à prêter à l’État à un taux très rémunérateur. Cela était déjà présent dès le 19e siècle, et le phénomène a considérablement augmenté ces dernières décennies. Cela revient finalement à un transfert des revenus de l’État prélevés sur les pauvres vers la classe dominante qui, en investissant dans la dette interne, adopte un comportement qui peut être assimilé à la recherche d’investissements rentiers. La bourgeoisie locale trouve aussi un intérêt dans le recours de l’État à l’endettement externe. La bourgeoisie comprador (bourgeoisie commerciale des pays dominés) étant en grande partie une bourgeoisie importatrice, elle recycle les devises étrangères procurées par l’endettement externe afin de payer ses importations. Par ailleurs, le financement de l’État par l’endettement (il fait rouler sa dette, c’est-à-dire qu’il contracte de nouveaux prêts pour rembourser les précédents) tant interne qu’externe permet aussi de limiter le prélèvement des impôts sur le capital. Une stratégie de sortie des cycles d’endettement nécessitera donc forcément une augmentation de la taxation du capital.
Voir également l’article de Jean Nanga « Aperçu sur l’actuelle classe dominante en Afrique »
Omar Aziki, membre d’ATTAC-CADTM Maroc, a illustré ce qui avait été exposé par Jean Nanga en présentant la situation du capitalisme marocain. Celui-ci, subordonné aux impérialismes des États du Nord d’une part, reproduit d’autre part des pratiques d’exportation agressive de ses capitaux dans le continent africain et, en raison de l’interconnexion des capitaux au niveau mondial, constitue une porte d’entrée supplémentaire en Afrique pour les conquêtes néocoloniales des multinationales.
Les PAS, et avec eux les privatisations et la libéralisation du commerce, ont permis une plus grande concentration du capital au Maroc entre les mains d’un groupe très restreint de grands capitalistes locaux et de quelques multinationales. Ces politiques ont largement bénéficié du soutien du secteur public, qui a réalisé des investissements massifs pour réaliser les infrastructures nécessaires à la rentabilité du capital. Ces investissements ont augmenté le poids de l’endettement public et seront remboursés par la population marocaine. Le processus d’extension du capitalisme de « compérage » est largement dirigé par la monarchie marocaine, qui monopolise le pouvoir politique et étend sans cesse son emprise économique à travers son holding, la Société nationale d’investissement. L’accumulation du capital au Maroc étant confrontée à l’étroitesse du marché national, les capitalistes locaux cherchent à investir dans le reste du continent africain.
Le Maroc est aidé en cela par les impérialismes occidentaux, qui ont fait du royaume un allié privilégié puisqu’il est perçu comme un État stable et fort. La monarchie marocaine joue ainsi un rôle de tremplin pour le néocolonialisme et un rôle de gendarme en ce qui concerne les migrations (les autorités marocaines n’obéissent pas aveuglément aux demandes européennes, mais utilisent les politiques migratoires – et donc les migrant-e-s – comme monnaie d’échange dans leurs relations avec les impérialismes occidentaux).
En Afrique, les grands groupes marocains investissent notamment dans les télécommunications, dans le secteur bancaire, dans les énergies (fossiles et renouvelables), dans le BTP. Les groupes marocains ont su bénéficier en effet de la privatisation des services de télécommunication sur le continent africain. Il faut souligner que la téléphonie mobile accélère le processus d’inclusion financière des populations locales, à travers les comptes mobiles qui constituent un développement actuel de la microfinance. En 2014, 34 % de la population africaine possédaient un compte bancaire, mais 12 % avaient un compte bancaire mobile (contre 2 % au niveau mondial). Dans le secteur bancaire, ce ne sont pas moins de quarante-cinq filiales de banques marocaines qui sont présentes en Afrique. Les actifs
Actif
Actifs
En général, le terme « actif » fait référence à un bien qui possède une valeur réalisable, ou qui peut générer des revenus. Dans le cas contraire, on parle de « passif », c’est-à-dire la partie du bilan composé des ressources dont dispose une entreprise (les capitaux propres apportés par les associés, les provisions pour risques et charges ainsi que les dettes).
du grand capital financier marocain totalisent 107 % du PIB
PIB
Produit intérieur brut
Le PIB traduit la richesse totale produite sur un territoire donné, estimée par la somme des valeurs ajoutées.
Le Produit intérieur brut est un agrégat économique qui mesure la production totale sur un territoire donné, estimée par la somme des valeurs ajoutées. Cette mesure est notoirement incomplète ; elle ne tient pas compte, par exemple, de toutes les activités qui ne font pas l’objet d’un échange marchand. On appelle croissance économique la variation du PIB d’une période à l’autre.
marocain. Ces banques sont généralement des banques universelles : elles proposent des services bancaires de dépôt, d’investissement, des services d’assurances. Ces banques pratiquent également des activités offshore. Le transport constitue un autre secteur clé pour le capitalisme marocain. Le secteur public reste privilégié pour développer ce secteur. Cependant, le développement des partenariats public-privé permet aux entreprises privées d’acquérir d’importants marchés d’infrastructures. Les groupes marocains investissent aussi dans le secteur du BTP : mentionnons ici l’existence d’une filiale cimentière commune à la Société nationale d’investissement et au groupe franco-suisse Lafarge-Holcim (Lafarge-Holcim est actuellement au cœur d’une enquête judiciaire en France en lien avec des soupçons de financement de Daesh en Irak et en Syrie). Enfin, le capitalisme marocain joue un rôle important dans l’extraction de minerais et d’énergies fossiles sur le continent, ainsi que dans l’accaparement de terres afin de développer des pratiques agro-industrielles qui ne bénéficient nullement aux populations.
Avec l’aide des institutions financières internationales et des impérialismes occidentaux et chinois, le capital marocain participe ainsi, aux côtés d’autres multinationales, aux processus néo-coloniaux à l’œuvre en Afrique. Une partie des richesses du continent est ainsi accaparée par une poignée de capitalistes marocains. Notons que dans la plupart des secteurs économiques qui ont été mentionnés, les capitaux de la monarchie dominent les investissements marocains. En maintenant un pouvoir autoritaire qui sert son enrichissement propre, la monarchie est un frein au développement des forces productives de la société marocaine.
Le programme de formation a été enrichi par une discussion autour des définitions et de l’utilisation qui peut être faite des concepts de dettes illégitimes, de dettes illégales, de dettes odieuses et de dettes insoutenables. Une étude autour de la doctrine de la dette odieuse a été exposée par Éric Toussaint. La présentation de l’élaboration de la doctrine d’Alexandre Nahum Sack (selon laquelle une dette est odieuse dès lors qu’elle a servi l’intérêt d’une minorité privilégiée alors que les créanciers en étaient conscients, ou étaient en mesure d’en être conscients) sur base de principes juridiques fondamentaux et de l’étude de nombreux précédents historiques a permis de souligner un certain nombre d’arguments politiques légitimant la suspension de paiement et la répudiation de dettes, contrairement à l’acception dominante selon laquelle le paiement des dettes devrait être systématiquement honoré.
Les comportements rapaces de fonds d’investissement
Fonds d’investissement
Les fonds d’investissement (private equity) ont pour objectif d’investir dans des sociétés qu’ils ont sélectionnées selon certains critères. Ils sont le plus souvent spécialisés suivant l’objectif de leur intervention : fonds de capital-risque, fonds de capital développement, fonds de LBO (voir infra) qui correspondent à des stades différents de maturité de l’entreprise.
qualifiés de fonds vautours
Fonds vautour
Fonds vautours
Fonds d’investissement qui achètent sur le marché secondaire (la brocante de la dette) des titres de dette de pays qui connaissent des difficultés financières. Ils les obtiennent à un montant très inférieur à leur valeur nominale, en les achetant à d’autres investisseurs qui préfèrent s’en débarrasser à moindre coût, quitte à essuyer une perte, de peur que le pays en question se place en défaut de paiement. Les fonds vautours réclament ensuite le paiement intégral de la dette qu’ils viennent d’acquérir, allant jusqu’à attaquer le pays débiteur devant des tribunaux qui privilégient les intérêts des investisseurs, typiquement les tribunaux américains et britanniques.
, spéculant sur des titres de dettes d’États faisant face à d’importantes difficultés afin d’en tirer des profits vertigineux, ont été exposés et dénoncés. Le cas de l’Argentine, présenté par Maria Elena Saludas qui milite de longue date dans ce pays d’Amérique latine, a permis d’illustrer ces pratiques. Le pays a en effet été victime de fonds vautours, qui ont racheté de nombreux titres de la dette
Titres de la dette
Les titres de la dette publique sont des emprunts qu’un État effectue pour financer son déficit (la différence entre ses recettes et ses dépenses). Il émet alors différents titres (bons d’état, certificats de trésorerie, bons du trésor, obligations linéaires, notes etc.) sur les marchés financiers – principalement actuellement – qui lui verseront de l’argent en échange d’un remboursement avec intérêts après une période déterminée (pouvant aller de 3 mois à 30 ans).
Il existe un marché primaire et secondaire de la dette publique.
et ont refusé de participer aux restructurations après le défaut de paiement de décembre 2001. Suite à la victoire de la droite et à l’arrivée de Mauricio Macri à la tête de l’État en décembre 2015, ce dernier a rapidement pris des mesures visant à satisfaire les exigences des fonds vautours, et l’Argentine a emprunté de l’argent sur les marchés financiers
Marchés financiers
Marché financier
Marché des capitaux à long terme. Il comprend un marché primaire, celui des émissions et un marché secondaire, celui de la revente. À côté des marchés réglementés, on trouve les marchés de gré à gré qui ne sont pas tenus de satisfaire à des conditions minimales.
pour la première fois depuis 2001, alors qu’elle avait démontré qu’un pays pouvait connaître un taux de croissance positif sans recourir aux marchés financiers.
L’outil de l’audit de la dette, qui avait déjà été présenté lors de la session portant sur l’histoire du CADTM, a nourri les réflexions. En Afrique subsaharienne où plusieurs dettes correspondent aux critères de la dette odieuse
Dette odieuse
Selon la doctrine, pour qu’une dette soit odieuse, et donc nulle, elle doit remplir deux conditions :
1) Elle doit avoir été contractée contre les intérêts de la Nation, ou contre les intérêts du Peuple, ou contre les intérêts de l’État.
2) Les créanciers ne peuvent pas démontrer qu’ils ne pouvaient pas savoir que la dette avait été contractée contre les intérêts de la Nation.
Il faut souligner que selon la doctrine de la dette odieuse, la nature du régime ou du gouvernement qui la contracte n’est pas particulièrement importante, puisque ce qui compte, c’est l’utilisation qui est faite de cette dette. Si un gouvernement démocratique s’endette contre l’intérêt de la population, cette dette peut être qualifiée d’odieuse, si elle remplit également la deuxième condition. Par conséquent, contrairement à une version erronée de cette doctrine, la dette odieuse ne concerne pas seulement les régimes dictatoriaux.
(voir : Eric Toussaint, « La Dette odieuse selon Alexander Sack et selon le CADTM » ).
Le père de la doctrine de la dette odieuse, Alexander Nahum Sack, dit clairement que les dettes odieuses peuvent être attribuées à un gouvernement régulier. Sack considère qu’une dette régulièrement contractée par un gouvernement régulier peut être considérée comme incontestablement odieuse... si les deux critères ci-dessus sont remplis.
Il ajoute : « Ces deux points établis, c’est aux créanciers que reviendrait la charge de prouver que les fonds produits par lesdits emprunts avaient été en fait utilisés non pour des besoins odieux, nuisibles à la population de tout ou partie de l’État, mais pour des besoins généraux ou spéciaux de cet État, qui n’offrent pas un caractère odieux ».
Sack a défini un gouvernement régulier comme suit :
« On doit considérer comme gouvernement régulier le pouvoir suprême qui existe effectivement dans les limites d’un territoire déterminé. Que ce pouvoir soit monarchique (absolu ou limité) ou républicain ; qu’il procède de la « grâce de Dieu » ou de la « volonté du peuple » ; qu’il exprime la « volonté du peuple » ou non, du peuple entier ou seulement d’une partie de celui-ci ; qu’il ait été établi légalement ou non, etc., tout cela n’a pas d’importance pour le problème qui nous occupe. »
Donc, il n’y a pas de doute à avoir sur la position de Sack, tous les gouvernements réguliers, qu’ils soient despotiques ou démocratiques, sous différentes variantes, sont susceptibles de contracter des dettes odieuses.
et où les conséquences des PAS ont été désastreuses pour les populations et pour l’environnement, l’utilité de réaliser un audit intégral (c’est-à-dire ne s’intéressant pas uniquement aux caractéristiques de l’emprunt – somme empruntée, taux d’intérêt
Taux d'intérêt
Quand A prête de l’argent à B, B rembourse le montant prêté par A (le capital), mais aussi une somme supplémentaire appelée intérêt, afin que A ait intérêt à effectuer cette opération financière. Le taux d’intérêt plus ou moins élevé sert à déterminer l’importance des intérêts.
Prenons un exemple très simple. Si A emprunte 100 millions de dollars sur 10 ans à un taux d’intérêt fixe de 5 %, il va rembourser la première année un dixième du capital emprunté initialement (10 millions de dollars) et 5 % du capital dû, soit 5 millions de dollars, donc en tout 15 millions de dollars. La seconde année, il rembourse encore un dixième du capital initial, mais les 5 % ne portent plus que sur 90 millions de dollars restants dus, soit 4,5 millions de dollars, donc en tout 14,5 millions de dollars. Et ainsi de suite jusqu’à la dixième année où il rembourse les derniers 10 millions de dollars, et 5 % de ces 10 millions de dollars restants, soit 0,5 millions de dollars, donc en tout 10,5 millions de dollars. Sur 10 ans, le remboursement total s’élèvera à 127,5 millions de dollars. En général, le remboursement du capital ne se fait pas en tranches égales. Les premières années, le remboursement porte surtout sur les intérêts, et la part du capital remboursé croît au fil des ans. Ainsi, en cas d’arrêt des remboursements, le capital restant dû est plus élevé…
Le taux d’intérêt nominal est le taux auquel l’emprunt est contracté. Le taux d’intérêt réel est le taux nominal diminué du taux d’inflation.
, but recherché, identité du créancier, etc. – mais aussi aux conséquences sociales et environnementales de l’endettement) à l’image de ce qui a été fait en Équateur a été évaluée très positivement.
La privatisation du chemin de fer Dakar – Bamako sur les conseils « avisés » de la Banque mondiale : un constat d’échec amer L’invitation faite à Éric Toussaint de donner une conférence publique dans les locaux de la Coalition des alternatives africaines dette et développement (CAD-Mali, membre du réseau international du CADTM) à l’issue de la formation internationale a permis de dénoncer, devant une salle comble d’une soixantaine de personnes et plusieurs journalistes, un système de subordination par la dette des classes populaires depuis cinq millénaires. Revenant plus particulièrement sur l’histoire des dettes souveraines dans les deux derniers siècles, il a été démontré que la dette publique a été utilisée aux 19e et 20e siècles comme un puissant outil de domination des États impérialistes sur les États « périphériques ». Enfin, les politiques d’endettement et de continuation de la domination sous la forme de néo-colonialisme poursuivies depuis les indépendances – conquises pour la plupart des États africains dans les années 1960 –, et notamment les politiques d’ajustement structurel avancées par la Banque mondiale et le FMI, en collaboration tant avec les dirigeants politiques locaux qu’avec ceux des États impérialistes, ont été vigoureusement dénoncées. Justement, cette conférence publique a été l’occasion pour certain-e-s participant-e-s à la formation internationale de se déplacer dans Bamako, et de passer à pied dans la gare ferroviaire de la ligne Dakar-Bamako… totalement vide et désaffectée. Broulaye Bagayoko, militant du CADTM au Mali, nous a expliqué que cette ligne de chemin de fer avait été privatisée en 2003, dans le cadre de l’ajustement structurel exigé par les créanciers internationaux. À cette époque, le journal Jeune Afrique écrivait en effet que la privatisation « était devenue une des conditions de l’octroi par les bailleurs de fonds (Banque mondiale, Agence française de développement, BAD [Banque africaine de développement], BEI [Banque européenne d’investissement], BOAD [Banque ouest-africaine de développement] …) d’un prêt de 73 millions de dollars (61,6 millions d’euros). [1] » Un consortium du nom de Transrail SA est mis sur pied, et le groupe canado-français Canac-Getma en acquiert la majorité des parts. D’après l’article de Jeune Afrique : « Canac-Getma promet d’investir 40 milliards de F CFA sur cinq ans pour « améliorer le réseau ferroviaire, acquérir de nouvelles machines et des wagons, et remettre en état certaines installations ». En outre, le consortium s’engage, comme le stipule le cahier des charges, à reprendre au moins 1 526 personnes (763 dans chaque pays) sur un total d’un peu plus de 2 600. [2] » La réalité est bien plus brutale… Les nouveaux gérants de la ligne de chemin de fer entre le Sénégal et le Mali commencent par licencier plusieurs centaines d’ouvriers selon leur niveau d’activité syndicale afin d’empêcher de manière préventive toute résistance à la restructuration libérale. Et quelle restructuration ! « La privatisation du chemin de fer n’a pas seulement détérioré les conditions de travail des syndiqués, elle a aussi affecté la mobilité de la population, de même que l’économie locale. En effet, le transport de passagers sur le réseau ferroviaire malien est à l’abandon, car les opérateurs privés gèrent essentiellement le trafic international de marchandises, pour ainsi engranger des profits à court terme, au détriment du service aux usagers. De plus, la fermeture de 26 haltes et gares au Mali fait en sorte qu’autant de villages sont désormais isolés et qu’il n’y a plus de possibilités pour les habitants le long du rail d’échanger des produits alimentaires, faute de voyageurs et de petits commerçants. [3] » Dans une région où les infrastructures routières sont peu développées, le rail revêtait une importance décisive pour la mobilité des populations. L’arrêt du transport de passagers a provoqué l’appauvrissement de celles et ceux qui vivaient d’activités commerciales au passage des trains, et contribue à l’exode des populations rurales vers les zones urbaines. Le groupe Canac-Getma, qui n’a pas réalisé les travaux d’entretien et d’amélioration qu’il avait promis, a rapidement fait faillite et la ligne Dakar-Bamako est passée entre les mains de différents actionnaires privés à partir de 2007, sans plus de succès. Fin 2007, le déficit de Transrail SA était évalué à 26,4 millions de dollars et, en 2008, alors que le consortium demande aux États sénégalais et malien de recapitaliser l’entreprise à hauteur de 22 millions de dollars, les gouvernements de ces deux États déplorent la « mort de l’activité ferroviaire » [4]. Finalement, Transrail SA perd la concession en décembre 2015. En juillet 2017, un accord pour le financement de la réhabilitation de la ligne est trouvé entre la structure publique Dakar-Bamako Ferroviaire qui a repris la concession, et le cimentier Dangote Cement Sénégal détenu par un milliardaire nigérian [5]. Rien ne garantit que ce partenariat sera créateur d’emplois décents pour les populations locales, ni que le transport de passagers reprendra prochainement. Surtout, si l’activité ferroviaire reprenait, il est d’ores et déjà certain que ni le Mali, ni le Sénégal ne bénéficieront des retombées économiques directes puisque l’on reste dans un schéma de partenariat public-privé bénéficiant au privé. |
Un audit intégral de la dette aiderait les mouvements sociaux auxquels nous participons et que nous cherchons à développer à se saisir de la question des dettes publiques et à convaincre les populations de la pertinence de leur répudiation unilatérale. Ces mesures, qui permettraient de libérer d’importantes ressources pour la mise en œuvre de politiques sociales et créatrices d’emploi, devront être accompagnées d’autres mesures politiques fortes afin d’assurer la sortie définitive des cycles d’endettement et de jeter les fondements d’un monde qui aurait un sens, contrairement à celui dans lequel nous vivons.
Ces dernières réflexions ont pu être prolongées lors de la présentation de la répudiation, suite à la révolution d’Octobre en Russie, des dettes contractées par le régime tsariste et par le gouvernement provisoire de février-octobre 1917. Les perspectives de changement révolutionnaire de la société ont été évaluées à l’aune des expériences plus récentes du Maghreb et du Machreq, et du renversement de Blaise Compaoré au Burkina Faso. Tant la contre-révolution stalinienne dans la Russie soviétique que les contre-révolutions à l’œuvre au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, de même que l’absence de changements réels au Burkina Faso, ont renforcé l’idée qu’il est nécessaire pour les exploité-e-s et les opprimé-e-s de développer des mobilisations fortes, continues et démocratiques afin de parvenir à l’établissement pérenne d’un rapport de forces qui leur sera favorable. Les expériences accumulées par les franges mobilisées de la population, et notamment les jeunes, dans les luttes récentes qui ont ébranlé des régimes autoritaires au service des exploiteurs, constitueront indéniablement des atouts dans les combats à venir.
Comme chaque année, le Conseil international du CADTM s’est réuni pour faire le bilan de l’activité du réseau international et dégager des perspectives d’action pour l’avenir.
Un bilan de l’activité du Secrétariat international partagé (SIP) depuis la dernière Assemblée mondiale du réseau tenue en avril 2016 à Tunis a été présenté par ATTAC-CADTM Maroc et le CADTM Belgique. Le Conseil international a évalué très positivement les avancées et les réalisations du SIP.
Grâce à la participation active d’ATTAC-CADTM Maroc aux tâches du SIP, les contacts avec des militant-e-s au Liban et en Égypte s’approfondissent, et un CADTM devrait prochainement voir le jour en Égypte malgré les importantes difficultés liées à la répression de tout mouvement contestataire sous le régime du général devenu président Abdel Fattah Al-Sissi. ATTAC-CADTM Maroc continue de développer ses nombreuses activités malgré, là aussi, la répression des autorités qui refusent de reconnaître l’association. Ainsi en 2017, l’association marocaine a publié une nouvelle étude sur le microcrédit (dont une synthèse est disponible en ligne) et a continué d’organiser et de participer à d’importantes rencontres militantes, tant au niveau national qu’au niveau international – une rencontre maghrébine autour des accords de libre-échange et de la souveraineté alimentaire est prévue pour la mi-décembre 2017, avec la participation annoncée de militant-e-s de Tunisie, d’Algérie, d’Égypte et de Palestine.
Le programme des activités à venir du réseau existant en Afrique subsaharienne a été présenté lors de cette réunion. Au cours des prochaines années devraient ainsi être organisées, en plus de l’Université du CADTM Afrique et du prochain séminaire « Femmes, dettes et microcrédits », des formations dans chaque pays d’Afrique où le réseau CADTM a une organisation membre. De même que pour l’Égypte, un groupe militant du Kenya a fait part récemment de sa demande d’adhésion au réseau international du CADTM.
En Europe, le CADTM maintient ses contacts avec les réseaux altermondialistes et observe avec intérêt les succès relatifs de nouvelles forces de gauche sur le continent, en essayant d’engager avec celles-ci des collaborations constructives sur les défis à relever dans la zone euro. Par ailleurs, le CADTM a soutenu activement le lancement d’un front des municipalités contre la dette illégitime dans l’État espagnol, et un CADTM est né en Italie et s’investit dans des processus d’audits des dettes municipales.
Les dates et le lieu du prochain atelier régional du CADTM en Asie ont été validées. Celui-ci aura lieu du 6 au 8 avril 2018 à Colombo, au Sri Lanka, et sera certainement suivi d’une activité publique à Delhi, en Inde, autour de la présentation du livre Le Système Dette, dont une version anglaise devrait être publiée dans le pays au début de l’année 2018.
En Amérique latine, le réseau du CADTM est très impliqué dans l’organisation du contre-sommet « OMC dehors ! » qui a lieu à l’occasion de la réunion de l’OMC
OMC
Organisation mondiale du commerce
Créée le 1er janvier 1995 en remplacement du GATT. Son rôle est d’assurer qu’aucun de ses membres ne se livre à un quelconque protectionnisme, afin d’accélérer la libéralisation mondiale des échanges commerciaux et favoriser les stratégies des multinationales. Elle est dotée d’un tribunal international (l’Organe de règlement des différends) jugeant les éventuelles violations de son texte fondateur de Marrakech.
L’OMC fonctionne selon le mode « un pays – une voix » mais les délégués des pays du Sud ne font pas le poids face aux tonnes de documents à étudier, à l’armée de fonctionnaires, avocats, etc. des pays du Nord. Les décisions se prennent entre puissants dans les « green rooms ».
Site : www.wto.org
de décembre 2017 à Buenos Aires, en Argentine. En 2018, le réseau du CADTM en Amérique latine se mobilisera contre le G20
G20
Le G20 est une structure informelle créée par le G7 (Allemagne, Canada, États-Unis, France, Italie, Japon, Royaume-Uni) à la fin des années 1990 et réactivée par lui en 2008 en pleine crise financière dans le Nord. Les membres du G20 sont : Afrique du Sud, Allemagne, Arabie saoudite, Argentine, Australie, Brésil, Canada, Chine, Corée du Sud, États-Unis, France, Inde, Indonésie, Italie, Japon, Mexique, Royaume-Uni, Russie, Turquie, Union européenne (représentée par le pays assurant la présidence de l’UE et la Banque Centrale européenne ; la Commission européenne assiste également aux réunions). L’Espagne est devenue invitée permanente. Des institutions internationales sont également invitées aux réunions : le Fonds monétaire international, la Banque mondiale. Le Conseil de stabilité financière, la BRI et l’OCDE assistent aussi aux réunions.
qui sera accueilli par l’Argentine également.
Le Conseil international du CADTM a également discuté de la participation du réseau au prochain Forum social mondial qui se tiendra en mars 2018 à Salvador de Bahia, au Brésil, ainsi que de la participation au processus de convergence des mouvements sociaux initié par le Mouvement des Sans Terres du Brésil et qui devrait se réunir à Caracas, au Venezuela, durant le premier semestre 2018. Un débat sur l’appréciation des gouvernements issus de la gauche au Venezuela, en Équateur et en Bolivie a amené les participant-e-s à la discussion à se prononcer évidemment en faveur de positions de solidarité face aux menaces d’ingérence impérialiste, sans pour autant renoncer à avoir une approche critique des politiques menées par les gouvernants dans ces trois pays.
Ces activités tenues à Bamako ont renforcé chez les participant-es l’idée que, le capitalisme n’ayant pas de frontières, il est nécessaire de renforcer nos luttes à l’échelle internationale. Contre les politiques d’endettement au service de l’impérialisme, contre toutes les formes d’exploitation et d’oppression, la lutte continue !
[1] Tidiane Dioh, « Privatisation sur les rails », Jeune Afrique, 23 juin 2003.
[2] Ibid.
[3] Myriam Cloutier, « Petit train ne va pas loin », Le journal des alternatives, 30 avril 2009. URL : http://journal.alternatives.ca/spip.php?article4743
[4] Ibid.
[5] Amadou Oury Diallo, Christophe Le Bec, « Dakar-Bamako Ferroviaire compte sur Dangote pour se remettre sur les rails », Jeune Afrique, 4 septembre 2017. URL : http://www.jeuneafrique.com/mag/468655/economie/dakar-bamako-ferroviaire-compte-sur-dangote-pour-se-remettre-sur-les-rails/
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